22. Catriona

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Catriona et Evrard galopaient au cœur des bois, aussi rapides que des boulets de canon. Elle essayait de se concentrer sur le fracas des sabots, sur ce rythme régulier et sans fin. Elle était stupéfaite que leur plan ait fonctionné, mais terrifiée à l'idée que la garde puisse les rattraper. Elle tentait de chasser cette idée, pourtant elle ne cessait, à chaque arpent qu'ils parcouraient, à chaque village qu'ils dépassaient, de revenir la hanter. Elle se pencha sur l'encolure de son cheval pour esquiver une branche. La brune espérait qu'Evrard ne la laissera pas tomber, plus maintenant qu'ils avaient franchi la herse du château et les portes d'Amboise. Les bois se faisaient hostiles, la seule lumière étant le rayonnement incertain de la lune, qui apparaissait et disparaissait au gré des nuages. L'homme semblait les connaître comme sa poche, alors elle se laissa guider.

Au bout d'un moment, les chevaux réduisirent leurs allures à un petit galop, puis à un trot, et Evrard se rendit compte que des cris résonnaient du village qu'ils approchaient.

— Que se passe-t-il ici ? s'enquit-elle, la peur marquant son visage.

— Je l'ignore, mais cela n'augure rien de bon...

Il immobilisa son cheval au milieu du chemin et scruta les alentours. Il était si concentré que Catriona n'osa pas lui demander à quoi il pensait.

— Nous allons devoir traverser ce village, déclara-t-il d'un ton résigné.

— Etes-vous sûr de ce que vous faites ? insista-t-elle en regardant le village au loin. Cela ne me semble pas très sûr.

— Ce ne le sera pas. Mais nous ne pouvons pas lancer nos chevaux au milieu des bois avec cette obscurité.

Il sortit son épée de son fourreau et la garda à la main, prêt à l'utiliser.

— Restez prêt de moi, et ne faites pas de gestes brusques, ordonna-t-il.

Ils avancèrent prudemment jusqu'aux premières maisons. Les cris redoublaient d'intensité et une odeur pestilentielle monta aux narines de la jeune noble. Soudain, un monticule de cadavres d'animaux en putréfaction leur sauta aux yeux, Catriona fit une grimace de dégoût tandis que le Chevalier restait sur la défensive.

Ils dépassèrent les deux premières maisons et elle remarqua des traces et des symboles étranges dessinés sur les portes. En y regardant plus attentivement, elle constata avec horreur que c'était du sang.

— Pourquoi ont-ils fait cela ? lança-t-elle, alors qu'ils se dirigeaient malgré eux vers le tapage.

Un air sombre s'empara du visage d'Evrard.

— Ils croient sûrement que cela les protégera contre la malebête.

Catriona tressaillit et posa les yeux sur un amas d'os qui s'élevait à côté d'un des foyers.

— De quoi parlez-vous exactement ?

— Des démons, des sorcières, des bêtes monstrueuses, peu importe, cela ne réside que dans les cauchemars des faibles d'esprits.

Au même instant, un homme à l'allure décharnée et l'œil hagard sorti précipitamment de chez lui avec des bûches dans les bras.

— Ne restez pas là, l'heure du jugement dernier va arriver !

Il s'éloigna en marmonnant :

— Avec ça, le démon ne nous atteindra pas.

— Vous voyez ! L'hystérie collective leur a ramolli le peu de cervelle qu'ils avaient.

— Pensez-vous réellement que les sorcières n'existent pas ? demanda-t-elle en plissant des yeux, songeuse. À quoi servent les procès et pourquoi les brûlent-t-on dans ce cas ?

Bandit HeartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant