34- Amis?

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C'est stupéfiant comme le sérieux a retrouvé sa place dans cet espace du salon. Les garçons s'entraînent sans relâche sur la chorégraphie tandis que je ne cesse d'imaginer un plan à trois au fil des positions. Je dois être la seule cochonne des lieux visiblement...

A une heure du grand départ, on se décide enfin à reprendre la suite du questionnaire.

— Si vous deviez choisir un animal représentatif, ce serait?

Je suis surprise de découvrir le lama pour Hyunjin et le papillon pour notre dieu du sexe. Personnellement, je trouve que mon rire ressemble à celui d'un phoque et que mes fesses ont la même démarche qu'un corgi.

— Quelle est votre saison préférée? Moi c'est le printemps.

— L'automne, répond mon meilleur ennemi.

— L'été. On est vachement en phase quand ça ne tourne pas autour du cul, dis-je en rigolant.

— Si on ne devait choisir qu'un fruit?

A l'unanimité, nous votons pour la fraise. Mon esprit pervers m'envoie de nouvelles images de chantilly sur un corps nu avec moi léchant tout ce qui s'y trouve... Zut... Il faut vraiment que je m'éloigne d'eux.

— Qu'est ce que vous préférez dans votre corps? Moi, ce sont mes yeux.

— Mes lèvres. Cherche pas, pour ma petite voyeuse cochonne, ce sont ses seins de rêve.

— Tu as aussi un très beau fessier, Meena, ajoute Beomgyu.

— Deux gros pervers... Je vous jure.

— Dis celle qui ne pense qu'au cul depuis tout à l'heure, me coupe le chef de groupe. Désolée ma belle mais tout se lit sur ton visage.

Je blêmis dans l'immédiat. Je ne m'attendais pas à être autant transparente.

— Allez, on termine avec l'énigme. Où trouve-t-on samedi avant vendredi?

Encore une fois, je m'agace devant cette réflexion stupide. Ils pensent vraiment créer une cohésion en nous tourmentant avec des énigmes à la con?

— Faut chercher dans un calendrier. Sûrement que dans un mois, ça doit commencer par le samedi.

— J'suis pas convaincue par tes réflexions. T'as quand même voulu compter des gouttes hier.

Je me tourne vers Beomgyu qui sourit un peu trop fort à mon goût. Ce type est un cerveau sur patte. Je suis certaine qu'il a la réponse mais veux nous laisser cogiter.

— Donne-nous un indice.

— Je suis incorruptible, ma chère Meena. Tu peux tenter ce que tu veux, je ne céderai rien à moins de le vouloir.

Je prends son défi au pied de la lettre et avance vers lui. Je sens Hyunjin se raidir en pensant que mes intentions sont toutes sauf chastes mais je me jette sur les flancs de Beomgyu pour le chatouiller. Il envoie balader le papier afin que je ne l'abîme pas mais ne me repousse pas pour autant. Mes doigts jouent de son corps comme d'un instrument mais même les larmes aux yeux, il ne lâche rien.

— Ça va vraiment me manquer, tout ça... Dit-il à bout de souffle. Je crois que j'ai passé un weekend mémorable. Je voulais que vous le sachiez.

Hyunjin récupère mon corps afin que je m'installe entre ses cuisses. Son bras agit comme une protection alors que nous n'avons pas pris le temps d'expliquer ce sentiment particulier qui nous unissait.

— Amis? Propose Hyunjin en tendant la main entre nous.

Une frisson d'horreur me parcourt tandis que Beomgyu pose la sienne et que j'imite le geste sans réfléchir. Voilà donc tout ce que nous sommes? Des amis? Des sortes de sex-friends?
J'arrive à sentir mon coeur se fracasser tandis que mon cerveau me répète que je n'ai qu'à m'en prendre à moi-même. Je le savais, pourtant j'ai abaissé mes défenses.

— Oui, amis tous les trois, dis-je pour mettre fin à mes espoirs.

Je déchante sans vouloir le montrer. Quand on joue avec le feu, on finit toujours par se brûler.

— C'est le dictionnaire, la réponse.

Le dernier mot est inscrit sur cette feuille, signant la fin de cette belle aventure.
Dans l'heure suivante, Beomgyu nous salue et retrouve ses amis de la Terminale C. J'ai l'impression que tout cela n'était pas réel, pourtant Hyunjin insiste pour monter dans mon taxi tout en sachant que nous ne pourrons pas communiquer. Le chauffeur l'ayant reconnu, chacune de nos paroles risque d'être relayée.

La voiture s'immobilise devant nos villas. Il se fait tard mais les lumières dans le salon m'indique que mon père a fait l'effort d'être présent pour m'accueillir. Tandis qu'il me salue de la main comme si tout n'avait été qu'un rêve, je ressens le poids de la solitude.
Je n'ai pas besoin de me voiler la face. Je sais que je suis en train de tomber amoureuse du mauvais type. Si on était dans un film, il courrait vers moi et m'embrasserait mais il n'en est rien.

Je passe la porte et découvre mon père affalé dans le canapé.

— Alors?

D'un hochement d'épaules, je réalise que mon coeur est sur le point de s'effondrer. Une amie, voilà ce que je suis au final pour lui.
Mon père remarque mes yeux brillants et se lève pour m'attirer contre lui. Il m'offre le câlin dont j'avais tant besoin.

— Tu veux en parler?

Je secoue la tête pour cacher mes stupides larmes. Je n'ai pas envie d'avouer que j'ai passé le weekend le plus merveilleux de toute ma vie et que la chute est plus rude que je ne le pensais.

— Tu as trois pizzas sur la table pour oublier tes chagrins? Est ce que ça te convient?

Trop faible face à l'appel du ventre, je le rejoins dans le canapé et déguste cette malbouffe devant une énième émission de K-pop en me répétant que je dois mettre tout cela de côté, comme si ça n'avait jamais existé.

Red LightsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant