Red Lights

42- Rendez-vous aux toilettes

L'affrontement avec le deuxième traître ne devra pas durer très longtemps car le rendez-vous avec mon contact approche.  Mais je désire faire les choses de façon mémorable.

Nous profitons d'une balade des amis de ma cible dans le couloir pour agir. Chacun des mecs du groupe se charge d'éloigner les protecteurs de Beomgyu afin de me le laisser.

— Qu'est ce qui se passe Meena?

— A toi de me le dire...

— Et vite, rajoute Chris en faisant craquer ses phalanges.

Beomgyu observe silencieusement la scène puis fait signe à ses amis de s'éclipser sans résister. Il nous entraîne dans une salle de classe déserte afin de pouvoir parler plus librement.

— Je suppose que vous êtes là pour la liste.

— Bien deviné, enculé. Franchement, je ne t'imaginais pas comme ça, Beomgyu.

— Parce que je ne le suis pas, Chris. Meena, va falloir que tu me crois sur parole mais, juste avant, est ce que je peux te demander de t'éloigner, mec. J'ai besoin de lui parler.

Connaissant la capacité de Chris à garder un secret, j'accepte cette exigence pour protéger mon intimité. Cependant, je barricade mon esprit pour ne pas me laisser attendrir.

— Meena, je te jure que je ne participe en rien à tout ça.

— C'est facile à dire une fois devant le fait accompli.

— Non, je te promets. Ces délires de paris, c'est pas mon truc. Les mecs m'ent ont parlé à notre retour et j'ai pété un câble en apprenant qu'ils avaient pu oser penser se lancer là-dedans. Je te jure que je les ai recadré. Toi et moi, ça a été sincère.

J'ai beau me répéter que c'est un très bon acteur, je le trouve tout de même convaincant.

— Qu'est ce qui me pousserait à te croire?

— Ce lien que nous avons eu. Tu sais qu'il était sincère. Tout comme avec Hyunjin. Nous...

— Mauvais exemple. Ce connard était dans le lot.

Beomgyu se redresse de la table dont il était assise et se frotte le visage incrédule.

— Ce n'est pas possible. Quand j'ai demandé les noms des participants à Taehyun, il ne m'a jamais dit le sien et je suis certain qu'il ne m'a pas menti. De toute façon, il a l'air trop amoureux de toi pour tenter quelque chose de la sorte.

C'est à mon tour de refuser d'accepter ses paroles. Mon esprit remet en question ce que mon coeur hurle de croire.

— Jeongin m'a prévenu de toute cette histoire et m'a dit que Changbin et Chris, qui me draguaient, n'étaient pas concernés. Sur le moment, il n'a jamais parlé de Hyunjin. C'est qu'il devait y avoir une raison...

— Ou bien juste qu'il n'était pas au courant que Hyunjin avait des vues sur toi...

La réalité me frappe sans ménagement. Beomgyu a toujours eu l'esprit plus vif que nous autres. Ce que je pensais évident ne l'était pas pour tous après l'avoir si bien caché. Et dire qu'il avait essayé de me l'avouer.

— Es-tu sûr de toi, Beomgyu ?

— Aussi sûr que tu es dingue de ce mec.

Alors, je suis dans la merde car j'ai bousillé notre histoire. Je l'ai accusé à tord tandis qu'il se présentait à moi devant ma chambre. Je l'ai repoussé, ai embrassé un autre pour le rendre jaloux... Tout ça pour une stupide erreur d'appréciation.

— Je crois que je me suis plantée en beauté...

— Le plus important est de s'en rendre compte avant que ce ne soit trop tard. Allez, file rejoindre ce petit chanceux.

Je me précipite vers la porte et me retourne une dernière fois.

— Beomgyu... Désolée de m'être trompée.

— Je t'en prie ma belle, je préfère ce cas de figure. Mais sache que je ne t'en veux pas. Apprends juste à faire confiance à ton coeur.

Chris me réceptionne devant la porte de la salle et attend mes instructions pour savoir s'il doit faire craquer ses phalanges mais je rassure mon garde du corps. Ce soir, il n'y a que mon coeur à sauver.

Avant tout, un passage aux toilettes du bâtiment C s'impose. Je trouve une excuse pour m'éloigner des garçons et me rue vers le troisième immeuble. Je ne suis pas aussi prudente que d'habitude mais le temps me manque. Si je ne suis pas à mon poste dans les deux minutes, je peux dire adieu à ce fameux sésame.

A bout de souffle, je pousse la porte et découvre un couple en train de forniquer sur les lavabos abandonnés. De rage, je hurle en les faisant se rhabiller et sortir mais je sais que c'est peine perdue. Mon contact ne viendra jamais avec tout ce remue-ménage.

Je m'effondre donc au sol, dépitée et regarde le 3eme WC et sa porte grande ouverte.
Après tout, est-ce peut-être la fin que je mérite? Cette aventure a commencé sur de bonnes bases en voulant recadrer les harceleurs mais je pense m'être perdue en faisant de cela une excuse pour ne pas m'ouvrir aux autres. Je ne suis peut-être plus de taille à affronter tout ça et comprends qu'il est temps que je tire un trait sur cette partie de ma vie.

La porte s'ouvre et j'y découvre mes amies Irène, Wendy et Joy.

— Qu'est ce que tu fabriques par terre?

— Je médite, est la seule réponse sensée que je trouve à dire.

Toutes les trois m'entourent et me tapotent le dos ou les cuisses. Les savoir avec moi est très rassurant alors que j'ignore ce qu'elles font dans ce coin si reculé.

— Je crois que t'as perdu ça, m'indique Joy en me tendant un papier.

Je fronce les sourcils en le récupérant et y découvre un code. Mon visage s'éclaircit sur mon amie qui hoche la tête en se dédouanant.

— Ne t'emballe pas, je n'étais pas seule dans l'histoire.

Elles se sourient, complices puis m'accordent un regard plein de tendresse. Irène décide de prendre la parole.

— On a rapidement compris qui avait lancé les premiers messages de revendications de NoeasyGirl puisqu'on était chacune près de toi dans ces moments là mais on voulait attendre que tu nous en parles de toi même. Cependant, tu ne l'as jamais fait. Ça nous a touché mais on s'est dit que vu ce que tu faisais pour tous ceux qui en avaient besoin, il fallait qu'on t'aide. On s'est organisées comme des pros. Wendy se chargeait de détourner l'attention du proviseur en inventant différents problèmes lorsque tu avais besoin d'un code tandis que je me faufilais dans son bureau. Joy était celle qui devait te transmettre le mot de passe en toute discrétion.

— Un vrai travail d'équipe! Mais rassure-toi, l'argent qu'on te demandait n'était qu'une couverture. On l'a mis de côté pour te le rendre quand tu trouverais le courage de nous en parler. Comme une petite punition avant la récompense.

Je soupire devant tant de gentillesse masquée. Moi qui a douté tant de fois dans ma vie, je ne me rendais pas compte que trois anges gardiens veillaient sur mes bêtises.
Cependant Wendy me surprend à me claquer la cuisse.

— Par contre le coup de l'enseignante, ça ne te ressemble pas. 

— Je sais... Mais... Il n'y a rien à craindre. Puisque tout le monde cherche un coupable alors qu'il s'agit d'une coupable.

Les filles se figent de surprise puis Irène plaque sa main sur ma bouche.

— Ne dis plus rien, cette histoire doit passer à la trappe. Je pense qu'il faut qu'on se concentre sur l'attitude bizarre des garçons en ce moment. On est les quatre NoeasyGirl, des justicières pour ceux qui en ont besoin.

— Vous avez raison. Et je crois que nous avons une dernière mission avant de raccrocher le micro. Les filles... Il est temps que je vous parle d'une fameuse liste.