43- Opération destruction

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Hyunjin

Ne supportant pas de voir mes nouveaux amis me tourner le dos sans prendre la peine de démêler le vrai du faux, j'ai décidé de m'accorder un après-midi de détente. Je sais pertinemment que ma mère sera tenue au courant de mes cours manqués et qu'elle me demandera des comptes ce soir mais j'ai besoin de me changer les idées et de voir celle qui ne m'a jamais fait défaut.

Pour éviter les paparazzi, nous avons notre code. Je rentre sous les flash dans un cinéma. Comme prévu, j'attrape le sac que Lia me tend tout innocemment et me dirige vers les toilettes tandis qu'elle s'en va. Une fois vêtu d'une tenue plus discrète, d'une casquette couvrant mes cheveux et d'un masque, j'emprunte une autre sortie et la retrouve pour un départ en toute discrétion.
Nous optons pour un centre de destruction. Le principe est de payer une entrée pour une somme raisonnable et d'avoir le droit de tout casser. Il y a tellement de bruit qu'aucun micro n'y traine, ni même des caméras vu le peu d'intérêt.

— Raconte-moi tout, Jinnie, me dit Lia. La dernière fois qu'on s'est parlé, tu semblais être heureux avec ton coup de foudre et là, t'es à six pieds sous terre.

— C'était pas le coup de foudre...

— Oh que si. Je te connais et vu comme t'étais accro, elle avait une tête d'héroïne que t'avais envie de t'injecter.

Ma meilleure amie m'agace à lire en moi comme dans un livre ouvert mais en même temps si je l'ai contacté, c'est bien pour entendre mes quatre vérités.
Je me saisis de la batte et commence à défoncer la vieille télévision cathodique devant moi. C'est tellement jouissif de faire un acte interdit au quotidien. Il faut toujours prendre soin de ses affaires, préserver la planète, transmettre aux générations futures. Mais quand la possibilité vient d'exprimer son côté sombre, c'est comme une bouffée d'air frais.

— Elle en a embrassé un autre...

— QUOI?! La connasse!

Lia s'en prend à la caisse dont les morceaux s'éparpillent dans la seconde. Je suis gêné à l'idée qu'elle ait imaginé Meena à la place.

— Mais c'était en quelques sortes ma faute. Enfin techniquement pas vraiment mais...

— Accouche.

— Y a un jeu débile dans ce lycée de merde. Apparemment, certains font des paris où ils doivent engranger un maximum de points en embrassant ou en couchant avec des filles précises.

— Laisse-moi deviner, on ne parle pas des meufs qui se la pètent...

— En effet...

A mesure que j'avance dans mon histoire, le mobilier devient aussi plat qu'un tapis. Il ne faut pas croire mais sous son air fragile, Lia a de sacrés biscoteaux.

— Je ne savais pas que son nom était dessus et elle a pensé qu'à chaque fois qu'on avait fait les préliminaires, ben...

Lia rage de plus belle que ma voisine ait pu penser cela de moi et détruit la jolie chaise de jardin. Puis se fige en me pointant sa batte.

— Attend, tu ne te doutais pas de tout ça?

— Ben non, j'suis pas dans leur délire. Je reste en dehors de leurs trucs immatures.

— Tu ne te mêles jamais aux autres et là, tu vois que ça se retourne contre toi car t'aurais pu agir à temps.

— Tu plaisantes?! Ils sont tarés là-bas. Tu sais qu'ils ont une espèce de nana qui pirate le chat et la radio du lycée et qui fait des révélations comme un putain de journal Gossip. Même Meena, je l'ai trouvé accrochée à son ordi avec un casque.

— Hein?

Je reprends mon manche et décide de m'attaquer au joli nounours dont il manque un oeil. Lia ne le touchera pas comme à chaque fois. Le côté rembourré l'arrête alors qu'elle préfère entre le craquèlement du mobilier.

— Les jeunes de ton lycée, ils communiquent comment sur ce chat?

— Ben sur leur téléphone. Pourquoi ?

— Hyunjin... Ça t'arrive parfois de réfléchir autrement qu'avec ta bite?

Je manque de lui répondre non comme un grand débile puis lui envoie un regard de nounours défiguré mais elle se saisit de mon portable et se pose sur la table qui tient encore debout.

— Lance-moi votre chat. Je veux savoir ce qu'elle raconte votre animatrice Gossip.

Je me débrouille comme un manche pour parvenir à entrer mes codes dans une application que je n'ai jamais utilisé depuis que je suis arrivé dans ce lycée. Lia s'en rend compte et souffle de lassitude. Cette fille est tout terrain alors que je panique lorsque j'évolue dans un milieu que je ne connais pas et ne contrôle pas. Pourtant, tout me pousse à aller vers la K-pop, c'est le comble.

Je découvre alors les messages de la fameuse NoeasyGirl, facilement identifiable puisqu'en rose comme un administrateur. Le nombre d'insultes et de remarques misogynes qu'elle se prend est insupportable. Je me rends compte qu'elle ne ressemble en rien à la paparazzi 2.0 que je me faisais en entendant parler de cette histoire de baise avec un professeur.
A chaque fois qu'elle fait une annonce, elle dénonce des brimades et se prend une vague de haine.

— Je pense que je veux la rencontrer.

— Comme beaucoup. J'ai entendu dire que certains mecs la recherchaient et pas pour de bonnes raisons.

— Alors va falloir que tu protèges ta copine.

— Hein? Quel est le rapport avec Meena?

Le sourire de ma meilleure amie est éclatant. Je sens que je me suis fait piéger.

— La première chose de rassurante est que tu reconnaisses que t'es encore accro à elle. Ensuite, ça ne te dirait pas de faire fonctionner ton cerveau? Une meuf qui dévoile des infos... Ta voisine que tu surprends avec un ordi et un micro...

Je me repasse la scène de cette découverte et réalise que j'ai été plus que stupide en n'associant pas les éléments que j'avais sous le nez.

— Putain, j'suis con...

— T'inquiète, ce n'est plus une grande surprise pour moi. Allons chez toi affronter ta mère avant de rendre une petite visite à ta chérie.

— Tu sais que la vieille va te pourrir la vie...

— T'en fais pas, elle m'a déjà appelée en panique en apprenant que tu n'étais pas en cours. Elle craignait que son trésor ne se soit fait enlever par la mafia... J'te jure. Elle a trop lu de lire de Dark romance. Donc j'lui ai dit que tu étais sous ma protection. Mais j'hésite encore à demander une rançon.

Lia, c'est la meilleure...
Ma mère aura eu plusieurs heures pour préparer son speech et son attaque. Je sens qu'on va déguster. Tout à coup, je ne suis plus pressé d'affronter la bête. Après tout, on peut très bien attendre le début de soirée et continuer à s'éclater.

Red LightsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant