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Les arrêts sur image ne se vivent pas que dans les films. Lorsque Lyam me trouve allongée dans cette baignoire, j'admire les traits de son visage qui passe de l'étonnement à l'amusement. Cependant, je ne me sens pas à mon aise pour oser adopter une attitude aussi détendue. Son corps positionné au-dessus du mien, en appui sur ce robinet, lui donne un effet magistral et envoûtant, qui rendrait presque ce moment attrayant. Je concentre mes idées pour lui fournir l'explication la plus logique à la justification de ma présence dans sa salle de bain. Ma bouche s'apprête à prononcer un mensonge enrobé de soie quand je surprends un sourire naissant au coin de ses lèvres et le grincement qui accompagne le pivotement de sa main. Un jet glacé s'abat alors sur moi, me saisissant jusque dans mes plus profondes terminaisons nerveuses. Un hurlement s'échappe de mes poumons pour gérer la panique et les tremblements qui m'animent. Mes mains s'agitent pour me sortir de ce guêpier et finissent par s'accrocher à ce cou qui me surplombe dans l'espoir d'éviter la cascade glacée qui continue de s'écouler. Ma prise dépasse la solidité de la sienne, si bien que Lyam termine dans le bain, pris dans son propre piège. 

— Lyam ? Lyam ? Tout va bien ? s'inquiète celle qui l'invectivait il y a quelques instants.

Mon ennemi aux mèches rouges se ressaisit en coupant enfin l'arrivée d'eau pour reprendre une voix naturelle et réplique malgré les frissons qui malmènent ses muscles en se redressant.

— Ouai, ça va. J'ai envie d'un bain glacé. Ca te dérange ? 
— Non, mais je...
— Ben fous-moi la paix et sors de ma chambre. 

Les pas s'éloignent de nous dans un tumulte d'injures qui me prouvent que les chiens ne font pas des chats. Ce silence brutal me ramène à la réalité dans laquelle mes vêtements de sport noirs sont trempés et l'individu qui me fait face l'est tout autant en boxer. Les pectoraux contractés par le changement de température, j'admire son torse qui enchaine les respirations rapides et me demande si je ne vis pas un rêve.

— Jung... Meena.

Plaît-il ?
Afin de me retrouver sur un pied d'égalité, je quitte cette immense bassine luxueuse pour inonder le tapis et le parterre aux alentours. Le bruit des vêtements froissés et mes cheveux collant à ma peau ne me mettent pas en valeur pour cet affrontement de regards. Pourtant, Lyam me déstabilise lorsqu'il se délecte de cette vision en remontant son inspection de mes cuisses galbées à mes seins qui pointent sous cette brassière camouflant très peu mes formes. Le t-shirt en lycra, quant à lui, décide de m'offrir une seconde peau, un peu trop révélatrice. Pour retrouver un semblant de grandeur, je m'affirme à lui comme n'étant pas une seule seconde ébranlée. 

— Ca va ? Je ne te gêne pas ?
— J'admire la vue qui s'offre à moi.

La référence bien placée me vole un sourire avant que je ne lui désigne les serviettes pliées à ses côtés. 

— Passe-m'en une avant que je ne fasse des flaques de partout. 
— Je te trouve parfaite telle que tu es. Un petit chaton trempé. 
— Plus pour très longtemps, ajouté-je en arrachant le coton de ses mains pour tamponner ma peau.

Je me détache du besoin d'intimité pour me dévêtir, me remémorant notre proximité dans le bassin du SPA et retire mon t-shirt en cachant très mal mon air dégoûté. Il est bien une sensation qui m'insupporte et c'est celle-ci. Mon legging se montre, quant à lui, récalcitrant et refuse de me quitter, m'obligeant à m'installer, les fesses sur la baignoire et à tendre mon pied à mon admirateur affirmé. 

— Tire. 
— Tu économises ta politesse ? 
— Fais pas genre. Je t'ai entendu il y a quelques secondes. 

Le premier pan de tissu le fait chuter sur le derrière, réveillant un fou rire en moi que je contiens pour espérer qu'il m'aide avec la deuxième jambe. 

— Si je peux me permettre, ce n'était pas très sympa d'activer l'eau. 
— Tu n'as eu que ce que tu méritais, petite fouine. J'aurais payé cher pour voir ma mère piquer une crise en tombant sur toi, en pensant à une fan déséquilibrée. 
— Je ne ressemble pas du tout à tes groupies. Je fais plutôt partie de tes haters. Lyam Rixon est une grosse bouse frigide ! milité-je le poing levé. 

Amusé par mon cirque, mon hôte et victime déverrouille la porte en prenant soin de vérifier que sa mère n'est pas dans les parages et se rue vers celle à l'entrée de la chambre pour tourner le loquet. Ainsi, je ne risque plus de provoquer un scandale ainsi qu'un appel à la police. Frissonnant sur la pointe des pieds, je patiente le temps que Lyam réagisse à mes signaux en me fournissant de quoi me couvrir. 

— Enlève ta culotte et ce truc difforme. Tu vas prendre froid. 
— C'est sûr qu'en étant nue, je ne risque rien. Bien tenté, mais non. 
— Comme tu le veux. J'avais pourtant un caleçon qui aurait pu t'aller. Et un grand t-shirt...

Pour appuyer ses mots, le mannequin à la silhouette de rêve retire ce qui lui couvrait les parties intimes et ne prend pas la peine de cacher son membre pendant d'une taille conséquente malgré le froid de l'eau. Honteuse de rester captivée par ce spectacle, je rougis sans toutefois détourner le regard. Ce type est sublime et il le sait, voilà pourquoi il ne se prive pas de cet effeuillage prétentieux. Je ne peux rester prostrée sans rien faire et le laisser gagner ce duel d'acceptation. Gonflée par la fierté de ne pas me sentir inférieure à lui, je commence par retirer ma culotte avant de croiser une jambe devant l'autre pour limiter la vue sur mon intimité, puis j'enlève la brassière en plaquant un bras sur ma poitrine pour me protéger. De l'autre, je claque des doigts et tends la main, d'un air impatient. 

— Dépêche-toi, j'ai froid. 

Les pupilles pétillant de désir, je le laisse se mordre les lèvres et me faire croire que je suis convoitable par un jeune homme qui a dû croiser tant de filles aux mensurations parfaites dans sa courte mais incroyable carrière, et me laisse imaginer être importante ou du moins différente à ses yeux. J'admire les muscles de ses fesses et son dos développé tandis qu'il se retourne pour récupérer le sous-vêtement en question puis attends qu'il m'approche. Or, Lyam reste immobile. 

— Qu'est-ce que tu fais ? 
— Je t'attends. Viens le chercher si tu en as vraiment besoin. 

Bouger signifierait me dévoiler, or jouer les statues grecques n'est en rien comparable avec le fait de défiler devant le jeune homme le plus sexy qu'il m'ait été donné de côtoyer. Malheureusement, mon égo prend le dessus sur la raison et n'écoute en rien les signaux d'alerte de ce piège qui m'est tendu. Marchant sur la pointe des pieds, je déambule pour son plus grand plaisir et tente d'attraper le caleçon une fois devant lui. Cependant, son bras s'étend sur le côté pour me rendre la tâche difficile. 

— On dirait que tu l'as manqué. Ressaie encore. 

La deuxième fois n'est pas la bonne puisque je suis peu dégourdie avec un bras et mes cuisses qui se frottent, en me faisant légèrement dandiner, pour ne pas lui donner l'opportunité de se rincer l'œil trop longtemps. Lyam s'amuse à plusieurs reprises à déplacer le tissu à une vitesse qui me laisse à chaque fois perdante dans ce petit jeu, jusqu'à qu'il place sa main de l'autre côté de sa hanche. Pensant le surprendre en anticipant ce geste, je me jette sur la prise et déchante en réalisant ce que je tiens dans la main. Et ceci n'a rien de flasque et de couvrant. 
Un grand moment de solitude s'installe entre nous. Nos regards partagent mon incrédulité et l'envie de disparaitre sous terre pendant des secondes qui me paraissent interminables. 

Red LightsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant