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Lyam

Les grandes résolutions ne fonctionnent que si le mental est prêt à les suivre. En posant les pieds à l'académie ce matin, j'ai senti ma force me quitter. Tirer un trait sur Meena est plus facile à dire qu'à faire. J'ignore comment m'y prendre pour ne pas la dévorer du regard et accepter sa liaison avec Carter.
Choisissant l'option la plus simple dans un cas comme comme celui-ci, je m'octroie le droit de manquer les cours en ce début de semaine, circulant avec ma voiture jusqu'à m'arrêter devant un centre de destruction. Il s'agit d'une activité qui a le vent en poupe et permet de se défouler sur bon nombre d'objets, pour le bien des nerfs malmenés.
La structure est quasiment vide, et ce n'est pas l'inattention du caissier qui me dérange. La dernière chose que je voudrais est qu'une horde de paparazzi m'attende à la sortie pour tenter d'expliquer mon besoin de défoulement.

Je décide de payer pour les deux heures qui suivent et patiente au milieu de la pièce encore intacte, le temps que mon invité de dernière minute me rejoigne.

— Et ben, c'était pas facile à trouver, ta merde, s'exclame celui qui se pavane comme un roi en sa demeure et nous enferme dans la salle. 

Mason retire sa veste et la balance sur la caméra de sécurité, afin que ce qui s'y passe ne soit pas filmé. Puis il récupère la batte dans ma main et commence à mimer des coups dans le vide.

— Raconte-moi tout, Rixon. Qu'est-ce qui fait que tu viens chialer dans un entrepôt au lieu de danser ?
— J'avais pas la force de la voir.
— Pourtant, t'as loupé la scène du siècle. Carter a eu son moment de gloire.
— Me parle pas de ce type.

Je récupère mon bien pour commencer à fracasser une vieille télévision cathodique, et découvre le bonheur de se défouler sans retenue. Prendre soin de ce qui nous appartient, préserver la planète, transmettre aux générations futures un monde sain, oblige à se canaliser. Alors, quand se présente la possibilité d'exprimer son côté sombre, c'est comme une bouffée d'air frais.

— Elle nous a trompés, lui dis-je à bout de souffle.
— Effectivement. Je ne m'attendais pas à ça. Mais elle s'est expliquée et je comprends ses motivations.
— Tu plaisantes, j'espère.
— Je ne vois pas pourquoi. Elle a été honnête avec moi, ce que j'ai apprécié.
— Elle t'en a parlé ?

Ma surprise ne s'accorde pas avec sa nonchalance. Je ne vois pas comment il peut accepter qu'un autre la touche sans ressentir le besoin de tout fracasser. Puis sa propre incartade me revient en tête, me faisant réaliser que je suis le seul à rester droit dans mes bottes.

— J'espère que t'en as bien profité, hier soir, de ton côté ?
— C'était... pas déplaisant, mais rien de bien transcendant. Il me tarde surtout d'être à ce soir.
— Car tu recommences ? C'est une blague ?

Je tiens cet objet massif entre les mains et cherche ma nouvelle destination d'acharnement. Un ordinateur trône sur une table alors que Mason apparaît comme une possibilité sur ma liste.

— N'essaie même pas ou je te couche au sol. Ça sera moins agréable qu'à Anza-Borrego.

Je dévie de ma cible pour toucher finalement l'écran qui se fissure, pour ma plus grande satisfaction. Les gants que je porte m'empêchent de me blesser et d'être inapte au prochain shooting qui m'attend, ce qui déplairait à ma mère. La réalisation d'un futur dans lequel je serai libre est si présent dans les convictions, pourtant tellement loin de la réalité, que je trouve une raison supplémentaire pour me vider de cette énergie.

— Pourquoi est-ce que tu boudes, Rixon ? Parle-moi. Y a Meena, mais j'ai l'impression que quelque chose d'autre te tracasse.
— T'as déjà été prisonnier d'une putain de sadique, qui est aussi bien ton manager que ta mère ?
— Nope. Et ça ne donne pas envie.

Red LightsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant