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Je suis consciente d'être à l'origine d'un mélange d'effervescence et d'indignation. Les convocations s'enchaînent dans le bureau du directeur de l'académie jusqu'à ce que la principale concernée, Winter, en sorte dans une colère noire. À travers son air furieux, je continue de me persuader que j'ai fait le bon choix. La rumeur de ma coucherie avec Mason n'étant pas assez croustillante aux yeux des lycéens, ceux-ci se jettent à corps perdu sur le privilège qu'aurait eu la jolie blonde dans le choix de la maison pour le weekend de cohésion au détriment des autres. Certains l'accusent d'actes dépravés sur la moquette d'un bureau, racontant qu'elle est souvent aperçue en discussion avec le directeur ou dans des galas où leur présence commune relève plus de la coïncidence. Même si son corps appelle à la vengeance, je ne suis pas la seule à remarquer que la sanction reçue est une simple mise en garde pour le trouble créé dans l'établissement. J'ignore comment elle a pu réussir ce tour de passe-passe, mais je ne cherche pas à exiger une justice que je me chargerai d'appliquer.

Malheureusement pour mon calme personnel, arrive le moment de présenter les chorégraphies effectuées. Je constate que Lyam a autant envie que moi de réunir le groupe, alors qu'il est épargné de tout scandale dans cette affaire.

— Meena, faut qu'on parle, commence Mason.
— Non. On doit danser et rien d'autre.
— Je t'ai expliqué que je n'ai rien à voir avec tout ça. Je n'ai jamais envoyé ces messages, tu peux vérifier dans mon portable. Je ne vois pas pourquoi j'aurais parlé de nous, et foutu en l'air ce qu'on avait.
— Mason, assume tes conneries qu'on en finisse, soupire le mannequin.
— Toi, ta gueule, le planqué. Y a une merde qui tombe sur le groupe et tu ne nous connais plus dans la seconde.

Nos cris commencent à attirer l'attention des participants autour de nous, non loin de la scène sur laquelle va se dérouler la prestation. Pour l'occasion, l'équipe enseignante s'est réunie et se délecte des notes assassines qu'elle attribue aux nombreux procrastinateurs. Les rumeurs annoncent la présence de certains managers ou agences professionnelles, dont une assistante de mon père. L'envie de me surpasser commence à me convaincre de mettre de l'eau dans mon vin, le temps d'une danse, pour que nous puissions présenter le fruit d'un travail sérieux.

— On va se concentrer, faire comme si tout allait bien entre nous et récolter des putain de commentaires élogieux, tonné-je.

N'écoutant pas ma recommandation, Mason préfère approcher sa main de mon visage, dans l'intention de caresser ma joue. Mon pas de travers l'en empêche et déclenche les rires étouffés des curieux.

— Tu vois. Tu n'es pas capable de me laisser te toucher et tu espères qu'on va faire notre danse tranquillement ?
— Tu ne veux quand même pas que je te laisse me baiser derrière le rideau, juste pour appuyer ta théorie ? murmuré-je.
— Non, car je voudrais que tu le désires sincèrement.
— Alors, tu peux déjà commencer à pleurer car ça n'arrivera plus.

Agacé par notre discussion, Lyam s'excentre pour obtenir davantage d'intimité et de calme auditif. Là où il se réfugie, la visibilité est moindre et lui permet de retrouver une certaine sérénité. Je n'hésite donc pas une seconde à le suivre, quitte à envahir son espace pour en profiter également.

— Vous avez fini vos conneries ? me reproche-t-il.
— Parce que tu considères sa trahison comme une futilité ? Excuse-moi de malmener ton précieux temps, monsieur le lâcheur. Il était beau ton discours sur "tu m'appartiens". Je ne connais pas un mec sincère qui abandonnerait celle qui compte, à la première difficulté.
— Tu veux que je rajoute notre histoire dans ton scandale ? s'offusque-t-il. Qu'on soit trois à tomber te conviendrait ?
— Oh non, ne fais surtout pas cette erreur. N'abîme pas ton image, la mienne suffira. De toute façon, j'ai retrouvé ma liberté, monsieur le possessif en carton.

Red LightsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant