Kross : le peuple guerrier T1 🔞(terminé)

Chapitre 2

Figée dans une position inconfortable qu'elle ne pourrait plus tenir longtemps, Charlotte se mordit l'intérieure de la joue pour sortir de son délire, car l'ambiance était pesante, pire terrifiante, alors qu'elle ne voyait rien de ce qui se passait autour d'elle. L'air lui-même semblait être chargé de peur, de douleur et de chaos, sensations communicatives qui déferlaient par vagues dans son corps raidi.

Des bruits de pas et des hurlements approchaient de plus en plus de l'endroit où elle gisait, alors Charlotte ferma très fort les yeux :

« J'suis en train de faire un cauchemar, un mauvais trip... faut que j'me réveille, faut que j'me réveille. C'est bon, plus jamais de séance spiritisme et de champignons hallucinogènes » s'angoissa-t-elle.

Lorsqu'elle sentit qu'un poids, puis un autre lui étaient enlevés, Charlotte ressentit son cœur cogner dans sa cage thoracique et son sang battre ses tempes, « j'dois m'réveiller maintenant » paniqua-t-elle intérieurement, le corps et l'esprit toujours engourdis.

Une main se referma sur son bras et la fit rouler sur le dos violemment.

Charlotte cligna des yeux à cause de la vive lumière du soleil qui brillait dans le dos de la personne cauchemardesque qui l'avait touchée. Le regard terrifié de Charlotte croisa celui d'un gaillard massif. Il avait de longs cheveux sales, une affreuse cicatrice sur la joue gauche, une carrure impressionnante, et des vêtements médiévaux sous une cape en peau de bête.

Riyès avait été attiré par l'étrange botte coincée sous des cadavres. Intrigué, le guerrier s'approcha et poussa les deux morts, puis il fronça les sourcils surpris par sa vision : le mort -face contre terre- avait les cheveux foncés coupés à ras, un large collier en cuir avec des piques autour du cou, des vêtements noirs confectionnés dans une matière étrange et brillante et la semelle des bottes ressemblait à un plateau d'une paume et demie de haut et faite dans une matière noire et rigide. Rien à voir avec la tenue traditionnelle des Arouks, les soldats que Riyès et les siens avaient affrontés.

Curieux, le guerrier attrapa cet être étrange et le fit rouler sur le dos pour constater que ses traits étaient ceux d'un adolescent. Le garçon était en vie et avait l'air effrayé sous ses étranges peintures noires autour des yeux et sur les lèvres, et son arcade sourcilière était percée par un genre de petit clou à deux têtes pointues.

L'instinct du guerrier lui souffla qu'il devait le tuer, car la magie était à l'œuvre, alors mieux valait couper court à tout ça et tuer le mal dans l'œuf.

Riyès dégaina sa dague et arma son bras, prêt à frapper. Le garçon hurla de terreur et monta très haut dans les aigus, ce qui attira l'attention des guerriers Kross et de leur seigneur, Sinn.

Le visage fermé et maculé de sang, Sinn beugla à Riyès d'arrêter son geste. Le guerrier obéit à l'instant même et stoppa sa lame à un cheveu de la cage thoracique de l'étranger.

Le seigneur des Kross arriva rapidement tandis que Riyès et l'ennemi restaient figés dans leur position respective. Sinn fronça les sourcils et plissa brièvement le regard d'inquiétude en voyant l'allure curieuse du garçon, car cet accoutrement ne pouvait pas exister dans son monde... Sinn soupira en crispant les mâchoires et avala le peu de distance qu'il restait entre lui et Riyès.

— Qu'as-tu trouvé là ? s'esclaffa Sinn en affichant un sourire en coin, mais le regard perçant de haine.

— Un garçon étrange, répondit Riyès tout en gardant les yeux rivés sur l'étranger.

Sinn fixait le garçon qui restait pétrifié de stupeur. La scène aurait pu être risible car son visage affichait un mélange de peur et d'incompréhension, mais le Kross savait que cette présence n'appelait pas à la fête, ni aux réjouissances.

Pour le chef des Kross, il ne faisait aucun doute que la magie planait autour de lui.

— D'où viens-tu ? l'interrogea-t-il d'une voix ferme, avant de flanquer un coup de pied dans l'une de ces étranges bottes pour l'inciter à parler.

Le garçon écarquilla les yeux avant de les fermer très fort.

Charlotte restait allongée sur le dos et fixait les deux hommes terrifiants qui se tenaient devant elle en s'exprimant dans une langue étrangère.

Le deuxième gaillard était très grand, d'une carrure imposante, yeux bleus, cheveux rasés, portant une barbe qui lui mangeait le visage parsemé de traces de sang. Quand il sembla s'adresser à elle avant de lui flanquer un coup de pied, Charlotte n'en comprit pas un mot et trouva que son cauchemar devenait de plus en plus terrifiant. Alors, elle ferma les yeux, à en avoir mal, espérant pouvoir se réveiller dans son lit, dans son appartement, dans son monde.

Face à la réaction du garçon insolent de mutisme, Riyès lui plaça sa lame sur la gorge tout en grognant sa désapprobation et en retroussant les lèvres, telle une menace animale.

— Du calme, Riyès, gronda Sinn. Le garçon est effrayé, la peur le paralyse, ricana-t-il. Relève-le ! ordonna-t-il avant de tourner le dos.

— Tuons-le, objecta le guerrier. La magie l'entoure, ça se sent !

— Et si cet être étrange était un maléfice lancé sur nous et qu'en le tuant tu nous condamnais tous ! affirma Sinn en affichant un air menaçant.

Sans autre explication, Riyès obéit et saisit le garçon par un bras pour le relever sans ménagement. Le frêle jeune homme tenait à peine debout, le guerrier dut le maintenir à bout de bras pour l'aider à marcher et malgré la hauteur de ses étranges bottes, l'étranger était plus petit que la moyenne des adolescents Kross.

Ils marchèrent derrière Sinn en conservant une bonne distance. Le garçon osa lever les yeux pour observer les alentours.

Même si la peur semblait lui avoir collé des œillères, Charlotte put voir l'étendue du champ de bataille, jonché de cadavres d'hommes et de ce qui semblait être des animaux qu'elle était incapable d'identifier. Crise de panique oblige, la jeune femme s'agita et força pour libérer son bras de la poigne de l'homme qui la traînait presque, mais rien n'y fit.

La douleur de cet étau, l'odeur du sang et la puanteur des viscères répandus çà et là, tout lui criait qu'elle ne rêvait pas, qu'elle ne dormait pas. Charlotte perdit pied et sombra dans l'inconscience.