Charlotte ferma les yeux pour ne pas pleurer.
— Est-ce que vos sauvages ont fendu le crâne à Sori ? demanda-t-elle.
Sinn soupira et resserra sa prise :
— La maître queux va bien, répondit-il. Enfin, elle a eu de la chance qu'Ordan se soit interposé, il lui a sauvé la vie aux dépens de la sienne. Elle est restée coincée sous son corps pendant qu'une Ombre l'éventrait... mais elle va bien !
— Est-ce que je pourrai la voir ? espéra-t-elle la voix tremblante.
— Peut-être, ça dépendra de mon humeur, souffla-t-il.
Consciente d'être prise au piège Charlotte serra les mâchoires et ferma les yeux pour retenir ses larmes. Heureusement le silence s'imposa sous la tente, les laissant sombrer dans un sommeil : agité pour Charlotte et profond pour Sinn. Durant la nuit, il fut réveillé par un début d'érection, collé au corps chaud et à la peau douce de l'étrangère. Pour reprendre le contrôle sur ses bas instincts, Sinn dut s'en éloigner en grognant d'agacement.
Au petit matin, alors que la lueur du jour perçait à peine à travers l'épais plafond de toile, Sinn ressentit le besoin de se placer contre la jeune femme. La proximité de leurs corps collés en cuillères, lui permit d'entendre ce qu'elle marmonnait dans son sommeil :
« Vous avez vu ses dents... comment il fait pour se lécher... il doit se couper c'est sûr... »
Sinn réprima son envie de rire en comprenant qu'elle parlait du Aronx, puis il eut envie de frotter sa barbe contre son épaule et de lui mordiller la nuque, alors il quitta le lit.
L'agréable chaleur l'abandonna et la tira du sommeil, puis elle ouvrit les yeux en entendant Sinn se lever. Il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre que rien de tout ça n'était qu'un rêve et que rien n'avait changé dans sa situation actuelle.
Déterminée à ne pas laisser la dépression prendre le dessus, Charlotte s'assit dans le lit en se couvrant parce qu'elle avait froid.
Sinn lui jeta à peine un regard, notant que ses cheveux courts étaient en bataille et qu'elle avait les traits tirés par la fatigue.
— Dors encore un peu, lui ordonna Sinn en enfilant son pantalon.
— J'aimerais aller voir Sori, répondit-elle en se levant tout en gardant une couverture sur elle.
Charlotte essaya de se vêtir en restant cachée, mais la couverture glissait, dévoilant le tatouage qu'elle avait dans le dos.
Elle ressentit la proximité du chef des Kross, son souffle sur son épaule et ses doigts enfleurèrent sa colonne vertébrale, descendant et suivant le tronc de l'arbre pour s'arrêter sur l'une des fossettes qu'elle avait au-dessus des fesses.
— Que représente ce dessin ? lui demanda-t-il, à l'oreille.
— Un souvenir, répondit-elle, en s'efforçant de contrôler ses tremblements de peur.
— Explique-toi, lui demanda-t-il en caressant une des cicatrices que la jeune femme avait dans le dos.
— J'ai perdu mes parents et mon petit frère dans un accident de voiture, avoua-t-elle. J'avais huit ans... je me souviens de peu de choses... je... j'ai été éjectée de l'habitacle... je ne sais pas combien de temps j'ai perdu connaissance... le bruit du klaxon m'a sorti de ma torpeur... quand j'ai ouvert les yeux, il y avait un immense arbre...un séquoia... et j'ai assisté à l'envol d'une nuée d'oiseaux...
— Et les cicatrices ? demanda Sinn, qui lui tournait autour tel un rapace prêt à fondre sur sa proie.
— L'accident a été violent, je suis restée hospitalisée plusieurs mois, répondit-elle. Les médecins disaient que je ne retrouverais probablement pas l'usage de mes jambes, mais je leur ai prouvé le contraire...
Sinn lui fit face en croisant le bras sur le torse et il étudia son visage fermé.
— Les cicatrices ne te suffisaient pas, lui dit-il. Tu as inscrit un souvenir tragique sur ton corps...Et celui-là ? demanda-t-il en désignant les deux oiseaux qu'elle avait de tatoués au-dessus de son sein gauche.
— Après ma sortie d'hôpital, j'ai été une enfant difficile, soupira Charlotte. Mes grands-parents m'ont recueilli et je les ai usés avec mes bêtises... Ma grand-mère est décédée des suites d'une longue maladie l'année de mes quatorze ans, mon grand-père est mort le jour suivant, syndrome du cœur brisé. J'ai été placée en foyer d'accueil jusqu'à ma majorité... je me suis fait faire ces colibris en leur mémoire.
— Habille-toi, ordonna Sinn. Tu passeras la matinée avec moi et si tu te tiens bien, tu pourras peut-être rester avec Sori cet après-midi.
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Kross : le peuple guerrier T1 🔞(terminé)
Science-FictionCe n'est pas une histoire sur les Vikings !!! Une jeune femme se réveille au beau milieu d'un champ de bataille, sans savoir comment elle est arrivée là... L'incompréhension laissera-t-elle place au rêve ou à une réalité tout aussi improbable ? Sui...