Dante Lombardi reprend sa surveillance à distance. Il a retrouvé son calme et sirote un café sur une terrasse, avec une vue sur le groupe qui s'est installé sur un bout de sable encore disponible. Il remarque que Fassbender ne prend même pas la peine d'être aimable avec l'héritière de Luca. Il ne fait que discuter avec l'espagnole qui semble sous le charme.
Francesca se tient debout, immobile, au bord de l'eau. Les vagues lui lèchent les pieds, tandis que l'anglais et le français se chamaillent et tentent de se mettre à l'eau l'un l'autre.
L'anglaise effrontée est hors de vue. Hors de vue ?
— Vous êtes amoureux de Francesca, c'est ça, M. Lombardi ?
Dante se force à poser sa tasse lentement. Il respire profondément avant de se tourner vers son interlocutrice qui s'est assise près de lui sans autorisation. L'épaule d'Alice frôle celle du jeune homme sans qu'elle ne s'en rende compte. Elle regarde la silhouette éloignée de Francesca avec un air sérieux, tandis que lui doit se faire violence pour ne pas la dégager brutalement de sa place. Il secoue la tête et se reprend.
— Mlle de Luca ? Amoureux de Mlle de Luca ? Mais qu'est-ce que c'est que cette question ? Sérieusement ! Je ne suis pas l'un des étudiants que vous côtoyez !
— Vous êtes si sérieux ! Vous êtes à peine plus âgé que nous ! s'exclame Alice en riant. Bon, je suis rassurée, si votre cœur n'est pas pris par Francesca... Face à elle, je n'aurais eu aucune chance !
— Cessez de prendre vos rêves pour la réalité ! En plus, nous savons tous les deux de qui Francesca est amoureuse ! Sans compter que j'ai autre chose à penser qu'au flirt, et autre idiotie.
— Idiotie ? Vous pensez que l'amour est une idiotie ?
— L'amour est une perte de temps, dit-il froidement.
— Alors vous n'avez personne dans votre vie.
— Je n'ai pas dit ça.
— Oh ! Vous avez quelqu'un.
— Je n'ai pas dit ça non plus.
— Vous êtes bien mystérieux, M. Lombardi, dit Alice avec un sourire malicieux.
— Cessez de sourire aussi stupidement et rejoignez vos amis.
— Venez avec nous.
Mais pourquoi lui répond-il ? Mais pourquoi n'arrive-t-il pas à demeurer de marbre à côté de cette gamine. Non, ça n'est pas une gamine ! Elle joue de cette image que son physique lui octroie, mais elle a 23 ans. Elle n'est plus une gosse effrontée et naïve. Elle sait parfaitement ce qu'elle fait. Elle doit en assumer les conséquences. Il va la prendre à son propre jeu. Il va lui faire peur. La terroriser. Ça, il sait faire. Très bien même.
— C'est hors de question et hors de propos. Mais quelque chose m'échappe... Je suis étonné que Mlle de Luca ne vous ait pas mise en garde contre moi...
— Oh ! Elle l'a fait ! Plusieurs fois.
— Et vous, vous vous êtes mis en tête de me séduire.
— De vous séduire, non ! De vous conquérir.
— Me conquérir ?! La belle affaire ! Si vous voulez coucher avec moi, il n'est pas nécessaire de faire tant d'efforts. Il suffit de demander.
— Coucher avec vous ? Mais vous n'y êtes pas, M. Lombardi. Je veux bien plus.
Il se penche brusquement vers elle, mettant son visage à quelques centimètres du sien. L'une de ses mains s'est posée sur la cuisse de la jeune fille comme une griffe meurtrière. Il arbore un sourire carnassier.
— Plus ? Je vois. Vous ignorez à quel jeu vous jouez. Je ne suis pas un homme qui aime. Je suis un homme qui profite. Vous êtes sûre de vouloir plus ? Parce qu'à priori, si j'entre dans le jeu, votre jeu, vous n'aurez rien, et j'obtiendrai tout. Quand j'en aurai fini avec vous, vous ne sourirez plus. Sans compter que vous aurez mal.
Contrairement à ce qu'il escomptait, Alice ne s'écarte pas. Au contraire, elle approche encore plus son visage au point que si leurs lèvres ne se touchent pas, leurs souffles se mêlent. Le sien à lui, chargé de café. Le sien à elle, frais et mentholé. La jeune fille ne tremble pas face au tigre.
— Vous ne me faites pas peur, M. Lombardi. Je prends note de tout ce que vous venez de dire. J'y ajoute que vous êtes un rabat-joie et un désagréable. Mais, tout ça ne change rien, continue-t-elle en souriant de nouveau. La partie n'est pas finie.
La jeune fille ponctue sa répartie par un baiser bref. Un effleurement qui s'échappe avec elle, car elle s'enfuit aussitôt en riant.
Dante ne réagit pas immédiatement. Il reprend lentement ses esprits, tandis qu'il prend conscience que le jeu va être plus difficile qu'escompté. Il a besoin de boire quelque chose de plus fort qu'un café, parce qu'il faut qu'il trouve un moyen rapide de se débarrasser d'Alice Baggersmith avant qu'il ne soit trop tard. Avant qu'il ne se retrouve dans une situation totalement incontrôlable. Vittorio de Luca veut lui parler dès ce soir. Ça tombe très bien. Lui aussi a des choses à dire.
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L'obstination d'Alice Baggersmith
ChickLitIl n'y a qu'une Alice Baggersmith. Et c'est heureux ! Le monde ne se relèverait pas s'il y en avait deux. Son obstination est légendaire, comme sa bonne humeur et son langage de charretier. On l'aime ou on la déteste. Au choix. Mais l'indifférence n...