22/ Un secret pour Alice

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— Tu ne manges rien, Alice ? demande Paz en voyant que son amie n'a pris qu'une petite part de la frittata qu'elle a préparée.

— Rien ? Tout est relatif ! Elle a dévoré presque tous les sfogliatelle et a pris deux cornetti !

— Tu peux parler, toi ! Tu as trempouillé plein de biscotti dans ton café ! lance l'anglaise la bouche pleine. D'ailleurs, c'est quoi cette habitude ! C'est pas anglais ! Et ça fait pas italien...

— Français, dit tranquillement Pierre en leur souriant.

Il n'a pris qu'une tranche de panettone et un peu de frittata pour faire plaisir à Paz, parce que, sincèrement, il n'aime pas tous ces gâteaux pleins de crème et autre. Rien ne vaut un bon croissant au beurre. Point barre. Le snobisme se cache parfois dans les détails.

— J'ai dit ça parce que d'habitude, c'est le repas où Alice mange le plus... Ensuite, elle picore ! Alors si elle ne mange pas bien maintenant...

— Paz ! Tu es une vraie mère pour moi ! s'exclame l'anglaise en souriant.

— Et moi, un vrai père ! lance Sylvester en ôtant son assiette à son amie. Tu vas devenir obèse à force de manger toute cette crème ! C'est bien la peine de courir comme une folle !

— Bloody hell ! Sylvester rend-moi cette assiette immédiatement si tu ne veux pas mourir immediatly !

— Pierre ! J'ai besoin de ton aide ! crie Sylvester en plaçant l'assiette hors de portée des bras tendus d'Alice.

Le français se lève, prend l'assiette et jette son contenu dans la poubelle.

— Et si tu nous disais ce qui te tracasse ? demande-t-il ingénument devant les yeux stupéfaits d'Alice.

— By all the demons of hell ! Ce qui me tracasse ! Ce qui me tracasse ! C'est que tu viens de jeter de la nourriture parfaite ! Douchebag ! Si tu n'étais pas mon ami, j'aurais trouvé une vengeance à la mesure de ma colère ! J'avais encore faim ! Paz, plus de frittata, por favor ! lance Alice en se levant pour attraper une autre assiette, mais Pierre l'arrête en cherchant ses yeux.

— Alice ?

— Pierre ? tente-t-elle pour éviter le sujet qui lui brûle pourtant les lèvres.

— Tu sais que nous allons parvenir à te faire parler...

— Il ne faut pas ! Il ne faut pas ! J'ai promis !

Cette dernière exclamation a arrêté ses trois amis. Ils la fixent, intrigués. Les secrets ne sont jamais compatibles avec Alice Baggersmith. Elle dit toujours ce qu'elle pense et ne cache jamais rien. Inutile de lui confier la moindre chose. Qui a pu faire une chose pareille ? À moins que ça n'ait été volontaire pour que tout le monde sache...

— Ok, Alice. Ne dis rien. Mais crois-moi, Francesca va entendre parler du pays ! Parce que c'est sûr que c'est elle ou ton Apollon des enfers ! De toute façon, lui, il est coupable ! Quel que soit la faute ! s'exclame Sylvester en tapant du poing sur la table.


Francesca arrive quelques minutes plus tard devant la maison des étudiants étrangers. Elle est accompagnée de Hans. Ils semblent toujours aussi peu s'apprécier l'un l'autre, mais manifestement une trêve a été établie. Si Francesca a bien compris tout ce que son grand-père a dit, la guerre n'est plus de mise.

— Je t'envoie Paz ?

— Oui. S'il te plaît. J'ai prévu de passer la journée avec elle.

— Tu ne comptes pas... Tu ne comptes pas aller trop loin avec elle ?

Hans sourit, le regard fixé sur la maison.

— Ça n'est pas moi qui mène la danse, Mlle de Luca.

Francesca va ouvrir le portillon qui ferme le jardinet quand un bras surgit et agit à sa place. Dante Lombardi lui ouvre sans rien dire et se remet ensuite en retrait. Elle soupire. Même si le rapport de force n'est plus le même, puisqu'il est maintenant à son service et sous ses ordres, elle ne peut s'empêcher de penser que l'avenir va être semé d'embûches. C'est aussi pour cette raison qu'elle est venue. Pour qu'il y ait moins d'obstacles et qu'elle se sente moins seule.


L'obstination d'Alice BaggersmithOù les histoires vivent. Découvrez maintenant