Chapitre 2 : Corset, coton, pinups et magazine

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Ma transformation date d'une dizaine d'années alors que je passai les vacances en Belgique chez mon grand-père avec mon frère Georges.

À l'époque, comme beaucoup d'ados, j'étais mal dans ma peau et pas vraiment aidée par ma mère qui ne m'achetait que des vêtements amples.

Le jour qui suivit notre arrivée, à l'heure du déjeuner, Papy me demanda :

— Qu'est-ce que tu manges ma petite ?

— Des légumes vapeurs.

— Ça n'a pas l'air bon... Tu aimes ça ?

Pour toutes réponses je hochai les épaules.

— Tu veux une fricadelle ? me demanda-t-il gentiment.

— Je ne peux pas Papy. Maman dit que c'est plein de gras et que ça va directement dans les fesses, récitai-je.

— Tu sais Charline, une femme ça doit avoir des formes, affirma Papy Clotaire en remuant sa moustache, ta grand-mère était la plus belle femme que je n'ai jamais vue ! Elle ne ressemblait pas à ces cintres que l'on voit sur les pubs des abris bus.

— Maman a déjà eu sa photo sur un abri bus... C'est un cintre elle aussi ? demanda Georges.

— Ta mère est malade, répondit Papy d'un ton tranchant, j'ai lu sa dernière interview où elle dit qu'elle est Suisse !

— Elle a dit que la journaliste avait mal compris...

— Mouais, mouais... En attendant, je voulais te demander Charline : c'est quoi ces vêtements ?

— Quoi qu'est-ce qu'ils ont mes vêtements ?

— On dirait que tu as tué une grosse bête multicolore et que tu lui as piqué sa peau !

— C'est les couleurs à la mode Papy !

— Mouais, c'est vrai que vous n'êtes pas aidés les jeunes en ce moment... Mais la peau de cette bête est toute flasque sur toi !

— C'est pourtant ma taille... C'est Maman qui...

— Arf ! Viens avec moi !

Sans autre cérémonie il se leva et se dirigea dans sa chambre. Du coin de l'œil, je vis Georges nous suivre après avoir piqué le dernier bout de fricadelle dans l'assiette de Papy.

Papy laissa la porte ouverte et fit le tour du lit. Habituellement non autorisés dans cette zone, nous restâmes timidement sur le pas de la porte.

Papy Clotaire pouvait être très fun mais il y avait quelques règles à suivre et il était très sévère là-dessus.

Sa chambre était étrangement moderne pour un Papy : lit récent, drap uni bleu ciel, un placard encastré, paquet et mur blanc.

Il sortit un bon gros vieil album photo de sa table de chevet et nous fit signe de nous asseoir sur le lit.

En silence, nous posâmes nos fessiers tout au bout du lit dans un silence religieux. Le grand corps musclé par des années de travail physique de Papy faisait pencher le matelas de son côté.

— Regardez votre grand-mère si elle n'était pas belle !?

Elle était morte quelques années après la naissance de Georges et Papy Clotaire n'était pas du genre à mettre des photos partout dans la maison : ça fait trop de trucs à nettoyer avait-il affirmé une fois. Moi j'ai toujours pensé que ça le rendait triste de voir des photos de personnes qui ne sont plus là.

Les aventures Cocasses de CharlineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant