Éclairée ( Eve )

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21 juin 1944, Saint Nazaire de Ladarez, Hérault, Languedoc-Roussillon, France.

Marinus Strauss-Kahn a réussi quand je commençais à perdre espoir à pouvoir à nouveau vivre normalement au village. Il a ordonné aux troupes de mon père de s'en aller, je ne sais pas comment il a fait mais cela n'importe peu. Je ne supportais plus de le voir tous les jours en allant chercher le pain, en passant sur la place, en fermant les volets... Jean était partout, il hantait mes nuits. Je le revoyais chaque nuit, le visage au dessus de mien, sa violence sur moi. Ce n'était pas mon père, ce n'est plus mon père et il le sera plus jamais.
J'ai déjà du mal à me faire à l'idée, à cette idée insalubre que Jean fait partie des leur. Cette idée me paraît encore trop irréelle, elle me ronge de l'intérieur, me dire que celui dont je partage la moitié de mes gènes est un traitre... Suis-je comme lui ? Ai-je l'âme d'une traîtresse ? comment a-t-il pu retourner sa veste ainsi ? Ou alors a-t-il toujours été ainsi ? Comment... Ma mère et mes sœurs, où sont-elles maintenant ? Les pauvres elles doivent être mortes de peur toutes seules je ne sais où...

Peut-être que mes chaleureuses retrouvailles avec mon géniteur vont m'apporter certaines informations utiles. Quand il s'est acharné sur moi, je ne sais même pas pourquoi, Jean a laissé tomber de sa sacoche un gros dossier dont il a probablement oublié l'existence. Alors je l'ai gardé fermé pendant tout ce temps,.pendant des mois je ne savais pas quoi faire alors je n'ai rien fait. Mais aujourd'hui je veux l'ouvrir, je veux vraiment être capable de témoigner avec ce dossier après la guerre. Je suis sûre que ce tas de papiers renferment des informations sur les grands secrets du régime nazi.
Je ne sais pas pourquoi je n'ai jamais osé ouvrir ce stupide dossier, peut-être avais-je peur de ce que je pourrai y découvrir. Découvrir ce à quoi participait et tolérait Hans avant qu'il n'ait son éveil de conscience. Découvrir le sort auxquels sont réservés les gens partis dans les fourgons... Aujourd'hui je ne veux plus de ça, je sais que la Waffen SS, la Schutzstaffel, la Wehrmacht et j'en passe... Toutes ces organisations allemandes sont liées au crime, et le crime peu importe comment il est fait, c'est quelque chose d'affreux et inhumain.

J'ai saisi le paquet pour aller le lire, je suis allée me poser sur le lit dans la chambre d'Hans. Inconsciemment, je me suis sentie beaucoup plus en sécurité dans la sienne que dans la mienne. C'est comme si son aura rassurante était encore dans la pièce. J'ai ouvert le dossier et manqué de m'évanouir face à ce monticule de papiers écrit en français et toujours accompagné de la version en allemand.
J'ai commencé à lire le premier document qui m'est tombé sous les doigts.
C'est un rapport fait par mon père, rédigé en français, envoyé directement à Pierre Laval, qui sera traduit en allemand et envoyé au Reichsfürher SS.

Monsieur Pierre Laval.

Mon équipe et moi sommes arrivés au canton de Saint Nazaire de Ladarez le 30 janvier 1944 à 16h09, ayant comme témoins le Capitaine Jäger et ses troupes ainsi que les soldats de l'Oberstgruppenfürher Marinus Strauss-Kahn.
Nous y sommes restés durant quatre mois et demi pour essayer d'obtenir le maximum d'observation qui pourront me permettre de capturer le traître, l'Oberfürher Hans Leyers.
Pendant mon expédition dans mon village d'origine, j'ai également assisté à la mort d'une vieille dame nommée Anne Dubois. C'était une Résistante à sa façon, elle distribuait des tracts aux jeunes français collaborant avec le Grand Reich Allemand. J'en ai ordonné son exécution lente à la sortie de son bar de la main de mes soldats. J'ai jugé qu'il valait mieux une Résistante en moins surtout avec les temps qui courent.

Revenons au sujet principal, Hans Leyers. Je suis allé voir Fräulein Eve Dechambord, la française avec qui il couchait depuis tout ce temps. J'ai essayé de lui soutirer des informations mais rien n'y a fait. Elle ne cédera pas, alors je suis allé voir Emmrich Jäger qui a tout de suite su me fournir les informations nécessaires. Il m'a donné quelques feuilles écrites par Leyers, enfermées dans son bureau à la Kommandantur sur la place principale du village. Celles-ci disaient qu'il partait en compagnie de l'Oberstgruppenfürher SS Marinus Strauss-Kahn, fuyant désespérément dans un autre petit canton espagnol dénommé Frías. Je ne pensais pas que ma mission prendrait un tel tournant. Le grand général plénipotentiaire du Reich, celui à qui nous nous référons tous est en réalité un traître lui aussi, il pactise avec ces vauriens qui ne veulent pas s'unir à l'empire hitlérien. Donc j'attends de vous que vous me disiez au plus tôt ce que je dois faire de Herrn Strauss-Kahn, en attendant je vais accomplir ma mission principale. Je vais aller à Frías avec mes hommes, trouver l'Oberfürher Hans Leyers, le capturer et l'offrir en cadeau d'expérimentation scientifique au docteur Mengele ou bien aux pulsions du Fürher. Nous y serons d'ici quelques jours.
La chasse aux traîtres sera bientôt terminée.

Programmés pour tuerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant