Programmés pour tuer

Nouvelle Résolution ( Eve )

1er janvier 1937, Saint Nazaire de Ladarez, Hérault, Languedoc-Roussillon, France.

J'étais tranquillement en train de marcher seule sur la grande route enneigée menant jusqu'au village. Je promène mon chien, un golden retriever. La neige tombe à foison cette année.
J'habite un minuscule village dans le Sud de la France, Saint Nazaire de Ladarez. Nous sommes très peu nombreux, et qui dit très peu nombreux dit que on se connaît tous les un les autres. Ces dizaines de maisons sont installées au milieu d'une cuvette entourée de montagnes, c'est magnifique et paisible ; surtout en de saisons aussi belles.

《 Daisy !!! Au pied. ai-je ordonné, commençant à grelotter sous les flocons. 》

Ma chienne que je m'occupe depuis que j'ai 5 ans obtempère facilement.

J'ai marché dans la "Rue de Béziers", acostant la route principal puis fait une pause sur la place de l'église. Il n'y a personne. Les gens ne se confrontent qu'aux facilités de la vie, dès qu'il fait un peu trop froid ; ils hibernent.
Je suis passée à côté de l'appartement des Dubois, une riche famille à son paroxysme grâce aux bûcherons. Je connais le fils benjamin de la famille, Maxence Dubois, il a 6 ans de plus que moi. Il m'a souvent gardé quand j'étais enfant. Je suis toujours une enfant, je suis même une gamine de 13 ans mais bon...
Leur appartement est relativement petit avec une grande baie vitrée donnant sur une terrasse qui pourrait servir de bar.

J'ai commencé à courir avec ma chienne sur la montée jusqu'à chez moi.

《 Allez ma fifille c'est bien ça !!! 》

À bout de souffle, les poumons purifiés par le froid, on est arrivées devant le premier étage d'escalier jusqu'à chez moi. Je suis montée avec l'allure d'une vieille femme et rentrée.

《 Eve ! gronde ma mère Hélène. Cela doit faire 30 minutes que tu dois être rentrée !
- Désolée Maman, Papa n'est pas là ?
- Il est parti couper du bois. Rose, Marie et Liliane l'ont accompagné. Moi aussi je vais aller acheter quelques sachets de blés à l'épicerie, celle qu'il y a à côté de la boulangerie.
- D'accord, je m'occuperai bien de Papi. Passe le bonjour à Madame Moutou de ma part ! 》

Madame Louise Moutou est la patronne de l'épicerie, elle m'offrait toujours gratuitement une baguette de pain quand j'étais petite.

Ma mère m'embrasse tendrement sur le front, avant de prendre son manteau et de sortir.

Rose, Marie et Liliane Dechambord sont les triplettes de la famille, mes petites sœurs. Elles ont eu 11 ans il y a peu. Ce sont des filles adorables, qui me soutiennent toujours face aux crises de nerfs de Papa, Jean Dechambord.

Une fois que je me suis retrouvée seule à la maison, je suis montée à l'étage pour voir mon grand-père Léon. Il est né en 1871, pendant la guerre franco prussienne. Donc sa haine à l'égard des allemands est inépuisable. Papi m'a toujours appris à me méfier des Boches, ils paraissent gentils et serviables... mais quand tu as le dos tourné, ils te tueront.

《 Eve ma puce, viens voir Papi. 》

J'ai marché jusqu'à sa chambre, il s'est fait amputé des deux jambes en 1919 alors il vit avec nous, dans une pièce adaptée.

《 Tu vas bien Papi ?
- Oui, ça va. Mais toi alors ?
- Quoi moi ?
- As-tu fait tes nouvelles résolutions pour cette année ? Car regarde, ce fumier d'Hitler et ses hordes nazies se croient invincibles, il faut que la France soit prête.
- Papi... ai-je soupiré en m'asseyant à côté de lui.
- Eve Dechambord, reprend-il. C'est très important, c'est ta génération à toi qui pourra démolir à nouveau l'Allemagne. Ce sont des êtres perfides, manipulateurs et cruels !
- Papi, arrêtons de parler des allemands. Ils ne sont pas là, ils viendront jamais vers la France. Qu'as-tu fait de beau aujourd'hui ?
- Ma petite, rigole-t-il, je n'ai plus de jambe et suis cloué sur le lit toute la journée ! Que veux-tu que je fasse ?
- Veux-tu jouer aux cartes avec moi Papi ?
- Tu es bien gentille Eve, quel jeu veux-tu faire ?
- L'âne noir ! me suis-je écriée comme une enfant.
- Tu veux perdre hein !
- C'est ce qu'on va voir ! 》

Je me suis levée et attrapée le paquet de cartes sur la cheminée et marbre. J'ai distribué les cartes et nous avons commencé à jouer.
La partie a duré quelques minutes.

《 Tu as triché ma chère enfant !
- Haha ! C'est toi qui va dormir avec l'âne noir on dirait Papi !! ai-je ri, à moitié allongée sur le lit. Je vais te laisser te reposer, j'ai des mathématiques à faire.
- Vas y, laisse moi je ne pourrai pas aller bien loin ! 》

Je pars en riant face à l'humour noir de mon grand-père Léon.
Je suis redescendue et ouvert mon cartable. J'ai pris mes cahiers et me suis mise au travail.
Par manque d'inspiration, j'ai fermé mes affaires de mathématiques et arraché une feuille d'un calepin. J'attrape un stylo plume et me met à écrire.

Résolution année 1937.

Chère Eve Dechambord du futur,

C'est une fabuleuse année qui commence. Tu étais entourée de ta famille et de tes amis pour les fêtes de fin d'années. Reste celle que tu as toujours été, loyale à ta famille et à tes amis. Mais soit surtout loyale à la France.
Du haut de mes 13 ans, j'exige que tu tiennes les résolutions que j'ai pris pour toi.
La menace allemande gronde comme une épée de Damoclès au dessus de l'Europe, Papi Léon le sent lui aussi.
Il faut que tu haïsses les allemands, et si un jour, un malheureux jour viendra où une guerre éclatera... Promet que tu n'auras jamais de lien quelconque avec les Boches. Tue les, ils ne valent rien. Tue les. Car si tu ne les tue pas pour la survie de ta famille, c'est eux qui te tueront.

Eve Dechambord de 1937.