Nouvelle Année ( Eve )

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31 décembre 1943, Saint Nazaire de Ladarez, Hérault, Languedoc-Roussillon, France.

Les jours se sont écoulés, dans la même ambiance que les jours précédents se sont écoulés. Toujours la même routine face à l'Occupation des nazis, toujours la même crainte de se faire prendre et déporter, toujours la même crainte que tout cela dure indéfiniment.

Une nouvelle année va commencer. Encore une année où les brutes de nazis sont au village, il n'y a qu'Hans qui sort du lot, il n'a jamais fait partie de ces gros sauvages. C'est vraiment long, cela fait plus de cinq années consécutives que la guerre sévit l'Europe. N'est-ce pas assez ? Quand tout cela s'arrêtera-t-il ?
Petit à petit, je vois tous les français, les vrais français qui ne collaborent pas, je les vois flancher sans le voir, ils faiblissent et deviennent tous aliénés. Je suis tellement impuissante face à ça, j'aimerais tellement que mon grand-père soit avec moi. Lui, il saurait quoi me dire et je pourrai peut-être faire quelque chose. Plus personne ne se bat, personne ne veut se battre pour son pays. Pour la France française, pas la France allemande. Il n'y a qu'Hans et moi, nous sommes les seuls ici à essayer de préserver nos pays sans qu'ils soient totalement détruits par la stupidité du IIIème Reich.

Beaucoup de femmes du village, dont moi d'ailleurs, nous avons été convoqué à la Kommandantur par le général Strauss-Kahn en personne. Nous y allons toutes ensemble, ces pauvres femmes le craignent comme si ce Marinus était un Dieu vivant.

《 Eve ?
- Vous êtes...?
- Helena Solverdz, une infirmière allemande.
- D'accord, enchantée Mme Solverdz.
- Je vous ai vu, avec le Colonel Leyers, dit-elle à voix basse.
- Je suis la femme d'Emmrich Jäger, il m'a fait passer tous vos clichés mignonnets ensemble. Mais je vous ai aussi vu de mes propres yeux, je vous ai vu vous enlacer à plusieurs reprises au hameau de Douch.
- Et donc...? l'ai-je nargué d'un ton faussement calme.
- Sachez que je peux vous dénoncer à tout moment à Marinus, je suis sûre qu'il se fera un plaisir de vous faire exécuter et d'envoyer le Colonel jusqu'à la fin de la guerre sur le front de l'Est.
- Oui oui ma foi, si vous le dites. 》

Je n'ai pas cherché à discuter plus avec cette femme. Hans m'a dit qu'elle charmait Marinus tout en étant mariée au Capitaine Jäger beaucoup plus jeune qu'elle. Cette Helena n'a pas beaucoup de valeurs, elle ne me fait pas peur. Puis si elle veut nous dénoncer à Strauss-Kahn, que bon lui fasse après tout ! Je sais que le général plénipotentiaire croira son Colonel, pas une infirmière bas de gamme.

Nous sommes arrivées au salon de la Kommandantur, face aux dirigeants nazis. Il y a Hans, c'est fou ce qu'il peut être sérieux dans son uniforme, tellement concentré qu'il ne me regarde pas. Pour être franche, je ne suis même pas sûre qu'il regarde quelqu'un à vrai dire. Il y a aussi le général Strauss-Kahn bien entendu, toujours aussi fermé et froid, le visage crispé par je ne sais quoi. Le Capitaine Jäger est revenu de sa prétendu excursion en Italie, son visage d'homme manipulateur et vicieux ne m'avait pas manqué. Le général Schumacher n'est pas là, c'est le seul du quatuor à ne pas être là.

《 Bonjour Mesdames, salue Hans d'une voix nette et articulée.
- Si vous êtes ici ce matin à 8h30 du matin c'est parce que nous avons besoin de vous. J'aimerais que vous vous rendiez à la salle de Réunion pour préparer la soirée du réveillon du nouvel an, explique Marinus. Vous formerez une équipe, certaines d'entre vous feront la cuisine, d'autres le ménage, le service des repas et boissons. Mais le principal, c'est que tout soit prêt pour notre arrivée à 18h30. Le Capitaine Jäger vous fournira les tenues appropriées pour ce soir ! Bonne journée Mesdames. 》

Oh non mais enfin... Pourquoi m'avoir pris à moi ? Je ne suis vraiment pas douée pour aucun de ces domaines.

Il va falloir être une bonne et gentille Collabo l'espace d'une soirée, ai-je pensé dégoûtée.

Programmés pour tuerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant