Chapitre 29 : Vague reconnaissance (Ana)

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Mon ventre.

J'ai l'impression qu'il se digère lui-même.

Ma tête.

Je suis persuadée que ce n'est plus qu'une question de temps avant qu'elle n'explose.

Mon corps.

Il est un champ de ruines.

J'ai mal partout, aux bras, aux jambes, au dos, au cœur...

Sa douleur à lui seul surpasse largement toutes les autres.

Auparavant meurtri, il est désormais en miette.

En une seule et même journée, j'ai tué deux personnes, su que mon père se foutait de moi, découvert que je partageais un horrible passé commun avec Noah, affronté la mort de Félix, perdu Olivier et Julia et me suis livrée au chef de la mafia japonaise pour sauver des personnes qui ne veulent même plus de moi.

Je ne sais pas comment je vais m'en sortir.

J'ai le sentiment que mon enfer vient tout juste de commencer.

Un bruissement à ma droite attire mon attention, mes paupières papillonnant en cette direction.

Ma tête se tourne vers le bruit, une grimace s'emparant de mon visage suite à l'élancement insupportable qui nait entre mes tempes.

Une silhouette massive quoique floute se dessine sous mes yeux avant que je ne les cligne plusieurs fois pour éclaircir ma vision.

Mais lorsque j'y parviens enfin, je le regrette aussitôt.

Parce que cette silhouette, elle appartient à mon ex petit ami, celui-là même à qui j'ai promis une vie à mes côtés.

Je retiens un mouvement de recul et le dégoût qui menace de s'installer sur mes traits, alors qu'un sourire tendre se forme sur ses lèvres.

Il approche sa main de mon visage et la pose sur le dessus de ma tête, son pouce caressant doucement mon front.

Je déglutis, affreusement mal à l'aise.

Mes yeux se ferment machinalement pendant que je retiens l'irrésistible envie qui me saisit de retirer sa main de sur moi, sachant que cela ne me portera que préjudice.

Tu m'as fait peur, tu sais ? J'ai cru pendant un instant que je t'avais perdu, alors que nous venions tout juste de nous retrouver.

Je plante mes iris dans les siens en forçant un petit sourire, un infirme sentiment de culpabilité naissant dans mes tripes.

S'il savait à quel point il se trompe...

Je suis heureux de te voir enfin réveillée. J'avais hâte de savoir comment tu te sentais. As-tu faim ? Soif ? Veux-tu des couvertures supplémentaires ? Ou peut-êtr-

Raiden. Ralentis. Et baisse le ton.

Mes paupières se crispent, alors que la souffrance circule comme un poison dans mes veines.

Sa main quitte me soudainement avant qu'un petit bruit ressemblant à celui d'une claque se fait entendre, m'indiquant qu'il vient de se taper le front avec.

Mais je suis si obnubilée par la vague d'oxygène qui entre dans mes poumons que je ne m'en rends que vaguement compte.

Je n'avais même pas réalisé que je retenais mon souffle.

Oui, bien sûr. Je suis désolé, j'aurais dû y penser. Excuse-moi, déblatère-t-il, semblant sincèrement désolé.

Ça va, grognais-je, souhaitant seulement qu'il se taise.

Une vive douleur me frappe subitement à l'estomac, me faisant grimacer et me replier sur moi-même.

Mes bras encerclent ma taille, alors qu'un gémissement douloureux m'échappe.

J'ai si mal.

Je vais aller te chercher à manger. Le médecin a dit qu'il faudrait que tu reprennes des forces et recommences à manger pour diminuer ta douleur. Ton estomac est vide depuis trop longtemps, c'est pour ça que tu es aussi mal en point.

Je serre les dents et relève péniblement la tête vers lui, le regard meurtrier.

Et c'est la faute à qui ? crachais-je.

Il baisse les yeux, déglutit.

La honte et les remords, je les vois sur son visage.

Voit-il en retour la haine et la rage que je ressens pour lui ?

J'ose espérer que oui et qu'il en souffre comme moi je souffre.

Il ouvre la bouche et la referme avant de répéter son manège plusieurs fois, m'agaçant.

Il veut me dire quelque chose, mais n'en trouve pas le courage.

Et c'est tant mieux, je ne supporte plus le son de sa voix.

Je reviens, murmure-t-il.

Je ne lui réponds pas, me retournant dans le lit pour lui tourner le dos.

Je n'en ai rien à faire qu'il sache que je lui en veux, c'est normal après ce qu'il m'a fait vivre.

Et j'agirais de la même manière si je l'aimais toujours, sauf que ce n'est heureusement pas le cas.

Je laisse les secondes s'écouler dans un silence agréable, presque reposant.

Mes yeux se ferment d'eux-mêmes, alors que je me blottis plus confortablement contre les oreillers.

L'envie de dormir me prend, mais une odeur familière parvient à mes narines.

Son odeur.

Mon nez se fronce de dégoût, alors que je me redresse sur un coude, mes yeux dardant un regard accusateur aux pauvres coussins.

Même sans être là, il parvient à me révulser.

Je me laisse retomber contre le matelas en soupirant, l'élan de douleur qui me traverse se trouvant accueilli avec joie.

Voilà une distraction bienvenue.

Je me concentre là-dessus, oublie un instant où je suis et pour quelles raisons.

Le bruit d'une porte qui grince attire immédiatement mon attention, raidit mes muscles meurtris.

Il serait déjà revenu ?

Je fais mine de n'avoir rien entendu et ferme les yeux, souhaitant lui faire croire que je me suis endormie.

Je contrôle ma respiration, la fait lente et régulière.

J'entends le battant se refermer, une clé tourner dans la serrure.

Il verrouille la porte ?

Je m'efforce de rester calme, de rationaliser les choses.

Il ne tenterait jamais rien, alors que je suis dans un tel état.

Et je dois me reposer, c'est un fait.

Il souhaite probablement que l'on ne me dérange pas et me laisse tranquille.

Je sens quelqu'un s'approcher de moi, le pas sur le parquet se faisant anormalement léger et hésitant.

Je retiens un froncement de sourcils qui menace de me trahir, ne reconnaissant que vaguement cette démarche.

Mais une chose est sure, ce n'est pas Raiden.

La sienne est beaucoup plus lourde et confiante, elle respire le danger.

Tout ce qui ne représente pas celle que j'entends.

Alors, une seule question se pose.

Qui est-ce, si ce n'est pas lui ?

Secret d'État 2 (En pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant