Une Seconde Éternité

Ch 52 : Chaos

Au milieu d'un amas de ruines dans le désert plongé dans l'obscurité, se dressa le haut du corps d'un golem de pierres. Le golem était gigantesque et monstrueux. Même à genoux, il dépassait la taille du palais rose de Croissant d'Oasis.

Sa peau craquelée rappelait les parois rocheuses d'un volcan, et de la lave en fusion coulait de chaque fissure. Il était aussi grand qu'une montagne, bien que cette montagne eût une tête, des bras et tout le reste d'un corps. Son sang à l'encre de feu faisait briller une magnifique lueur de crépuscule autour de lui, or jamais l'aube elle-même ne s'était parée d'une aussi sublime lumière. Cette robe chaleureuse baignait le golem d'un voile mordoré captivant de beauté dans la pénombre de la nuit.

« Ne vous approchez pas ! Reculez ! Éloignez-vous ! » hurla Kaze sans attendre.

« FUYEZ ! FUYEZ-LE PLUS LOIN QUE VOUS POUVEZ !!! »

Les appels de Kaze eurent l'effet d'un réveil brutal. Des cris terrifiés se mirent de nouveau à retentir de tous côtés. Les groupes et les foules de personnes se ruèrent et se bousculèrent en direction des portes de la cité.

Le golem se pencha et fit mine de vouloir se mettre debout. En posant ses mains sur le sol, il écrasa trois cultivateurs qui n'étaient pas assez rapides, ou était-ce le géant de pierre qui fut trop rapide malgré sa taille et son poids de plusieurs tonnes ?

Lorsqu'il souleva sa main, Qian Xiuying poussa un long cri poignant. Entre les doigts de pierres, elle avait reconnu le cadavre de son époux. Le corps aplati et tout en sang de Li Jiangshan dans la paume du golem était une vue atroce qui ne dura qu'un court instant, avant qu'il ne soit totalement carbonisé en cendres. Ses cendres se répandirent dans le vent lorsque le géant bougea sa main, et très vite, il ne resta plus rien de Li Jiangshan.

Hurlant de désespoir, Qian Xiuying éclata en sanglots, ses larmes coulant comme la pluie, ses yeux se voilèrent d'obscurité et elle perdit connaissance. Aux ordres de Qian Qi, cinq cultivateurs du clan Qian partirent secourir Qian Xiuying pour la mettre loin à l'abri. Les démons, quant à eux, ne se firent plus prier pour rentrer aux Enfers et disparurent aussi vite qu'ils étaient arrivés. Dans l'agitation la plus totale, les junzis se regroupèrent pour affronter le golem, la volonté de tous faisant un rempart pour protéger l'évacuation des autres.

Le golem poussa un cri puissant et bestial, pareil au rugissement féroce provenant de la gorge d'un dragon hurlant rageusement l'étendu de sa fureur.

Kaze alla se placer aux côtés des junzis faisant face au géant de pierre, une expression sérieuse placardée au visage.

« Vous n'avez aucune chance, dit-il à Zhu Yazhu. C'est une mort assurée, vous devez fuir ! »

Zhu Yazhu secoua légèrement la tête.

« Nous devons protéger les autres en donnant notre vie s'il le faut. C'est notre devoir de cultivateurs. Protéger la vie des hommes ! »

Kaze esquissa un tic d'agacement. À ce moment-là, la voix de Mei Fang se fit entendre dans son dos.

« Avez-vous sauvé le bijou de mon frère, chef de clan Zhu ? La Porte de l'Avenir ? demanda-t-il à Zhu Yazhu.
— Pourquoi me demander cela maintenant ?
— C'est peut-être la clé pour nous sauver de ce titan colossal !
— Qu'avez-vous en tête ? »

Le temps qu'il lui déballât son idée, les Immortels s'étaient aussi regroupés et ils avaient commencé à s'attaquer au monstre. Des envolées de talismans se ruèrent sur le colosse pour l'encercler, mais les morceaux de papiers se désagrégèrent instantanément sous la chaleur qui se dégageait d'un champ invisible entourant le géant. Alors, des voiles argentés, formés par le métal des épées volantes, s'élancèrent après les papiers calcinés. Les épées parvinrent à pénétrer le champ épais de l'aura, mais elles s'écrasèrent et ployèrent contre la surface rocheuse du golem. Ces petites piques eurent le don d'énerver le géant. Il leva une main et jeta un énorme rocher brûlant en la rabaissant. Le rocher tomba avec un jet de lave et roula sur les Immortels. Le choc manqua de faire tomber Zhu Yazhu de son épée, mais Kaze l'aida à se tenir.