Chapitre 70 - Matthias

36 1 0
                                    


Le soleil m'aveugle. Qui diable a laissé les rideaux ouverts hier ?

Ah oui, c'est moi.

La soirée d'hier me revient en mémoire. Je me souviens de Mirela qui hurlait en pleine nuit, parce que Praline convulsait. Le médecin nous avait dits qu'elle allait bien, que c'était un signe qu'elle allait se réveiller très bientôt. Mon cœur a explosé de joie. Je me suis senti revivre, comme elle certainement. Je me suis senti tellement bien en sa compagnie que je n'ai pas hésité à m'allonger à ses côtés. C'est risqué, je le sais, mais j'en avais besoin. Ce qui m'a semblé étrange, c'est que le fait que m'allonger à ses côtés m'a paru plutôt naturel. Je me suis retrouvé à penser que c'était normal, pourtant, ça ne l'est pas. Ça ne devrait pas. Il ne faut pas que je prenne l'habitude de faire ça et encore moins quand le père de Praline dort à quelques portes d'ici. Je ne sais pas trop comment je réagirais si je me faisais prendre par quelqu'un - en dehors de Maria.

Je me débats de mes draps, essuie la bave qui a coulé de ma bouche et m'étire, avec si peu de grâce. De toute façon, qui peut me voir ?

Bien sûr, c'était sans compter le fait que Praline se tienne à côté de moi, les yeux grands ouverts.

Un large sourire s'étire sur son visage et s'en est trop. Je me jette littéralement sur elle et la serre dans mes bras. Je n'y crois pas. Je ne peux pas croire que c'est réel. J'ai attendu ce moment depuis deux mois et quand ça arrive enfin, je n'y crois pas. Je resserre ma prise sur elle. Je ne veux pas qu'elle disparaisse, pas une autre fois.

Mon rythme cardiaque accélère. Je me sens bien. Je suis soulagé et j'ai envie de pleurer. J'ai l'impression que tout est irréel et j'ai peur que tout s'efface.

- " Ma douce, c'est toi. C'est réel ? Tu es vraiment là ? "

Je pleure. Je ne me retiens pas.

- " Peux pas... Respirer. "

- " Hein ? "

- " Matthias, je ne peux plus respirer. "

- " Quoi ? Je ne comprends pas ce que tu dis. Répète ! "

Elle gigote sous mon poids et éclate de rire. Elle tente de se débattre et de se défaire de mes bras.

- " Dégage, patate ! "

Je m'offusque. Je relève la tête vers elle, les yeux grands ouverts.

- " Comment oses-tu parler comme cela à ton roi ? "

- " Mais tu m'écrases ! "

- " ET DONC TOI, TU M'INSULTES ? "

Elle éclate encore plus de rire et je me joins à elle. Merde, qu'est-ce qu'elle m'a manqué.

Même si je l'étouffe, je la câline encore plus. J'ai rêvé de ce moment depuis bien trop longtemps pour ne pas en savourer chaque seconde.

- " J'ai cru que je t'avais perdu... Tu m'as tellement manqué, ma douce. "

- " Tu m'as manqué aussi, Matthias. "

Je me redresse et je la laisse respirer. Elle tente de se redresser et je me sens un peu mal d'y être allé aussi fort avec elle, mais j'avais tellement besoin de la sentir vivante. Je l'aide à se positionner correctement et elle soupire.

Même si je suis heureux et soulagé qu'elle soit réveiller, je crains toujours pour sa santé.

- " Comment tu te sens, Praline ? "

- " Je... Heu... Ça va ? "

Je grimace. Elle ne semble pas plus convaincue que moi de son mensonge.

- " Repose-toi encore. Tu en as besoin. Je vais aller prévenir ta famille que tu es réveillée. J'en connais une qui sera ravie de pouvoir t'embrasser. "

Elle rigole et ça me réchauffe un peu le cœur. Le silence s'installe et durant ce petit laps de temps, elle et moi, nous regardons. Son regard m'attendrit. Elle a ce don pour me calmer - et m'exciter.

- " Reste avec moi, s'il te plaît. Encore un peu. "

Je souris et me rapproche d'elle. Qu'est-ce qu'elle est belle.

- " D'accord. "

J'aimerai fondre sur elle et me pendre à ses lèvres. Depuis le temps que je désire l'embrasser. Ma main approche de son visage et je caresse tendrement sa joue. Elle repose sa tête sur ma main et se laisse bercer. Soudain, son visage s'illumine et elle détourne le regard. Vers les fenêtres.

La neige continue de tomber délicatement en dehors. De sa chambre, on aperçoit une petite partie des montagnes qui surplombe Éronde. Le haut des montagnes s'est largement recouvert d'un manteau blanc. Je me demande ce qu'il en est du reste du pays.

Je sors du lit, sans bousculer la paysanne et part ouvrir plus grand les rideaux. Je sens qu'elle essaye de se lever pour voir plus, mais ses forces ne sont pas avec elle. Elle retombe, las. Je m'approche d'elle et l'aide à se mettre sur ses pieds, pourtant, ça ne marche pas. Son visage se déforme et elle boude. Je rigole devant ce regard enfantin et caresse ses longs cheveux.

- " Ne bouge pas. Accroche-toi à moi. "

Elle encercle mon cou avec ses petits bras et je la soulève, en princesse. Elle gesticule et se débat, n'ayant pas compris que je voulais la soulever.

- " Matthias, repose-moi. Qu'est-ce que tu fais ? "

- " Je t'aide, ça ne se voit pas ? Tu es encore trop fragile. "

- " Mais... "

- " Chut et regardes. "

Je me suis approché des fenêtres. Même si on n'a pas une vue incroyable, Praline s'émerveille. Ses yeux s'illuminent et elle sourit de toutes ses dents. Quand j'y pense, c'est la première fois que Praline voit le château sous la neige. Ça me fait du bien de la voir comme ça, comme si rien de tous ces derniers mois n'étaient arrivés. En cet instant, je suis tellement comblé. Elle regarde la neige et me fixe ensuite. Son regard est tellement pur et intense. Ses lèvres m'attirent. Qu'est-ce que je fais ? Pourquoi est-ce que je m'en approche autant ? Elle continue de me fixer et ses yeux dérivent sur mes lèvres. Pourquoi me fais-tu ça, ma douce ?

Mon cœur explose. Il faut que je le fasse. J'ai besoin de l'embrasser et de la sentir à moi.

- " Praline... "

Je ne sais pas quoi dire d'autres, pourtant, j'ai tellement à lui dire.

Elle est toujours dans mes bras et s'accroche à moi. Ses mains me caressent le cou et d'une main, elle joue dans le bas de mes cheveux. Ses gestes sont tellement doux. J'ai tellement envie de lui dire tout ce qui tourne dans ma tête. Elle me sourit et délicatement, elle dépose sa tête sur mon épaule et elle ferme les yeux. Ce moment est apaisant et elle finit rapidement par s'endormir dans mes bras. Je sais à quel point ce doit être exténuant de revenir d'entre les morts.

Je la dépose dans son lit et l'enroule de ses draps. Elle doit se reposer et je dois aller prévenir tout le monde. Ça y est, ma belle au bois dormant s'est réveillée.



Luv,

May.

Sa Majesté d'Éronde [Tome 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant