︙
- " Qu'est-ce que tu fais là ? "
- " Je suis venue parce que j'ai entendu du bruit venant des cuisines. Et toi ? Qu'est-ce que tu fais... Presque nu et dans la neige ? "
À son inspection oculaire, je me sens soudain gêné. Dans l'instant, j'avais oublié que j'étais très peu vêtu.
- " Hum, je... J'avais besoin de prendre un peu l'air. "
- " Pourquoi ? "
Et voilà. Ça recommence. Elle continue de m'observer avec cet air rempli de haine et de dédain. Comme si les dernières secondes d'inquiétude avaient subitement disparu. Comme si elles n'avaient jamais existé.
- " Et pourquoi pas, Élizabeth ? N'ai-je pas le droit de me promener tranquillement dans mon château ? "
- " Idiot. "
- " Idiote. "
Un silence s'installe et je me sens encore plus glacé que tout à l'heure. Aucune émotion ne peut être décelée dans son regard. Ce n'est même pas étonnant venant de ma chère sœur.
Pourtant, je sens qu'elle veut parler. Quelque chose d'inhabituelle se traduit dans sa gestuelle. D'habitude d'une attitude hautaine et sûre d'elle, elle me paraît maintenant bien petite et misérable. Peut-être est-ce l'effet du noir autour d'elle, je ne saurais le dire. Mais ces quelques minutes de fragilité disparaissent bien vite et bientôt, c'est son sourire habituel qui refait surface. Un sourire satisfait.
Elle n'est donc pas là par hasard. Elle m'a vue, elle a vu mon état pitoyable et je suis prêt à parier qu'elle va le tirer à son avantage. Évidemment, elle ne tarde pas à s'approcher et à m'achever.
- " Alors, elle est partie, hein ? "
Je ne réponds rien. Il ne sert à rien de gaspiller ma salive et encore moins pour elle.
- " Je prends ton silence pour un oui. Comme c'est triste. "
- " Comme si tu en avais quelque chose à foutre ? "
- " Oh, bien sûr que j'en ai quelque chose à faire. Enfin ! Il n'était pas trop tôt. "
Elle continue de me sourire vulgairement. Je serais prêt à la tuer juste pour voir ce sourire s'envoler.
- " Tu es... misérable à voir, grand-frère. "
- " Et toi, tu es toujours aussi répugnante. "
- " Ha ! Certes, mais entre nous, c'est toi qui pus l'alcool. Tu es misérable dans tes pauvres vêtements, complètement perdu sans ta pauvre paysanne. Oups, pardon. Ta " servante. "
Elle s'approche dangereusement de moi, si bien que je peux sentir son aura démoniaque m'embraser la peau. Si tout à l'heure, je me plaignais du froid et bien je ferais tout désormais pour y retourner.
- " Je te conseille de t'arrêter là dans tes prises de paroles. Je ne veux plus entendre un seul mot sortir de ta sale bouche. "
- " Tu me fais pitié, Matthias. Regarde-toi. Pauvre, sale et grotesque. Tout ça, pour une pitoyable paysanne. Tu étais tout, mais aujourd'hui, tu n'es plus rien, sauf un pauvre type. Avant, tu savais instaurer la peur autour de toi. Le monde te respectait et maintenant ? Le peuple te rit au nez. Que disent-ils ? Le roi, si détestable, si impitoyable est tombé amoureux d'une paysanne, dont il avait promis souffrance et malheur ? "
- " Élizabeth, ça suffit. Je te préviens, c'est ta dernière chance de la fermer. "
Je ne sais pas si c'est l'alcool dans mes veines qui me fait bouillir sur place, mais je sais que je n'aurais pas la patience de continuer à l'entendre me rendre plus misérable que je ne le suis déjà.
- " Sérieusement, Matthias ? Tu crois faire peur à qui ? Personne n'a peur de toi ! Et certainement pas moi. En fait, tu sais quoi ? Tu es exactement comme père. "
- " ÉLIZABETH ! "
- " Oui, Matthias ! Exactement comme lui et tu me hurles dessus parce que tu sais très bien que j'ai raison. Tu sais comment il était, aussi bien que moi et ça te fait un mal de chien de te l'avouer. Mais moi, je vais le dire tout haut. Tu es faible. Tu n'es pas un homme, tu n'es rien. Père s'est laissé mourir pour une stupide femme. Quelle bêtise ! L'amour n'est rien d'autre que le pire des châtiments et tu es tombé dedans comme un moins-que-rien. Tu crois quoi ? Que parce que tu aimes quelqu'un, tu seras sauvé ? Et bien, non. Tu es devenu pire que père. Tu me dégoûtes et aux yeux de notre peuple, tu es un roi lamentable. Crois-tu sincèrement que le peuple va mieux t'aimer et te pardonner, juste parce que tu es amoureux ? "
Elle éclate de rire, pendant que mon cœur se brise. Mes larmes coulent toutes seules. Je ne peux même pas les retenir, parce que même elles refusent de m'obéir.
- " Tu es minable. Tu es amoureux ? Très bien. Mais part ! Laisse la place aux vrais dirigeants du monde. Tu n'as pas ta place dans ce monde et le monde ne veut pas de toi. Nous n'avons pas besoin d'un énième échec dans nos vies. "
Je sens son regard amer me transpercer la peau, mais je m'en fiche. Tout ce que je ressens, en cet instant, c'est un profond sentiment de douleur et de haine.
- " Tu sais quoi ? "
Je relève le visage, fièrement vers elle. Elle ne me marchera plus sur les pieds.
- " Tu as raison, je suis misérable. Je suis amoureux d'une femme incroyable, qui se bat dans sa vie pour sauver ceux qu'elle aime, au détriment de son bonheur. Et ça, tu vois, ma petite sœur adorée, c'est quelque chose que tu ne pourras jamais accomplir de ta vie. Mais je ne peux pas t'en vouloir, on ne peut pas tous être parfait. Regarde-moi, comme tu le dis. Je suis lamentable comme roi. Mais comme frère, je suis et je serais le meilleur que tu n'auras jamais de ta vie. Et pour te le prouver, je vais te rendre le plus grand service que je ne puisse jamais te faire. Tu ne me supportes plus ? Tu ne m'aimes pas et tu penses que je suis misérable comme notre père ? Parfait, mais écoute-moi bien, ce soir, car ce sera la dernière fois que tu m'entendras te parler. "
Ses yeux s'écarquillent. Elle sait très bien ce qu'il l'attend. Je souris à mon tour de toutes mes dents, parce que je prends un malin plaisir à la détruire, autant qu'elle l'a fait, dans ma vie.
- " As-tu déjà entendu parler du roi de Sutra ? C'est un homme charmant. Incroyablement respecté dans son pays, populaire envers la gente féminine et au cœur aussi gros que son ventre. Comme je comprends parfaitement ton besoin d'être seule, voilà ce que je te propose. Ce fameux roi cherche une femme, depuis, disons... plus de 60 ans. Sa beauté fatale n'a jamais pu satisfaire le bon plaisir des femmes, mais sa puissante et dominante fertilité, elle, saura te satisfaire, j'en suis sûr. Petite sœur, voici mon cadeau. Tu es promise à cet homme. Dès aujourd'hui, considère-toi comme sa femme et future mère de ses enfants. Avec un peu de chance, tu pourras régner un peu à ses côtés avant qu'il ne meure, essoufflé pendant une incroyable baise. Donne-lui un héritier le plus tôt possible, ou alors, tu seras condamné à traîner dans les couloirs de ton château, jusqu'à la fin de tes jours. Ah oui, parce que je ne te l'ai pas encore dit, mais là-bas, les femmes ne sont pas autorisées à régner. "
Je m'avance, tourne autour d'elle et lui souffle encore des mots à l'oreille. Je sens qu'elle tremble. Elle boue de l'intérieur. Il est temps que ça cesse.
- " Commence à préparer tes affaires, Élizabeth. La missive est partie depuis plus d'un mois. Il ne devrait plus tarder à venir. Ton prince charmant est là. Toi qui voulais régner, je t'offre le règne absolu. Princesse un jour, reine le lendemain, au côté d'un roi centenaire. Tu vas voir, il n'est dit que du bien de lui. Il est décrit comme un homme repoussant, grossier et puant la graisse de porc. Son ventre aussi prédominant que sa calvitie saura te réchauffer le soir et son copieux pénis pourra te satisfaire, mieux que quiconque ici. "
Derrière son dos, je l'attrape dans mes bras et bascule son corps au rythme de mes caresses. Ce sera certainement la seule étreinte que je n'aurais jamais eue avec elle.
- " Alors, Princesse. Es-tu heureuse ? "
︙
Luv,
May.
︙
![](https://img.wattpad.com/cover/293179750-288-k271064.jpg)
VOUS LISEZ
Sa Majesté d'Éronde [Tome 1]
Любовные романыLe pays d'Éronde est gouverné par un roi tyrannique, qui laisse derrière lui un pays endommagé par la pauvreté. Depuis bien trop longtemps, le peuple d'Éronde va mal, et les révoltes sont de plus en plus présentes. Et malheureusement, pour survivre...