Chapitre 35 - Matthias

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C'est assez étrange. Ce matin, en me réveillant, j'avais le pressentiment que quelque chose n'allait pas. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive. Hier, j'ai passé une journée assez reposante, mais la partie que j'ai le plus aimé était quand j'ai accompagné Praline dans ses appartements, le soir. Nous marchions côte à côte, lentement. Dans un sens, je marchais doucement parce qu'elle est petite, donc ses pas le sont aussi, mais d'un autre côté, je voulais que notre balade soit la plus longue possible. Arrivés devant sa porte, son regard s'est arrêté sur le mien et un doux sourire s'est formé sur son visage. Elle me fixait avec tellement d'intensité que je pensais me noyer dedans. Elle m'a ensuite souhaité une bonne nuit, avant de s'éclipser dans sa chambre et me laisser seul, perdu dans mes pensées. 

Ce matin, je me suis réveillé plus tôt. Le ciel était encore sombre. Depuis l'arrivée de l'automne, le soleil tarde à montrer ses beaux rayons. Les journées sont tout de même sombres. Le soleil ne se montre pas toujours et se cache derrière des nuages vrombissants de colère. Plusieurs jours d'affilés, nous avons accueilli la pluie et le tonnerre. Les quelques éclairs qui apparaissaient dans le ciel illuminaient le château et le replongeaient aussitôt dans l'obscurité. 

En sortant de ma chambre, peu de personnes n'étaient réveillées, alors je me suis décidé à lire un peu. J'ai flâné jusqu'à la bibliothèque et me suis installé proche de la cheminée qui flamboie sans cesse. Son crépitement a le don de me détendre et de me permettre de me concentrer. 

Mais cela fait maintenant plus de trois heures que je lis. Mon dos commence à me faire mal et mes yeux surchauffent. Je dépose doucement le livre que je tiens entre les mains et me relève, malgré mes os qui me supplient de me rasseoir. Après un long étirement, j'arrive enfin à m'avancer vers la sortie. Ce n'est que quelques pas plus loin que je peux apercevoir de grosses gouttes tomber sur les fenêtres. Le ciel est sombre et le tonnerre gronde encore. Super. Je déteste ce temps qui me rend maussade. 

Lasse, je me dirige vers les cuisines. Mon ventre crie famine à tout-va. Je rêve soudain d'un biscuit tendre et chocolaté. Ceux que ma Cacahuète a pris l'habitude de me faire. D'ailleurs, elle doit être réveillée, maintenant. 

Dans les couloirs, je remarque qu'une agitation générale s'est installée. Le personnel semble préoccupé par quelque chose, mais je n'arrive pas à savoir de quoi il s'agit. Dans la précipitation, une personne me rentre dedans. Je vacille légèrement, tandis que la personne s'écrase lourdement. Le petit bruit qui sort de sa bouche me fait comprendre à qui j'ai affaire. 

- " Praline, est-ce que tu vas bien ? As-tu mal ? " 

- " Votre Majesté, je suis désolée. Je vais bien, je ne vous avais pas vu. Vous ai-je fait mal ? " 

- " Mal ? " Je rigole fortement face à son innocence. " Tu crois vraiment qu'une petite mouche pourrait me faire mal ? Il m'en faudrait un peu plus pour me faire mal, ma douce. " Je ne me moque pas d'elle méchamment, mais sa petite bouille qui se renfrogne, me fait éclater de rire. Sa lèvre inférieure s'avance et sa bouche se déforme en une petite grimace boudeuse. Inconsciemment, je l'attrape et fini par la prendre dans mes bras et m'arrête soudainement. Elle aussi s'est arrêtée face à mon geste. Qu'est-ce que je viens de faire ? Et pourquoi était-ce venu aussi naturellement ? 

Je me décale alors rapidement d'elle et la regarde, gêné. Pourtant, elle, ne l'est pas. Elle me sourit tendrement. Un de ces sourires qui vous font fondre et perdre la tête. Un de ses sourires qu'elle a tant l'habitude de me faire et qui me font oublier le monde. Pris d'une envie très forte, je me décale d'elle, un peu brusquement et son sourire s'efface. Je me rends compte de ma force et veux m'excuser, mais on se fait interrompre par la venue de plusieurs soldats accoutrés de rouge et de noir. Les couleurs d'Éronde. 

Sa Majesté d'Éronde [Tome 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant