Elle était tombée, victime d'une IA aux yeux de qui elle était un virus à combattre. Quatorze mois de détention, perdue dans les méandres de son esprit, de ses pulsions violentes et d'une douleur qu'elle n'avait su surmonter.
Elle serait libérée.
E...
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Sur l'immense écran qui dominait la salle de réunion, le triangle rouge, ajouré et renversé, s'affichait sur un fond blanc immaculé. Il s'apparentait à un fond d'écran mort et immuable. Le vieil homme, seul face à l'image inquiétante pour tout autre que lui grimaça un sourire confiant et plein de morgue.
— Nous avons perdu cette manche, mon cher, nous gagnerons la suivante.
John Greer et son incommensurable et si pathétique arrogance.
Les médias ne se lassaient pas de parler encore et encore de l'arrestation du Chirurgien de la Mort. Le scénario, digne d'un soap-opéra latino-américain, multipliait les coups de théâtre.
L'histoire d'Anna Borissnova déclencha des torrents d'émotions et de dégoulinants commentaires tous plus larmoyants et dramatiques les uns que les autres. Qu'elle fût devenue le garde du corps de Maria Alvarez déclencha l'hystérie. Ses années de service au sein des services secrets Russes l'identifièrent aux yeux du grand public à une héroïne romanesque et romantique. On s'interrogea sur son bras en écharpe, on apprit qu'elle avait été blessée en sauvant la jeune Mexicaine au milieu d'une forêt profonde. Qu'elle s'était opposée à des dizaines de mercenaires sauvages et sans pitié. Des centaines de milliers de messages de soutien et d'admiration inondèrent la toile. De faux profils à son nom furent créés sur les réseaux sociaux. Anna devint la coqueluche des féministes et des amateurs de girls and guns. Sa taille haute, ses cheveux aile-de-corbeau et ses yeux bleus électriques ne concoururent pas non plus à la rendre moins attrayante. Maria Alvarez avait l'aura d'une juge, d'une personnalité publique. Anna, en retrait, attira les sympathies les plus folles. La jeune Russe opposa aux cris et à cet engouement hystérique un parfait stoïcisme, une parfaite indifférence. Sa popularité n'en fut que plus grande. Les informations fuitaient, sans que le FBI n'y trouvât de solutions. La jungle, Chihuahua, Charleston, les états de service du Chirurgien de la mortauprès du MI6, son identité, sa nationalité... Les services secrets britanniques furent conspués comme l'avait été l'USMC quand Shaw avait été convaincue des crimes du Chirurgien de la Mort. L'ambassade de Grande-Bretagne fut caillassée.
Des événements stupides et ridicules.
Risibles.
Mais les auditions de Maria Alvarez, de ses gardes du corps, des agents du FBI qui s'étaient trouvés à Charleston et des deux policiers d'Anchorage, eurent d'autres conséquences. Des descentes pilotées par les agences gouvernementales aux États-Unis. Une vaste opération dans les villes de Chihuahua et de Juarez, menée main dans la main par l'armée mexicaine et la DEA américaine. Des centaines d'arrestations.
Du bruit. Beaucoup de bruit. Et le procès ne s'était même pas encore tenu.
Lambert n'avait pas parlé. Ce n'était pas dans son intérêt et il le savait très bien. Sa vie était devenue un enfer, mais rien ne pouvait se comparer à celui dans lequel il se retrouverait plongé s'il osait parler. S'il osait trahir son employeur maudit.
