Chapitre XXV : Compte-rendu, doutes, confidences et détente

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Matveïtch et ce qui restait de son équipe avaient regagné New-York. Sameen Shaw n'avait laissé aucune indication qui leur eût permis de localiser Vasselov. Rester à Concord n'eût servi à rien, sinon de risquer de se faire arrêter par la police. Vesselov ne reviendrait jamais.

Ils avaient rejoint l'appartement que Yogorov avait aimablement mis à leur disposition à Astoria. Il avait assuré à Matveïtch qu'ils pourraient y loger aussi longtemps qu'ils le désiraient. L'équipe était réunie dans le salon. Matveïtch observa ses hommes les uns après les autres. Borkoof fumait cigarette sur cigarette l'air sombre. Aliokhine, inquiet, regardait tour à tour ses camarades, cherchant à comprendre ce qui avait pu se passer, comment il avait pu se laisser surprendre par cette femme, pourquoi elle avait emmené Vasselov. Il avait protesté quand il avait compris qu'ils repartaient pour New-York sans même tenter de retrouver Vasselov ou l'une des deux salopes qui l'avaient enlevé. Matveïtch avait juste confirmé son intention de rentrer et quand Aliokhine avait exprimé sa surprise teintée prudemment de désapprobation, Borkoof l'avait violemment pris à partie, lui crachant qu'il n'avait rien compris, qu'il ne connaissait pas Sameen Shaw, que Vasselov était perdu, qu'il fallait l'accepter et le venger lui comme les autres. Aliokhine s'était tu et depuis, il était partagé entre un vague sentiment d'angoisse et la culpabilité. Si seulement il avait maîtrisé la femme qui l'avait attaqué... Il entendrait un bruit de pas, tournerait la tête et Vasselov surgirait de la cuisine et s'assiérait comme il en avait l'habitude, à cheval sur une chaise. Sur cette chaise, là en face de lui.

Matveïtch voyait son équipe flancher. Un débriefing s'imposait. Il posa les yeux sur Anna Borissnova. Elle se trouvait dans un triste état. L'une de ses pommettes avait éclaté sous le coup de coude avec  lequel Shaw l'avait accueillie quand elle lui était tombée dessus, un coquard lui ornait l'œil droit et sa mâchoire devait la faire souffrir car elle n'arrêtait pas de se la frotter avec les doigts en grimaçant. Les doigts de sa main gauche. Sa main droite était emprisonnée dans une attelle. Matveïtch l'avait accompagné à l'hôpital. Poignet brisé. Mais ce qui inquiétait Matveïtch depuis qu'elle avait repris conscience, c'était le silence dans lequel elle s'était plongée.

Anna Borissnova Zverev n'était pas issue comme les autres, comme lui, de l'armée, des forces spéciales. Elle lui avait été recommandée et présentée par Chouvalov. Matveïtch n'avait jamais réellement su comment ils s'étaient rencontrés, ni elle ni Chouvalov n'en avait jamais parlé. Tout ce qu'il savait, c'était qu'Anna Borissnova avait très jeune, été recrutée par le SVR et rejoint les équipes actives comme « extracteur », même si certaines de ses assignations la désignaient parfois plus comme « effaceur » ou comme « exécuteur ». Matveïtch l'estimait beaucoup, elle était disciplinée, se servait avec dextérité de toutes les armes qu'on pouvait lui mettre entre les mains, se montrait discrète et efficace. Elle ne buvait pas et ne commettait que rarement des erreurs. Elle semblait froide, mais une fois en confiance, on découvrait une personne chaleureuse et elle adorait chanter. Des vieux chants russes évoquant les plaines, les amours perdus, la mélancolie. Sa voix grave et profonde, modulée avec adresse emportait ceux qui l'écoutaient au cœur de ses chants. Ils vibraient à l'unisson des paroles, elle imposait le silence e tpuis sans même s'en apercevoir les gens finissaient par l'accompagner, emportés par sa puissance évocatrice. Chouvalov jouait de la Balalaïka. Parfois, Matveïtch s'imaginait quand ils chantaient ensemble qu'Anna et Ivan s'étaient rencontrés autour d'un feu de camp perdu au fond d'une lointaine forêt de Sibérie. Elle les avait souvent surpris le soir quand le silence régnait, à la fin d'une mission ou dans l'attente d'une autre. Elle commençait à chantonner puis peu à peu, son chant prenait de l'ampleur. Selon les circonstances, les chants étaient guerriers, mélancoliques ou très gais. Ils l'écoutaient alors, se joignant à elle, ou plongeant dans leurs pensées, leurs souvenirs. Si Chouvalov avait emporté son instrument, il l'accompagnait, mais pas toujours, préférant parfois lui aussi, se laisser bercer par sa voix.

La fille de Kaveh دختر کاوهOù les histoires vivent. Découvrez maintenant