À corps perdus [yoonminkook]

Chapitre 23

Quelque chose avait changé.

En fait, beaucoup de choses avaient changé.

La première, la plus incroyable, la plus improbable, était que Yoongi avait commencé à lui parler normalement. Presque gentiment, parfois.

Jimin s’était méfié, d’abord, avait attendu le changement d’humeur, le retour de la dureté et du dédain, le retour des mots-pierres. Mais le ton neutre, parfois doux, qu’il avait utilisé ce jour-là n’avait plus disparu, était devenu quotidien. Yoongi restait dur et critique, l’entraînement n’avait pas changé. Mais la manière de le faire était toute différente.

Jimin ne se sentait plus méprisé, il se sentait presque apprécié.

“Tu es excellent”, avait dit Yoongi.

"Un très bon boxeur", "un des meilleurs d'Athènes".

Et il allait boxer avec lui bientôt.

Jimin le croyait, Jimin l'espérait.

Certes, il avait dit que Jimin était "atypique", "différent", mais étrangement, dans la bouche de Yoongi, ce différent ne portait pas honte. Ce différent était ce qui faisait sa force, avait-il dit, et Jimin s'attachait à le croire, tentait d'apprivoiser l'idée, si nouvelle.

Tentait de s'aimer lui-même, au moins un peu.

Tout cela, ensemble, était la plus belle chose qui lui soit arrivée depuis longtemps. Les premières lueurs d'une aube, éclairant tout de nouveauté.

Tout semblait plus rose, plus vaporeux.

Sa première émotion, le matin en se réveillant, n’était plus cette chape de plomb qui l’enserrait à l’idée de devoir, un jour de plus, supporter le regard et les mots des autres. De devoir, surtout, supporter le regard et les mots destructeurs de celui qu’il n'avait jamais cessé d'admirer.

La première émotion, maintenant, c’était la joie.

Yoongi.

La joie pure, simple, de retrouver ce visage qu’il aimait tant, de pouvoir à nouveau le saluer gaiement, croiser son regard, souvent, cette ombre de sourire qu’il octroyait parfois.

Cette joie profonde irradiait, inondait tout et tous autour de lui.

Sa mère n’était plus si insupportable, maintenant. Il savait qu’elle l’aimait, qu’elle faisait ce qu’elle pensait être bon pour lui. Il se reprenait à dîner avec elle, à converser de choses et d’autres pour son plus grand plaisir.

Il écoutait patiemment Taehyung lui lire sa pièce, tentait de lui donner son avis. L’écoutait, aussi, déblatérer sur le gymnase, sur tout ce sport qui détournait l’esprit des choses profondes, sur Hoseok qui ne devrait pas ceci, devrait plutôt cela.

Souriait malgré lui de cette présence incongrue dans les pensées de Taehyung. Se faisait disputer d’oser rire sur un sujet “si grave”. Se disait que Hoseok avait raison, que Tae aurait bien besoin de quelque chose pour se défouler. Qu’il avait peut-être trop d’énergie en lui, à force de la garder. Riait encore à cette idée qui, lui, l’échauffait.

Pensait à Jungkook. Pensait à son corps, encore. S’effleurait souvent. Culpabilisait ensuite : il devait garder l’énergie pour les Jeux, l’abstinence était une règle d’or avant une compétition. Se sentait pourtant tellement bien, pendant, ensuite, qu’il hésitait peu à réitérer. Continuait à hocher la tête aux discours de Taehyung.

Mais surtout, Jimin riait. Et il riait avec Jungkook.

Au grand dam de Namjoon et de Seokjin, qui les poussaient à rester en concurrence en vue des Jeux, Jungkook et lui s’entendaient toujours mieux. Les disputes s’étaient peu à peu faites chamailleries, les rires remplaçaient bien souvent les cris.