Chapitre 50

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Jungkook avait attrapé la main de Jimin pour le guider à travers le dédale des ruelles, se faufilant habilement entre les étals des commerçants, les charrettes à bras qui déboulaient sans crier gare, les restes de boue de la dernière pluie et les enfants accroupis sur le sol.

Jimin peinait à suivre. Il glissait, se rattrapait à la main solide et chaude qui enveloppait la sienne, au sourire qui semblait si sincère maintenant.

Il n'arrivait pas à croire qu'il était ici, dans ces faubourgs malfamés, dans ce qu'on qualifiait de lieux perdus de pauvreté et de débauche. La lie de la cité, disait-on même. Personne de son entourage n'aurait aimé se retrouver ici à la tombée de la nuit, personne de son entourage n'était même jamais venu ici, il l'aurait juré.

Que penserait Taehyung ? Seokjin ? Que dirait sa mère ? Que dirait son père ?

"Vous ne vous promenez pas dans son quartier j'espère ?"

Jimin frissonna, s'agrippa plus fermement à la main rassurante.

Il était là pour aider Jungkook.

Pour l'accompagner voir sa famille, pas pour se perdre dans les ruelles toute la nuit. Dès que Jungkook aurait passé le seuil de la porte, Jimin rentrerait chez lui. Il faudrait certainement qu'il demande son chemin mais il y arriverait, n'est-ce pas ?

Et puis, si jamais il devait même rapidement saluer les parents de Jungkook, ce n'était pas bien grave. Il avait déjà rencontré le père de Jungkook le jour des élections, certainement parlé à sa mère à la fabrique, même s'il ne savait pas bien laquelle des employées elle était. Ce ne serait pas si différent.

En fait, les gens n'étaient pas si différents.

Les sourires des gamins, dans la rue, étaient les mêmes que par chez lui.

Les apostrophes des commerçants étaient les mêmes.

La hâte de la foule, la rudesse de certains, était la même.

Seuls les vêtements différaient, seule la saleté sur le sol et les maisons délabrées.

La pauvreté.

Voilà ce qui marquait le quartier.

Jimin sentit son coeur se serrer à remarquer les joues creuses de certains enfants, la maigreur des femmes portant leurs ballots. Le regard des hommes était fier, pourtant, un peu intimidant lorsqu'ils le suivaient du regard.

Il serrait fort la main de Jungkook.

Tout à coup la finesse de l'étoffe de sa tunique lui pesait, il aurait voulu retirer son diadème, retirer tous ses bijoux pour en masquer la brillance. Il posa une main sur son propre bras, cacha les pierres du bracelet de Yoongi.

Avait-il peur d'être volé ? Non, Jungkook était là, on ne lui ferait rien.

Car on reconnaissait Jungkook, partout. On saluait avec joie le champion d'Athènes, on l'arrêtait pour lui parler. Jimin patientait alors à côté, intimidé, accroché à la main de Jungkook.

Un sentiment désagréable au fond de lui.

Il avait soudain honte de sa richesse. Honte de son insouciance.

Honte de n'avoir rien fait pour mériter un sort plus favorable que celui de ces gens.

Mais, alors que Jungkook discutait, alors qu'ils se faisaient chaque fois alpaguer par les passants et ne progressaient plus qu'à pas de fourmi, Jimin finit par se secouer et se concentra peu à peu. Il commença à observer autour de lui d'un regard neuf.

À corps perdus  [yoonminkook]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant