Chapitre 55

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Non.

Non, non, non et non.

Les mots criaient en boucle dans la tête de Jimin, bourdonnaient à ses tempes, emplissaient son cœur d'une fureur inhabituelle qui le rendait fort, presque orgueilleux.

Non.

C'était si simple.

Non.

C'était ce qu'il fallait dire.

C'était ce qu'il faudrait dire, dès que son père ouvrirait la bouche, dès qu'il aborderait le sujet, une fois de plus.

"J'espère que tu as cessé de voir ce Jungkook ?"

Non.

"J'espère que tu n'as que des fréquentations dignes de ton rang maintenant ?"

Non.

Non, et c'était comme ça. Ce serait comme ça désormais.

Jimin voulait continuer à voir Jungkook.

Même si son père désapprouvait qui il était.

Jimin voulait continuer à voir Yoongi.

Même si son père avait déjà fait observer qu'il passait trop de temps chez lui, qu'il devrait se contenter du gymnase. Yoongi ne pouvait donc pas l'entraîner là-bas ? Déjà que le Soleil d'Or était indigne de son fils, qu'il aurait préféré qu'il s'entraîne au Lykeion par exemple ?

Non.

Il faudrait dire non.

Et une part de Jimin riait, au milieu de la détermination et de l'inquiétude, à imaginer ce que son père dirait s'il savait qu'elle était la vraie teneur de sa relation avec Yoongi. Et avec Jungkook.

Et s'il savait qu'il avait une relation avec les deux.

Serait-il déçu ? Evidemment.

Le renierait-il ? Peut-être.

Et le cœur de Jimin se serrait alors à imaginer cela.

À imaginer ce père disparaître à nouveau.

À imaginer ce que serait cette nouvelle absence, mais cette fois en sachant qui il était, qui était son père.

Une sorte de présence vide.

Et surtout, la conscience de ce qu'on a perdu.

Pourtant...

Non.

Le mot serait dit.

Crié s'il le fallait.

Car Jimin avait décidé qu'à 20 ans il pouvait choisir. Il pouvait savoir ce qu'il voulait.

Et l'imposer, en en affrontant les conséquences.

Alors ce serait ce non, psalmodié en lui comme une formule magique, alors qu'il faisait les cent pas dans le jardin, incapable cette fois d'en voir la beauté, incapable d'en recevoir les senteurs, incapable d'y trouver l'apaisement.

Ce non, et l'attente.



Lorsque Périclès arriva enfin pour leur rencontre hebdomadaire, une heure plus tard, Jimin n'en pouvait plus.

À force de déborder, le non avait refloué, s'était à nouveau perdu au plus profond du coeur, redevenu timide et hésitant.

Jimin observa ce père qu'il avait tant appelé de ses vœux, enfant, reçut le sourire chaleureux, la joie réelle à le retrouver présente dans les yeux bleus. Sentit la vague de bonheur déferler sur lui, recouvrir tout d'une tiédeur heureuse.

À corps perdus  [yoonminkook]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant