Johan enleva son casque et inspira l'air sec et aseptisé du couloir qui suivait le sas de décontamination. Leur équipement était plongé dans des cuves dès leur sortie. Tout ce qui entrait dans le labyrinthe y passait.
Son pouls s'était calmé, sa respiration avait retrouvé un rythme normal. Ses côtes lui faisaient mal comme s'il avait à chaque souffle de faire sortir plus d'air que ce qu'il en avait dans ses poumons.
Il jeta un œil autour de lui, regarda son caporal puis les membres de son unité : Tomas enlevait ses bottes, Alma, ses gants. Son regard s'attarda sur elle.
-T'as la tête qui penche, J, ça va mieux ?
-J'ai l'impression, oui. Je ne sais pas ce qui m'a pris.Il se passa la main devant les yeux, se redressa. Tomas reprit : « Un bon vieux syndrome de Fernet, mon grand. Ça arrive même aux meilleurs. T'en fais pas trop. »
-J'ai pas l'impression que ce soit Fernet, Tom. Je verrais avec les toubibs, mais c'était vraiment trop étrange.Johan baissa les yeux, perdu dans ses pensées. Si les médecins ne décelaient pas d'autres traces du syndrome de Fernet, il risquait de se faire mettre sur la touche. Renvoyé du programme Sentinelle, il n'aurait plus d'autre utilité que de servir, plus jamais de protéger. Une boule se forma dans son ventre, lui comprima les organes, il eut envie de vomir.
Une fois leur escouade déséquipée et changée, ils descendirent le matériel vers les cuves de nettoyage avant de passer par leurs propres douches de décontamination. L'air dans le labyrinthe était vicié, il rongeait tout, petit à petit, puait comme des corps en décomposition dans un estomac ouvert à la face du monde.Dans l'indifférence de son unité, il réprima les larmes qui gagnaient ses yeux et chassa l'horreur de ses pensées, il chassa l'ombre qu'il sentait grandir derrière lui.
*
« Bonjour, Détective Zebonzes. Je cherche le professeur Philippe Decaste au sujet de son article sur la résurgence des cultes tribaux dans les sociétés modernes. »
A l'accueil de l'université Esmerald Lera, on lui indiqua sur le plan un bureau au rez-de-chaussée. Léon emprunta différents couloirs vitrés avant d'atterrir devant une porte sur laquelle figurait ce nom.
Un jeune homme, maigre, avec des lunettes et un air hagard attendait devant. Il se présenta comme l'un des thésards du professeur Decaste. Ce dernier donnait un cours au deuxième étage et ne serait disponible que d'ici deux heures.
Léon voulut tout d'abord attendre, se disant que s'il partait, il n'aurait jamais le courage de revenir ici pour une piste qu'il jugeait vaine. Le thésard lui fit la causette et Léon fut surpris de voir que cet élève connaissait l'article en question. Il avait même l'air de très bien le connaître. Il avait cependant l'air triste quand il en parlait, comme s'il était déçu de ne pas l'avoir écrit lui-même.
Au bout d'une demie-heure de conversation, Léon se rendit compte qu'il n'apprendrait rien d'utile de sa part ou du professeur même s'il lui en parlait. Le sujet était creux et il perdait son temps.
Léon s'excusa, laissa son numéro et demanda que le professeur le rappelle quand il en aurait l'occasion. Il fit quelques pas quand le jeune homme l'interpella : « Je vous ai dit que ces cultes se scarifiaient la gorge avec des pierres brûlantes ? »
Léon se retourna brusquement et le saisit par les épaules : « Dites-moi tout ce que vous savez sur eux, maintenant. »
*
Félix s'était remis à pleurer, envahi par le souvenir de sa rencontre avec la sphère. Les membres de son unité s'étaient tous rapprochés en cercle, un cercle dont il était le centre. Tous se mouvaient vers lui, attirés par l'étrangeté, l'horreur, l'irréalité de son récit, de cet objet qu'ils connaissaient tous maintenant et qui les terrifiaient tous.
VOUS LISEZ
La Sphère
TerrorLa sphère est un roman constitué de courtes scénettes qui dépeignent la rencontre de personnages que tout oppose mais qui gravitent tous autour d'une chose, la Sphère. Elle les appelle à elle et ils viennent tous, immanquablement. Découvrez chaque j...