Chapitre 27

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Écoutant ses mots et ses silences, Léon observait le visage d'Annabelle. Il était si heureux de la rencontrer. Elle l'avait emmené en voiture jusqu'à l'hôpital Sainte-Cécile. Léon fut pris en charge rapidement.

-Détective, vous vous mettez dans une situation dangereuse en suivant ces gens et ces choses.
-Je sais, répondit Léon. Mais qu'est-ce que j'ai d'autre comme choix ? Ils ont trop fait, trop pris. Ils m'ont pris Don.
-Don ?
-Mon mentor, le meilleur ami de mon père. C'est lui qui m'a appelé à l'aide, mais le temps que j'arrive, il avait déjà disparu.
-Je pense que votre ami, détective, préférerait que vous vous en arrêtiez là. Je pourrais vous dire qu'il n'est jamais trop tard pour se retirer, pour oublier, mais moi-même, je sais ce qu'il en est. Je sais que c'est faux, et qu'ici, ouvrir un œil c'est déjà trop.

Léon avait le cœur lourd. Pour la première fois depuis le début de son enquête, quelqu'un d'autre lui parlait de ces choses qui sévissaient, qui prenaient, tuaient. Il jeta un œil à ses pieds. Sous les ballerines d'Annabelle, aucun tentacule de noirceur ne se glissait en chuchotant. Cela lui fit même l'effet inverse, les tentacules semblaient s'arrêter devant elle. Léon se perdit dans la contemplation de cette balise qui chassait les ombres.

Quand cette image se superposa à celle d'un phare dont la lumière éloignait les navires des côtes, Léon sursauta.

-Restez concentré s'il vous plaît, détective.
-Pardon, Anna. Pourquoi étais-tu sur la plage ce soir-là ?
-Je vous ai vu venir la veille, je vous ai suivi depuis votre départ de chez mon père en Suisse.
-Pourquoi ?
-Eh bien, commença-t-elle, vous êtes la seule personne qui semble encore concernée par la disparition de mon père... Et celle de son journal.
-Vous gardez espoir ?
-Non, au contraire, je viens vous arrêter. Le journal, l'avez-vous découvert ?

Léon hésita un instant : « Non, pas encore », menti-il.

-Alors arrêtez-vous là. Ne les cherchez plus, ne les cherchez pas.

Interdit, Léon se couvrit de silence.

-Ai-je l'ombre d'une chance de vous empêcher de continuer votre enquête ?
-Je ne sais pas, sourit Léon. Ai-je l'ombre d'une chance de résoudre ce mystère, de les traîner devant la justice ?

Annabelle rit, surprise.

-Vous êtes bien plus idiot que ce que je pensais. La Justice ? Nous parlons de choses qui dévorent les sens, qui s'agitent dans vos rêves, transforment les jours en cauchemar. Vous pensez sérieusement qu'un tribunal vous aidera à les arrêter ? Non, il faudra les brûler. Les brûler jusqu'à ce qu'ils n'existent plus.

*

Ernest Bale... A quoi bon écrire le reste ?
30 Août X

Calculant les routes, focalisant toute mon âme dans mes cartes et mes tracés, je n'entendis d'abord pas EXXXila entrer dans mes quartiers. Il me dit plus tard qu'il n'avait pas frappé, mais je pense que je ne l'aurai pas entendu de toute façon. Je n'entends de toute façon que leurs voix.

Je mis du temps à lever les yeux alors même qu'il me parlait, alarmé. On me fit monter sur le pont, observer la tempête qui battait son plein et EXXila attira mon attention vers l'est.

Dans le ciel nocturne, dans l'immensité du brouillard céleste, une tâche, un trou dans la chape révélait le ciel profond et ses étoiles lointaines : l'œil du cyclone, le calme dans la tempête !

Nos étoiles, nos guides si merveilleux !

J'ordonnais le changement de cap vers cette étendue salvatrice tout en faisant noter au marin qui passait en courant à côté de moi les coordonnées de cet oasis en mer. J'observai par la fenêtre la mer à l'horizon. Je voyais des tombes à perte de vue jusqu'à ce qu'elles deviennent l'océan et je me demandai à quoi cet oasis pouvait bien faire référence. Je me demandai ce que cela faisait de voir au loin ce qui ne pouvait être qu'un mirage aux yeux d'un marin ?

La SphèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant