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Il fait jour, la vie reprend son cours.

Pendant que son beau-frère veillait au grain, Thierno s’était assoupi dans l’étroite guérite qui lui sert d’abri. Une demi-heure s’est écoulée depuis qu’il a ouvert les yeux. Il attend avec impatience l’arrivée du deuxième vigile. En effet, celui-ci doit, au préalable, prendre le relais avant qu’Albert et lui puissent rentrer chez eux.

De son côté, Adam a passé une très mauvaise nuit parce qu’il a vu ses chances de se marier avec Anissa s’amoindrir. Il s’est réveillé avec une folle envie d’avoir des rapports sexuels.

Il essaie donc de joindre Thierno à plusieurs reprises, mais celui-ci n’est pas d’humeur à lui parler. Il pense pendant un moment à réinstaller l’appli de rencontre où il a fait la connaissance de Thierno, mais finit par se désister. Il a l'intime conviction qu’aucun autre mec ne pourra le satisfaire comme son sexfriend. La seule alternative qui s’offre à lui est d’attendre que le sieur Gueye veuille bien lui répondre.

Comme d’habitude, Anissa se réveille aux aurores. Après avoir effectué sa prière, elle répète des phrases de motivation. Elle veut se donner du courage car elle a énormément de boulot qui l'attend.

Sans même prendre le temps d’avaler quelque chose pour le petit-déjeuner, elle monte dans sa voiture, direction : Les délices des Jaber.

Albert et Thierno sont rentrés au bercail. La tension entre la grande sœur et son petit-frère est palpable. Albert tente de détendre l’atmosphère pour renouer le dialogue entre eux, mais ni le frère, ni la sœur ne semblent prêts à faire la paix. Il décide donc de les laisser seuls pour aller prendre un bain, en espérant que la situation s’apaise. Cela fonctionne car un instant après, Dialika décide de prendre la parole.

─ Thierno !

─ Oui, répond faiblement le petit-frère.

─ Je n’ai pas aimé ton comportement d’hier. Je suis ta grande sœur. Quand je te dis quelque chose, c’est pour ton bien.

Elle marque une pause. Thierno garde la tête baissée. Elle boit un verre d’eau, puis reprend.

─ Tu t’es fâché parce que je t’ai dit que tu nous encombres. Pourtant, c’est un fait. Actuellement, je suis enceinte et…

─ Hein ? coupe Thierno.

─ Oui, je suis enceinte. Je l’ai appris récemment. Ça veut dire que tu auras bientôt une nièce ou un neveu à qui tu devras montrer l’exemple. Tu aimerais qu’il te trouve encore au chômage ?

─ J’avoue que non.

─ Il faut donc que tu travailles. Comme je t’ai dit la dernière fois, j’ai déposé ton CV et les entretiens vont se dérouler aujourd’hui. Ce n’est pas le boulot de tes rêves, mais il faut que tu commences à te prendre en charge.

─ J’ai compris.

Laissant Thierno dans une profonde introspection, Dialika se dirige vers la chambre conjugale. Elle y rejoint son époux qui semblait l’attendre.

─ Il a accepté ? demande-t-il.

─ Je pense. J’ai fait ce que tu m’as dit en lui révélant que je suis enceinte.

─ Très bien. Je ne pense pas qu’il va contribuer pour le trousseau du bébé, mais au moins, ça va lui remettre les idées en place. J’étais à deux doigts de le foutre à la rue, ce gros paresseux, avoue Albert.

─ Je sais que tu ne l’aimes pas. Mais, supporte-le encore quelques mois ! Je suis sûre que dès qu’il fera le premier pas, beaucoup de portes vont s’ouvrir à lui.

─ Je l’espère bien. J’en ai marre de le voir manger ma nourriture, gaspiller mon courant…

─ Oh bébé, arrête ! C’est bon ah !

Lorsqu’Anissa arrive au restaurant, elle voit déjà quelques candidats qui sont venus pour les entretiens d’embauche. En effet, ils attendent aux alentours. Certains sont même assis sur d'énormes pierres environnantes vu que le restaurant est fermé.

La gérante les salue, ouvre son commerce et les laisse s'y trouver une place.

Elle se dirige ensuite vers son bureau. Elle y reste pendant cinq heures avant de s’autoriser à prendre une pause.

Dès qu'elle sort de son espace de travail, elle constate que le nombre de candidats a triplé. Mais, jusque-là, aucun d’entre eux n’a été reçu.

─ Bonjour madame. On nous a dit de venir aujourd’hui pour les entretiens d’embauche. Moi, je suis arrivé ici à 5h45. Et depuis, je suis assis. On ne nous dit rien. C’est vrai qu’on a besoin de ce travail, mais ne vous foutez pas de nous ! hurle l’un d’entre eux très en colère.

─ Quel est votre prénom monsieur ? s'empresse de demander Anissa.

─ Yves.

─ Je suis vraiment désolée Yves...

─ Ce n'est pas lui seul qui a ce ressenti. On l'a tous. Vous aimez bien ça, vous les libanais-là ! On vous accueille dans notre pays et vous vous croyez supérieurs à nous, fait remarquer une autre postulante.

─ Je vous présente mes sincères excuses. Ne vous fâchez pas, s’il vous plaît ! Je vais appeler tout de suite celle qui est chargée des entretiens.

Au même moment, Bushra arrive. Anissa lui fait un signe de la main afin qu’elle la rejoigne.

─ Mais où est Maysân ? demande l’aînée.

─ Je croyais qu’elle était déjà là. Attends, je l’appelle.

─ Laisse tomber ! J’ai lancé son numéro, mais elle ne décroche pas.

─ Pfff ! Tu comprends maintenant pourquoi je ne la respecte pas ?

─ Bref, on parlera de ça plus tard. Je vais m’entretenir avec une partie des candidats et toi tu en feras de même avec les autres. Si on l’attend, elle risque de se pointer ici à minuit.

─ On peut leur dire de repasser un autre jour.

─ Ah non ! Ils sont déjà énervés et s’ils nous font une mauvaise pub sur les réseaux sociaux, on est foutus. Tu sais déjà que les libanais n’ont pas bonne réputation dans ce pays.

─ Tu as raison.

Anissa et Bushra se dirigent donc vers leurs bureaux respectifs et reçoivent au fur et à mesure les candidats. Quand bien même, ce n’est pas à elle de se charger des entretiens, Anissa joue son rôle à la perfection. Elle est agréable et cela permet de détendre les postulants, notamment ceux qui étaient en colère.

Il est temps pour elle de recevoir son dernier candidat. Lorsqu’il fait son entrée, elle le reconnaît directement car c’est celui dont le CV avait attiré l’attention de son amoureux.

─ Bonjour madame Jaber.

─ Bonjour monsieur Gueye. Veuillez-vous asseoir !

─ Merci.

─ Comment allez-vous ?

─ Bien.

Anissa l'observe durant une poignée de secondes.

─ Je vous sens un peu stressé. Détendez-vous hein ! Je ne mords pas, dit-elle avant de rigoler.

Thierno, quant à lui, garde une mine sereine et imperturbable.

─ Alors, vous avez candidaté pour le poste de serveur, n’est-ce pas ?

─ Quoi ?

─ Il y a un problème ?

─ N’y a-t-il pas mieux ? Regardez sur mon CV, j’ai un Master.

Tout à coup, le téléphone d’Anissa se met à sonner. Thierno qui est en face voit la photo d’Adam s’afficher sur l’écran de sa potentielle future patronne. Il écarquille les yeux.

Anissa, surprise par sa réaction, décroche l’appel de son chéri.

Mariage de couverture Où les histoires vivent. Découvrez maintenant