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C’est dimanche ! Le restaurant est fermé. Par conséquent, Thierno et Anissa décident de s’accorder une bonne grasse matinée. Mais, cette belle initiative va partir en fumée dès 6h30. En effet, Anissa s’est levée avec une forte envie de manger du calamar grillé. Elle fait part de son désir à son compagnon de lit qui refuse de se détacher de son oreiller si moelleux.

─ Allez Thierno ! Lève-toi, insiste la libanaise.

Son mari ouvre les yeux avant de la dévisager fortement. Elle soutient son regard sans se défiler.

─ Si t’as envie de manger du cala-je-ne-sais-quoi là, va t’en acheter ! réussit à dire Thierno encore groggy par le sommeil.

─ Je suis épuisée.

─ Bah moi aussi !

Thierno referme les yeux. Anissa le frappe spontanément avec son oreiller. Il fait aussitôt réapparaître ses pupilles.

─ Laisse-moi tranquille !

─ Non, je veux mon calamar grillé.

─ Où est-ce que je vais trouver ça un dimanche à une telle heure ?

─ Débrouille-toi !

Thierno s’assoit et fixe sévèrement Anissa.

─ Qu’est-ce qu’il y a ? demande celle qui a un regard de foudre dirigé tout droit vers elle.

─ Tu as le même comportement que ma sœur quand elle était enceinte. Elle avait souvent des envies bizarres.

─ Ah ! s’exclame Anissa un peu gênée.

─ J’espère que ce qu’on a fait le soir où j’étais soûl n’est pas en train de t'enceinter hein !

─ Et ça fait quoi si je tombe enceinte ?

Thierno se débarrasse de sa couverture étant donné que son érection matinale a disparu.

─ Anissa, si tu tombes enceinte, c’est pas bon du tout ! Un enfant, ça nous lierait à vie. Or, j’ai prévu de te quitter bientôt, reconnaît-il.

Anissa le tchipe¹.

¹: exprimer sa désapprobation avec quelqu'un en émettant un son avec sa bouche (tchrrr, tsuipss)

Il y a une pause d’une trentaine de secondes. Puis, Thierno décide de verbaliser la pensée qui lui taraude l’esprit.

─ Réfléchis bien s’il te plaît ! Tu es vraiment sûre que toi et moi, on a…

─ Eh Thierno, je vais te répéter ça combien de fois ? On a fait l’amour, on a baisé, on a ken, on a kiaba, hurle Anissa convaincue de son propre mensonge.

─ Pff ! Mais comment j’ai fait pour bander ? se chuchote l’ivoiro-sénégalais à lui-même.

─ Tu insinues quoi là ? Genre je suis tellement laide que t’aurais pas pu être excité par moi ?

─ Rien à voir. Je suis gay. Je ne suis excité par aucune femme.

─ C’est mieux pour toi parce que je suis une belle femme, en fait.

─ Bof ! lâche spontanément Thierno.

─ Hein ?

─ J’ai rien dit.

─ Tu as dit bof. Tu ne me trouves pas belle, c’est ça ?

Thierno hésite avant de répondre.

─ Honnêtement, pas trop, finit-il par avouer.

Anissa écarquille les yeux. Son égo en a pris un coup.

─ Ne m’adresse plus jamais la parole ! s’exclame-t-elle contrariée.

─ Désolé, j’ai pas voulu…

─ Ferme-là !

La libanaise sort en furie de la chambre avant de claquer la porte. Thierno qui s’en veut de l’avoir blessée se rhabille sur le champ. Il réfléchit un instant aux mots dont il pourrait faire usage afin de se faire pardonner. Par la suite, il sort de la chambre à son tour.

Le digne originaire de la terre de la Teranga surprend sa femme en train d’ouvrir la porte principale. Il pense qu’elle a l’intention de s’éclipser alors qu’elle ouvre juste à quelqu’un qui attend sur le pas de la porte. Il s’agit d’un livreur.

─ Bonjour madame, salue-t-il. J’ai un colis pour Anissa Jaber.

─ Oui, c’est moi, répond la concernée.

Le livreur lui remet un bouquet de roses avant s’en aller. Anissa rapproche son nez des fleurs. Elle ferme les yeux pour savourer leurs senteurs si délicates.

─ C’est de qui ? demande Thierno.

Anissa, sans prêter attention à l’homme avec qui elle partage la pièce, s’assoit dans l’un des fauteuils afin de lire le p’tit mot joint au cadeau.

Tu t’appelles Anissa,
Mais j’ai l’impression que ton nom c’est Marie Juana,
Car je n’arrive plus à me passer de toi.
Henri A.

La trentenaire trouve le message d’Henri tellement ridicule qu’elle hurle de rire. Thierno profite de sa bonne humeur pour lui présenter ses excuses. Elle le dévisage.

─ Tu sais, je m’en fous que tu me trouves moche. Il y a des hommes dehors qui me trouvent jolie au point de m’offrir des fleurs, répond-elle fièrement.

─ C’est cool.

─ C’est tout ce que t’as à dire ? Un homme offre des fleurs à ton épouse et toi tu trouves ça normal ?

─ Bah notre mariage n’est pas vraiment…

─ Je ne te parle pas de ça. En principe, en tant qu’homme, ça devrait un peu fouetter ton orgueil. Mon admirateur est clairement en train de te manquer de respect.

─ Pas grave.

Anissa souffle d’exaspération et sent à nouveau les fleurs pour s’apaiser. Thierno se rapproche du bouquet et une idée lui vient en tête.

─ Anissa, est-ce que tu peux me faire un p’tit prêt d’argent ?

─ N.O.N, ça veut dire sûrement pas.

─ Si tu m'octroies le prêt, je promets de te ramener du calamar, assure Thierno.

Anissa file récupérer son portefeuille et lui remet la somme d’argent qu’il souhaite.

─ Je vais déduire ça de ton salaire, n’oublie-t-elle pas de préciser.

L’ivoiro-sénégalais se rend dans la boutique dont le logo était affiché sur l'emballage du bouquet de fleurs. Il a de la chance car elle est ouverte. Il y trouve une jeune fille à qui il soumet sa requête.

Dès qu’il finit, il entame sa seconde mission : la recherche du calamar.

🐙🐙🐙

Après trois heures à parcourir les rues d’Abidjan, Thierno s’est rendu compte que le restaurant des Jaber n’est pas le seul commerce à fermer les dimanches. Vu qu’il n’a pas envie de décevoir Anissa, il se rend au port d’Abidjan en espérant y acheter du calamar qu’il compte cuisiner, lui-même, à la maison.

Au même moment, Gil-Loïc se réveille de sa grasse-mat'. Il aperçoit un bouquet de fleurs posé sur le chevet de son lit. Il interpelle la femme de ménage qui, à ce moment-là, passe devant sa porte.

─ Marisol, c’est toi qui a déposé ce bouquet ici ?

─ Oui, il y a un livreur qui me l’a remis pour vous. Comme je ne voulais pas vous réveiller, je l’ai juste mis là.

─ Merci.

Le wedding planner s’installe confortablement dans son lit pour découvrir le contenu de la carte.

Je n’ai jamais cessé de penser à toi.
Et maintenant que tu es de retour,
Je compte bien te récupérer.
Ton Titi

Mariage de couverture Où les histoires vivent. Découvrez maintenant