49

190 21 6
                                    

Depuis 24h, Thierno n’a pas eu de nouvelles de sa femme. Cependant, c’est clairement le cadet de ses soucis. Tout ce qui l’intéresse, c’est de savoir comment se réconcilier avec son Gillo. En effet, ce dernier refuse de le revoir. Le wedding planner voit en la grossesse d’Anissa un obstacle supplémentaire à sa relation amoureuse avec Thierno. Raison pour laquelle, il préfère ne plus donner suite à leur histoire.

Alors que personne ne s’en doute, Anissa s’est rendue toute seule à l’hôpital pour donner la vie. Elle veut faire croire à tout le monde que ses bébés sont prématurés. En effet, tous ceux à qui la libanaise a menti sont en retard de quelques mois par rapport au réel avancement de la grossesse. L’excuse du bébé né avant terme semble être la justification toute trouvée pour expliquer à ses contemporains pourquoi ses jumelles sont arrivées si tôt.

Anissa a choisi d’accoucher sous péridurale et cette décision se révèle hautement bénéfique pour elle. La future maman ne sent quasiment rien lors de l’accouchement. Elle avait diabolisé un moment qui, au final, se déroule sans soucis.

Les pleurs à répétition par-ci et les cris stridents par-là témoignent de la viabilité des filles d’Anissa. La nouvelle maman est aux anges. Même si elle est épuisée, elle trouve la force de prendre les deux merveilleuses créatures qu’elle a porté dans ses bras.

─ Madame Gueye, vous aimeriez qu’on appelle quelqu’un ? demande le seul maïeuticien de la bande.

─ Non, ça ira.

─ Vous n’avez pas un proche qui pourrait venir vous épauler un peu ? Vous avez quand même des jumelles.

─ Je vais m’en sortir.

Encore une fois, Thierno essaie désespérément de joindre Gil-Loïc. Or, ce dernier est aux côtés de Solène. En effet, la jeune femme vient de donner naissance à une fille.

Alors que la nouvelle maman se demande où est passé Henri, le concerné se trouve dans un maquis en train de manger du placali. « Ce n’est pas ma présence qui va accélérer le processus de toutes les façons » se dit-il en croquant son troisième morceau de crabe.

🦀🦀🦀

Après deux jours passés à l’hôpital qui lui ont permis de récupérer un tant soit peu, Anissa décide enfin de prévenir son époux.

─ Allô, j’ai accouché, annonce-t-elle de façon brusque.

─ Quoi ? Déjà ? Comment ça ?

─ Tu vas poser toutes tes questions après. Viens me chercher ! Je suis à la clinique là !

Suite à l'appel, monsieur Gueye se dépêche d'aller rejoindre sa femme.

Il croise Henri à l’entrée de la clinique. Les deux hommes se saluent rapidement.

─ Qu’est-ce que tu fais ici mon vieil ami ? questionne le mari de Solène.

─ Ma femme a accouché.

─ Anissa a accouché ? Félicitations.

─ Merci.

─ C’est elle que tu vas voir comme ça ?

─ Oui.

─ Je viens avec toi, s’impose Henri.

Il est aussi temps pour Solène de rentrer chez elle avec sa fille. Elle est déçue car elle attendait Henri qui n’a pas daigné pointer le bout de son nez.

Suivie de près par Gil-Loïc qui porte sa filleule dans ses bras, elle s’avance petit à petit vers la sortie. Puis là, coup de théâtre ! Elle croise son mari dans les couloirs de la clinique. Il porte un bébé dans ses bras. La nouvelle maman n’en croit pas ses yeux.

Lorsqu’il est allé voir Anissa avec Thierno, Henri s’est gentiment proposé de les accompagner en portant l’une des jumelles. À aucun moment, il n’a pensé à sa femme qui l’attendait dans une chambre à proximité.

─ Henri, ça fait une éternité que je t’attends. Tu fais quoi ici ? Et avec ce bébé en plus ? Tu t’es trompé ou quoi ?

─ Tu te souviens de Thierno, notre ami du lycée ? Il vient d’être père lui aussi. Je l’aidais juste.

─ Mais je m’en fous ! Tu crois que moi je n’avais pas besoin d’aide ?

─ Comme tu étais déjà avec Gil-Loïc, j’ai…

─ C’est bon. Tais-toi ! coupe Solène.

La jeune femme précipite ses pas, ralentit, puis se retourne.

─ Thierno, j’espère que tu n’as pas mal pris ce que j’ai dit, commence-t-elle. Félicitations à toi et à ta femme !

─ Merci Solène.

─ Gil-Loïc, on s’en va !

Avant d'obéir, le concerné se rapproche de Thierno.

─ Félicitations ! Je vous souhaite de former une belle petite famille. Moi, tu m'oublies définitivement, lui murmure-t-il avant de rejoindre son amie.

Anissa a suivi la scène avec une attention phénoménale. Il lui manquait juste du popcorn. Il ne lui faut pas un doctorat pour comprendre qu’entre son mari et son amant, il y a de l’eau dans le gaz. Les regards qu’ils s’échangeaient n’étaient pas très sereins. Certes, à l’instant T, ce fût palpitant à regarder, mais elle ne pense pas que cette situation va changer grand-chose à son quotidien.

🤷🏻‍♀️🤷🏻‍♀️🤷🏻‍♀️

Thierno expérimente le calvaire de ne plus pouvoir dormir jusqu’au petit matin. Les jumelles n'arrêtent pas de pleurer durant la nuit.

Il veut soulager sa femme, alors il prend la responsabilité de rester auprès d'elles. Anissa n’aurait pu imaginer meilleur partenaire. Il est d’un soutien à toute épreuve.

Anissa se réveille au cours de la nuit car le côté gauche de son lit est vide depuis un bon bout de temps. Elle s’est habituée à dormir en sentant une présence à ses côtés. Thierno et elle ne s’effleurent pratiquement pas. Mais l’énergie de son mari l’aide à dormir paisiblement sans qu’elle-même ne puisse expliquer pourquoi.

Éveillée depuis un quart d’heure, elle finit par rejoindre Thierno.

─ Laisse-moi t’aider, lui propose-t-elle.

Il accepte volontiers. Les deux filles pleuraient simultanément et il ne savait plus où donner de la tête.

─ C’est gentil de vouloir m’aider, mais il faut que tu te reposes, chuchote Thierno.

─ Je me suis assez reposée comme ça.

Les jumelles sanglotent de moins en moins. Certes, elles n’ont toujours pas fermé les yeux. Mais les cris ont cessé pour le plus grand bonheur des parents.

─ Nous étions tellement chargés qu’on n’a même pas pensé à comment on va les appeler. Pourtant, leur baptême, c’est dans quelques jours.

─ Moi, je veux qu’elles aient un prénom sénégalais.

─ Elles doivent aussi avoir un prénom libanais.

─ Donc pour chacune d’elles, on fera prénom sénégalais + prénom libanais.

─ On sait très bien qu’on ne va utiliser qu’un seul prénom au final. Vaut mieux ne pas charger l’extrait de naissance pour rien.

─ Tu as raison. Je propose qu'on donne le prénom sénégalais à l’une et l’autre va porter le prénom de chez toi.

─ Oui, c’est mieux ! Celle qui est dans mes bras va s’appeler Nawel.

─ Joli ! La mienne : Djinda.

Le couple installe les filles dans leurs berceaux respectifs. Miracle ! Elles sont toujours silencieuses.

─ Bonne nuit Djinda, bonne nuit Nawel ! murmure en chœur le couple.

Les filles se remettent à pleurer de plus belle.

─ Oh merde !

Mariage de couverture Où les histoires vivent. Découvrez maintenant