Mariage de couverture

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Thierno est quelque peu déconcerté par la requête d’Anissa. Il ne s’y attendait absolument pas. Il ne comprend pas pourquoi celle qui était sa patronne la veille veut faire de lui son époux aujourd’hui.

─ Madame Jaber, j’ai peur d’avoir mal compris…

─ Oh si, tu as bien compris. Et puis, vu que t’es mon futur mari, je t'autorise à m'appeler Anissa. Il faut bien qu'on soit crédibles auprès des gens.

─ Je pense qu’on devrait d’abord en discuter. On ne se marie pas comme ça sur un coup de tête.

─ Ma décision est prise et mûrement réfléchie. Adam était prêt à m’épouser et c’est à cause de toi que ça n’arrivera pas. Lui, il a fui. Toi, tu es là. C’est donc toi qui va payer.

Ce qu’Anissa ne dit pas, c’est qu’en réalité, elle cherche un père pour l’enfant qu’elle porte. En effet, elle nourrit la peur d’être mère célibataire, car cela est très mal vu par les siens. C’est la raison pour laquelle, elle désire se marier rapidement à un homme pour lui faire porter le fardeau de sa grossesse.

─ Maintenant, tu vas me présenter à tes parents, exige Anissa.

─ Madame…

─ Oh ! Appelle-moi Anissa, corrige la libanaise.

─ Anissa, je suis convaincu que c’est une mauvaise idée. Vous... Tu vas sûrement regretter ce choix. Et si tu prenais quelques jours pour y réfléchir ?

La patronne du restaurant se contente de lui montrer l’écran de son téléphone brisé avec un air menaçant. Thierno comprend qu’elle fait encore référence à la sextape et se résout à faire ce qu’elle demande.

C’est avec une mine serrée qu’il se rend avec Anissa dans la cour commune où il habite.

─ Tu te fâches comme si dans cette affaire, tu n’allais pas sortir un peu gagnant, fait remarquer la libanaise.

─ J’étais tranquille dans ma petite vie. Et là, tu veux carrément que je devienne ton mari. Je suis curieux de connaître la partie où je suis censé sortir gagnant de tout ça.

─ Tu approches de la trentaine, tu es célibataire et tu es gay. À un moment donné, il y allait avoir des soupçons sur ta sexualité. Reste à savoir même s'il n'y en a pas déjà. En m’épousant, ça te fait une belle couverture. Je te fais même un privilège d’accepter de me marier avec quelqu’un comme toi.

─ J’avais pour projet de rester célibataire.

─ Je m'en fous de tes projets.

Thierno soupire.

─ Anissa, tu es une belle femme. Tu as tout pour plaire. Bon nombre d’hommes rêveraient de t’épouser. Je ne sais pas pourquoi tu t’entêtes avec moi.

La libanaise est bel et bien consciente de ses atouts. Elle sait qu’elle peut avoir un autre homme en claquant des doigts. Toutefois, sa conscience la gronderait si elle attribuait la paternité de son enfant à un innocent. Or, vu qu’elle estime que Thierno est responsable de sa séparation avec Adam, elle a beaucoup moins de mal à lui faire ce sale coup.

L’ex petite-amie et l’ex sexfriend d’Adam arrivent dans la cour commune. Ils y trouvent Dialika qui est surprise de les voir. Elle les invite, au préalable, à s’installer dans le salon.

─ Eh madame, de la façon dont vous vous êtes déplacée jusqu’ici, j’espère que mon petit-frère n’a rien fait de grave hein !

─ Il n’a rien fait de grave. Thierno, je te laisse annoncer la bonne nouvelle à ta sœur.

Thierno se racle la gorge et fait l'effort d'avoir une mine un peu plus attrayante.

─ En fait, Dialika, c’est pour te dire que…que…

─ On va se marier, annonce Anissa.

─ Quoi ? hurle la femme d’Albert. Sérieusement ?

─ Oui. Ton frère et moi, on a craqué l’un pour l’autre. Donc, il a décidé de m’épouser le plus rapidement possible. N’est-ce pas Thierno ?

Ce dernier se contente de hocher la tête.

─ Je suis tellement contente. Je commençais à m’inquiéter pour lui vu qu’il ne m’a jamais présenté quelqu’un. Avec sa froideur légendaire, j’avais peur qu’il ne trouve personne.

─ Tu n’as plus à t’inquiéter ma belle. Je peux t’appeler comme ça non ?

─ Bien sûr ! À partir d’aujourd’hui, tu es ma belle-sœur chérie.

Les nouvelles belles-sœurs rigolent en se prenant dans les bras. Thierno, de son côté, souffle d’exaspération. Il se demande dans quoi il s’est embarqué.

─ J’ai une petite préoccupation, déclare Dialika. Je suis ravie pour votre union hein ! Mais je trouve ça un peu précipité. Thierno vient de commencer à travailler et il peine même à se nourrir. Or, l’organisation d’un mariage nécessite de grands moyens.

─ Ce n’est pas un problème. S’il le faut, je vais tout prendre en charge. Tout ce dont j’ai besoin, c’est que ton frère soit un bon mari et un bon père pour nos futurs enfants. N’est-ce pas Thierno ?

Ce dernier se contente de hocher la tête, une fois de plus.

Quelques minutes après, Albert qui revient du boulot, fait son apparition. Dialika l’accueille en lui annonçant la nouvelle. Il est choqué. Il l’est encore plus quand il remarque la présence d’Anissa. Il la reconnaît rapidement. Elle le reconnaît aussi et prend peur.

Le vigile se souvient de l’histoire qu’elle lui a raconté après avoir été chassée de la maison des Zouzoua. Il ne comprend donc pas ce retournement de situation. Il sait qu’il y a quelque chose qui cloche, mais il préfère garder tout ce qu’il sait pour lui. Il ne faudrait pas que cela ruine le projet de mariage entre Anissa et son beau-frère, d’autant plus que cela va lui permettre de quitter au plus vite sa maison. Il se dit qu’il aura le temps, plus tard, d’élucider le mystère.

Quand Anissa réalise qu’Albert ne mentionne guère leur rencontre chez les Zouzoua, elle est rassurée. Elle se demande s’il ne l’a pas reconnue ou si au contraire, il fait semblant de ne l’avoir jamais vue.

👀👀👀

Après avoir dormi durant toute la journée, Adam se réveille enfin. Titubant presque, il va rejoindre sa mère.

─ Bonjour maman.

─ Bonjour mon bébé. Tu es enfin réveillé. Tu ne devines pas qui est venue ici hier.

─ Qui ?

─ Anissa.

─ Ah ! Elle m'avait appelé. Mais je lui ai raccroché au nez. J’espère que tu lui as bien dit que j’ai quitté le pays.

─ Oui, c’est ce que je lui ai dit.

─ J’ai une haine démesurée à son encontre. À cause de la sextape qu’elle a, je suis obligé de me cacher ici.

─ J’ai cassé son téléphone. Elle n’a plus rien contre toi.

─ Elle m’a dit qu’elle l'a partagé à certaines personnes. Ça n’a servi à rien.

─ De toutes les façons, avec le temps, tout ça ne sera plus qu’une histoire ancienne. Tu pourras retrouver ta vie et passer à autre chose.

─ Je ne passerai pas à autre chose. Pas avant de m’être vengé. Tôt ou tard, cette garce va payer pour tout le mal qu’elle m’a fait.