Medhi vient d'être relâché pour bonne conduite. Cependant, il n'a personne pour l'accueillir à sa sortie de prison. Il est devenu une honte, un paria pour la majorité de ses proches. La seule personne qui aurait été présente pour lui se trouve dans un hôpital psychiatrique.
La dépression de Bushra a débouché sur une sorte de schizophrénie. La femme de Medhi commençait à délirer, à avoir des propos dénués de sens et certains comportements étranges. C'est à ce moment-là que ses parents ont jugé bon de la placer sous le contrôle avisé de spécialistes.
Après un trajet à regarder comment la ville a évolué, Medhi arrive chez sa belle-famille. Il a hâte de revoir ses enfants, de pouvoir les serrer dans ses bras.
Quand il se présente à eux, il fait face à un refus catégorique. En effet, Syrine refuse de s'approcher de lui ; et avec ses cheveux et sa barbe qui ont triplé de volume, Nabil ne le reconnaît même plus.
─ Syrine, ma chérie, c'est moi...ton papa chéri ! Pourquoi tu boudes ?
─ C'est à cause de toi que maman est chez les fous.
Medhi sent son cœur se déchirer en mille morceaux.
─ Tu croyais que tu allais sortir de prison après toutes ces années et qu'ils allaient te sauter dans les bras ?
L'ex-taulard se retourne.
─ Eh ! Maman...
─ Belle-maman, corrige Dame Jaber. Tu ne connais plus ta mère ?
L'homme fraîchement sorti de prison a un rictus. Il se sent extrêmement mal à l'aise, mais fait l'effort de ne pas le montrer.
Au même moment, Maysân fait son arrivée suivie de certains de ses cousins.
─ Tu ne t'es pas enfui de prison, j'espère, hurle-t-elle dès qu'elle aperçoit Medhi.
─ J'ai été libéré.
La cadette lâche un « hum » et se tourne vers sa mère.
─ Le notaire est arrivé ? demande-t-elle.
─ Oui. On n'attendait plus que vous. Venez !
Maysân et ses cousins suivent la chef de famille jusqu'au salon où ils s'installent. La deuxième fille des Jaber est surprise de voir une tête qui ne lui est pas du tout familière.
─ C'est qui lui ? chuchote-t-elle à l'une de ses tantes.
─ De qui tu parles ?
─ Le métis là !
─ Aucune idée. Mais s'il est là, ça veut dire que ton père l'a inclu dans son testament.
─ Hum ! Je me demande bien pourquoi.
Le notaire porte ses lunettes et sort des feuilles d'une chemise à rabat. Assis devant tout le monde, il parcourt le salon en posant son regard sur chaque personne.
─ Madame Jaber, où sont vos deux autres filles ? finit-il par demander.
─ Elles ne seront pas là.
─ Bien. On va commencer alors !
À l'issue de la lecture testamentaire, les membres de la famille apprennent avec stupéfaction que feu Papa Jaber avait un enfant adultérin.
La femme qu'il a laissée veuve est anéantie. La fille qu'il a laissée orpheline n'arrête pas de se demander comment il a pu garder un tel secret durant si longtemps. Ses petits-enfants qu'il a laissés sans repère sont loin d'imaginer la bombe qui vient d'exploser dans leur famille.
Même s'il s'y attendait, Drissa affiche un air gêné car il est pointé du doigt comme une bête de foire. Au fond de lui, il est plutôt satisfait de voir leurs mines se décomposer. Il pense qu'ils devraient s'estimer heureux car ils n'ont pas vécu le quart de ce qu'il a enduré.
Après la révélation du contenu du testament, Maysân a pris la direction de la maison d'Anissa. Elle veut être la première à lui faire part de la nouvelle à laquelle personne ne s'attendait.
─ Ma grande sœur, lève-toi oh ! Le gbairai est lourd !¹
¹: J'ai un énorme potin pour toi !
Anissa qui prévoyait de rester toute la matinée dans son lit déduit qu'elle sera obligée de se coltiner une longue conversation abrutissante.
─ Maysân, ça fait juste un mois et demi que papa est décédé, et tu es là à crier, à parler de gbairai...
─ Ce n'est pas parce que je ne passe pas des journées maussades dans mon lit que je ne suis pas triste. Chacune de nous gère son deuil différemment.
─ Bon, tu voulais me parler de quoi ?
─ C'est bon, tu m'as refroidie, ment Maysân. Bye !
─ Non attends... Je suis désolée.
La cadette se force à ne pas sourire et repositionne son foulard correctement.
─ Est-ce que tu sais que papa a eu un garçon avant toi ?
─ Quoi ?
─ Eh oui, ma chère ! Il trompait maman.
─ Comment tu sais ça ?
─ Il fallait venir lors de la lecture du testament. Son premier fils était assis gaillardement parmi nous pour écouter ce que son géniteur lui a laissé.
Anissa s'assoit subitement.
─ C'est pas vrai, s'exclame-t-elle !
─ C'est vrai oh !
─ Et papa lui a laissé quelque chose ?
─ Oui, le restaurant qui est en construction à l'intérieur du pays, informe Maysân d'un air dédaigneux.
─ Ça, c'est hors de question ! s'époumone l'aînée. Nous sommes ses filles légitimes. Ce bâtard n'aura rien !
─ Ah, je te reconnais enfin !
Sur le trajet pour l'hôpital psychiatrique, Medhi a des appréhensions. Il ne sait pas dans quel état il va retrouver sa femme et cela l'inquiète. Quand il a appris qu'elle a été internée, il a beaucoup culpabilisé. Personne n'a été obligé de lui dire que c'était de sa faute pour qu'il le devine.
De cet endroit dit pour les fous, se dégage une atmosphère bien particulière. Medhi l'a ressenti dès qu'il y a mis les pieds. Il n'aurait jamais cru fouler les portes d'un asile psychiatrique et encore moins pour y voir Bushra, cette femme qui n'avait de fou que son amour pour lui. Ah ! Qu'est-ce qu'il s'en veut de lui avoir causé tant de chagrin !
Quand il revoit enfin sa femme, l'ex-taulard laisse échapper quelques larmes car elle est amaigrie. La femme dont il célébrait les rondeurs a, aujourd'hui, la peau sur les os. C'est la première fois que les clavicules de Bushra sont aussi apparentes. Medhi nettoie rapidement ses larmes vu qu'il ne veut pas lui communiquer sa tristesse.
─ Coucou Bushra. C'est moi, Medhi...
─ Medhi ?
─ Oui, tu me reconnais, n'est-ce pas ?
─ Medhi ?
─ Oui, c'est moi, mon amour.
─ Medhi ?
L'internée répètera le même prénom durant tout leur échange.
Ravi d'avoir pu revoir la mère de ses enfants, Medhi est, toutefois, remonté à bloc contre l'hôpital. Il se plaint de la trop grande perte de poids de sa femme. Une infirmière lui répond dans le plus grand des calmes que c'est ainsi que la folie s'échappe.

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Mariage de couverture
RomansaC'est l'histoire de l'union entre une hétéro et un homo. Généralement, c'est le gay qui se sert d'une femme afin de cacher sa sexualité. Mais, dans ce récit, c'est la non-gay qui utilise le non-hétéro pour se couvrir. Mais de quoi ? Lisez donc pour...