Chapitre 28-1

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*Convent de Sabrina Northman

Postés devant les marches, nous attendions depuis au moins trois bonnes minutes dans un silence abrutissant. Cyanna m'avait rejointe dès l'ouverture du panneau et depuis nous étions plantés là comme des statues de sel. La nouvelle force que je sentais grandir en moi, me poussait en avant et c'est avant tout pour cela que je résistais. J'avais peur. J'avais peur et cela ne m'était pas arrivé depuis très longtemps. Je me rendais compte que la douleur et la colère avaient supplanté tout le reste depuis un moment déjà, ne laissant presque qu'une coquille vide. Mais surtout j'avais peur de cette compulsion inexpliquée, de ces souvenirs flash, de cet endroit, de l'avenir, de tout...

— On fait quoi ? me demanda Cyanna. On monte, ou on redescend ?

Monte !

La compulsion m'arracha une grimace et je portai machinalement la main à ma tempe.

— ça recommence ? s'inquiéta-t-elle en s'approchant d'un pas, main tendue dans ma direction.

Je me contentai de maugréer faiblement en secouant la tête, avant de m'engager d'un pas hésitant sur la première marche ascendante.

— River, tu dois m'expliquer ce qu'il se passe !

— Et pourquoi ça, au juste ?! aboyai-je aussitôt en me tournant vers elle. Parce que toi, tu m'as tout expliqué peut-être ?

— Tout ce dont je me souvenais, oui.

— Après combien de demande de ma part ? partis-je d'un rire sans joie. De toute manière tu sais ce qu'il se passe, je te l'ai déjà dit.

— Là, ça avait l'air... différent.

— Comment peux-tu le savoir ?! crachai-je en grimpant une marche supplémentaire.

La jeune femme ne me répondit pas et me suivi en silence. L'escalier tournait sur lui-même et nous atteignîmes un nouveau palier assez rapidement. Nouvelles veilleuses, nouveau mur lisse, presque aucune différence avec le palier d'en dessous. Je ne sais pourquoi, cela me fit une drôle d'impression. L'impression oppressante et débilitante de tourner en rond, sans fin ni...

— Ouverture, prononçai-je d'une voix rauque, empêchant mon esprit de dériver vers les zones sombres dont il avait le secret en ce moment.

Un pan de mur coulissa de nouveau, pour cette fois, laisser apparaitre une porte. Une simple porte en bois avec une poignée banale en laiton.

— C'est moi ou c'est vraiment surréaliste, murmura Cyanna dans mon dos.

— Non, ce n'est pas toi, je t'assure, marmonnai-je de nouveau en posant la main sur la poignée.

Contrairement à mes craintes, rien ne se passa. La clenche tourna sans difficulté et nous nous retrouvâmes dans un couloir vieillot, sur le pas d'une porte entouré de deux guéridons surmontés d'une lampe et...

— Attends, je suis déjà venu ici !

— Comment ça ?

— Lorsque Magnus m'a accompagné jusqu'au bureau de la vielle mégère, c'était la même porte et les mêmes meubles...

— Tu dois te tromper...

Non

— Je ne me trompe pas, affirmai-je d'une voix sans doute peu convaincante, qui suintait le doute et l'incompréhension.

Je fis quelques pas dans le couloir, partant machinalement à gauche, comme guidé par un GPS invisible. Le bruit de nos pas, étouffés par l'épaisse moquette bordeaux, rendait l'atmosphère lourde et étrange et renforçait le malaise qui ne cessait de croitre à mesure que nous avancions. Nous n'avions parcouru que quelques mètres lorsque je m'arrêtai devant une nouvelle porte en bois, identique à la précédente.

Insurrection- Elémental Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant