Insurrection- Elémental Tome 2

Chapitre 30-2

Je me remis debout et en boitillant légèrement m'approchai du lit de Liv, Carla sur mes talons. Toujours inconsciente, la jeune femme paraissait presque irréelle. L'image de son cadavre ne cessait de s'imprimer sur mes rétines comme un vieux souvenir cauchemardesque en technicolor. Secouant la tête pour essayer d'en chasser ces réminiscences cauchemardesques, je rabattis la couverture au pieds du lit avant de retirer la perfusion plantée dans son bras.

— Qu'est-ce que vous faites ?! s'alarma Phoebe.

— À votre avis ?! répondis-je d'un ton peu amène, un peu lassé des questions idiotes.

— Mais elle est blessée...

— Blessée ou non, vous pensiez vraiment que j'allais la laisser là ?! grinçai-je entre mes dents en hissant la jeune femme sur mon épaule.

— Vous êtes blessé, laissez-moi faire, intervint Georges en se dégageant un peu sèchement de la prise de sa femme. Je peux la porter, me dit-il d'une voix douce en tendant les bras dans ma direction.

Sans trop hésiter, j'acceptai sa proposition, un peu surpris mais soulagé qu'il me l'ait proposer. Parcourant la pièce du regard une dernière fois, j'allais récupérer deux autres seringues et le scalpel dans l'œil de la louve, avant de le fourrer sans ménagement dans la main de Carla qui frémit de dégout mais ne dit rien. Je fis de même avec Phoebe et Ethan leur tendant chacun une seringue.

— Qu'est-ce que vous voulez que l'on fasse avec ça ! me balança Ethan d'un ton hautain.

— Vous défendre ?! lui balançai-je sur un ton saturé de sarcasme. A moins que tu ne comptes sur moi pour te sauver les miches à chaque fois ?!

Le jeune homme pinça la bouche mais ne dit rien, se contentant de me foudroyer d'un regard noir tandis qu'il acceptait enfin l'arme de fortune à contrecœur.

— C'est sûr que ça fera une différence, maugréa-t-il. Elle est vide.

— Ce n'est pas pour injecter quelque chose que je te l'ai donné ! C'est pour que tu la plantes dans l'œil de ton agresseur. Comme tu as pu le constater par toi-même, c'est plutôt efficace !

Le regard d'Ethan dériva vers le cadavre et je le vis, avec délectation, devenir lentement verdâtre. J'espérai que cela lui mettrait un peu de plomb dans le crâne. Ce petit con commençait sérieusement à me taper sur le système !

Essayant de cacher mon épuisement et ma douleur, j'avançai sans boiter jusqu'à la porte. Au-delà, un couloir sombre, des boiseries de la moquette et des veilleuses de sécurité qui me rappelèrent douloureusement quelque chose. Un frisson me parcourut lorsque je posai un pied hors de la pièce. Comme une superstition, un mauvais pressentiment, qui se renforça lorsque je partis à droite. Rien à voir avec les flashs ou les indications précise ressentis durant mon bad trip, pourtant l'alarme silencieuse résonnant dans ma poitrine semblait s'accentuer à chaque pas supplémentaire dans la mauvaise direction. Me sentant presque obligé, je fis demi-tour pour partir vers la gauche, manquant m'emplafonner Ethan qui me collait au train.

— Pourquoi vous changez de direction ?! C'est par-là qu'on est arrivé !

— Oui mais ce n'est pas par-là que nous devons repartir

— Vous avez vu quelques chose ?! me demanda-t-il aussitôt d'une voix tout de suite moins assuré en essayant de distinguer quelque chose dans la pénombre derrière moi.

Vu sa fébrilité, j'avais presque envie de lui dire oui pour voir sa tête. On se détendait comme on pouvait. Nous repartîmes donc dans l'autre sens et cette fois aucune alarme interne ne se déclencha. Pourtant elle aurait dû ! Car vingt minutes plus tard nous n'avions peut-être croisés personne mais aucune sortie non plus. Seulement un couloir interminable, des portes verrouillées et des guéridons. Soit les sorcières portaient un amour particulier aux guéridons en acajou et aux lampes en verre, soit elles avaient eu un prix de gros ! Mais entre chaque porte fermée, nous retrouvions un de ces fichus meubles surmonté de lampes identiques. Identique à tel point que lorsque nous arrivâmes enfin au bout du couloir, je savais que de la magie était à l'œuvre.