Chapitre 16-2

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— Les humains ne devraient pas être au courant de ce genre de chose, assena l'homme de sa voix pontifiante dès que le battant se fut refermé dans un claquement sec.

— Dit celui qui vient de faire de la magie juste devant leur nez ! grinçai-je, toujours prisonnier du filet invisible.

— La situation l'imposait. Je vous relâche si vous me promettez de me suivre sans faire d'histoire.

— Parce que j'ai le choix maintenant ?! ricanai-je, tout en levant ma main en signe d'assentiment.

Je ne comptais pas me rendre si facilement mais provoquer un esclandre maintenant aurait été idiot. Le mieux était de le suivre et d'engranger le plus d'informations possible avant de pouvoir fomenter un plan viable pour tous nous sortir de là en un seul morceau. Le lasso invisible se desserra et je retrouvai ma pleine amplitude de mouvement sous l'œil méfiant et acéré de mon compagnon de couloir. Sans un mot de plus, il me fit signe d'avancer, n'ouvrant la bouche que pour m'indiquer la direction à suivre.

L'étrange sensation éprouvé dans le jardin se prolongeait ici, m'embrumant subtilement l'esprit. Une illusion était à l'œuvre. Plus sophistiquée que les sorts de camouflages des refuges et presque indétectable, elle rendait le couloir dans lequel nous nous trouvions, interminable et tentaculaire. Je ne m'en serais peut-être pas rendu compte si je n'avais pas vu l'extérieur de la maison, dans laquelle, un couloir de cette taille ne pouvait pas exister.

Nous finîmes par nous arrêter devant une porte en bois sculpté, encadrée de deux guéridons laqués supportant deux lampes Tiffany magnifiques et sans doute hors de prix.

— Ouvrez, m'ordonna l'homme d'une voix de robot en se postant dans mon dos, empêchant toute retraite de ma part.

Je m'exécutai, étrangement calme. La porte ouvrait sur un bureau dont trois des murs étaient intégralement tapissés de bibliothèques. Le dernier, celui faisant face à la porte, était percé d'une immense fenêtre ouvragée donnant sur le jardin. La femme de l'entrée était assise derrière un beau bureau en ronce de noyer, flanqué de deux chaises, dans lesquels elle m'invita à m'assoir d'un geste de la main. Mon garde toujours au basque, je m'avançai sur le tapis moelleux, finissant par me retourner et fusiller l'homme du regard.

— C'est parce que vous en pincez pour moi que vous me collez autant ?

L'homme devint rouge tomate et je sus comment l'énerver à peu de frais. L'humour et la provoc étaient utiles parfois pour déstabiliser l'adversaire et découvrir ses éventuelles failles. Lui, apparemment, n'avait aucun humour.

— Magnus, tu peux nous laisser.

—Magnus, sérieux ?! ne pus-je m'empêcher de commenter dans un ricanement.

Même son nom était une blague. Ce type était un cliché à lui tout seul. Un seul regard de la femme suffit à lui faire tourner les talons malgré son envie évidente de m'arracher la tête.

— Asseyez-vous me demanda-t-elle poliment, ses mains croisées devant elle sur le sous-main bordeaux décorés de runes complexe, recouvrant le plateau en bois.

Je m'exécutai, me sentant étrangement déplacé, en jogging, sur le velours délicat de la chaise stylisé.

— Votre propension à énerver les gens est naturelle ou c'est un art que vous cultivez ?

— À votre avis ?! C'est pour ce genre de questions passionnantes que vous m'avez trainé dans votre... bureau ?

Seul un sourire étira ses lèvres alors qu'elle se contentait de me fixer sans me répondre. En même temps, ma pique n'en attendait pas.

Insurrection- Elémental Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant