Insurrection- Elémental Tome 2

Chapitre 13-1

*Village de Johnson

La première fournée de cookies sortait du four, lorsque Johnson passa la porte d'entrée.

— A quoi ça sert de nous donner les clefs si tout le monde entre ici comme dans un moulin ?! attaqua aussitôt Jude dont la patience, déjà pas légendaire, semblait s'effriter de minute en minute.

Le militaire, toujours en treillis, marqua un temps d'arrêt face à cet accueil glacial. Il nous fixa quelques secondes, ses yeux s'éclairant brièvement en passant sur la plaque à pâtisserie. Puis après avoir croisé le regard noir de Jude, il entreprit de délasser ses rangers, les yeux rivés sur le paillasson. Surpris par son attitude, je me tournais vers Thomas qui observait notre hôte d'un regard étrangement concentré.

Son comportement était étonnant pour un humain. Il savait que nous étions des métamorphes, et chez nous, il n'y avait pas d'histoire de dominance. Non, ça c'était chez les loup-garou ... censés avoir disparu depuis des siècles et dont l'existence était toujours ignoré des humains... à moins que...

L'adrénaline qui enflamma mes veines me fit presque chanceler et je senti la main de Worth se crisper sur mon épaule lorsque mes émotions lui parvinrent. Je connaissais des loup-garou, j'en appréciai même certains. Si Johnson en avait été un, je l'aurais tout de suite su et j'étais presque certaine qu'il était cent pour cent humain. Mais son attitude corporelle et l'inquiétude qui suintait de tous ses pores ne trompaient pas. Il avait peur de quelque chose et ce n'était très clairement pas de nous.

— J'ai simplement pensé que vous pourriez dormir et je ne voulais pas vous déranger en frappant à la porte, répondit-il, une fois en chaussette, en évitant toujours le regard de Jude.

— Vous savez, vous pouvez le regarder dans les yeux, ce n'est pas un loup.

A la remarque de Thomas ses épaules se crispèrent et je sus que nous avions vu juste.

— Et même si j'étais un loup, il ne se passerait rien, ajouta Jude. Nous, les métamorphes, nous sommes plus civilisés, ricana-t-il en volant un des biscuits encore fumant. Bon alors, qui est le loup-garou ?

Johnson releva le tête si vite que je cru qu'il s'était fait mal à la nuque. Il nous fixa tous à tour de rôle, incrédule, visiblement à court de mots.

— Les loups-garous... ça n'existe pas...

La combinaison d'interrogation, de doute et d'espoir, fit sonner étrangement sa phrase au milieu du silence à peine troublé par le ronronnement du four qui attendait, imperturbable, sa prochaine fournée de pâtisseries.

— De quoi avez-vous peur, dans ce cas ? lui demanda Thomas avec toute la douceur dont-il était capable.

Johnson le dévisagea quelques instants, comme s'il chercher à savoir qui il était.

— Je m'appelle Thomas, c'était moi le loup, expliqua-t-il avec un bref sourire tout en dents qui fit ricaner Jude.

Johnson déglutit.

— Je... je sais ce que vous êtes mais...

— L'appréhender en direct, ce n'est pas pareil, termina Jude à sa place.

Johnson confirma d'un bref hochement de tête suivit d'un petit sourire contrit à l'adresse de Thomas. Plusieurs questions me brulaient les lèvres, maintenant qu'une idée plus précise du problème se formait dans mon esprit.

— Tout à l'heure, dans la forêt, vous m'avez dit que votre sœur avait été attaquée, que s'est-il passé ?

Johnson, mal à l'aise se dandinait d'un pied sur l'autre, toujours en chaussettes sur le carrelage froid de l'entrée et je me rendis compte que nous le traitions comme un étranger dans sa propre maison.