Chapitre 9-2

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Tendus, nous cheminions en silence, évitant les brindilles et les branches basses qui auraient pu signaler notre présence. Johnson ouvrait la marche, sa démarche nerveuse mais néanmoins discrète trahissant son anxiété. Aux aguets, il scrutait chaque centimètre carré du sous-bois, sursautant au moindre son. Au bout de dix minutes, il bifurqua soudain vers la gauche, nous amenant sur les abords herbeux d'une petite route de campagne. Nous la traversâmes au pas de courses pour rejoindre l'autre côté du bois où nous attendait un véhicule de l'armée, dissimulé sous une futaies.

Johnson ouvrit aussitôt la portière conducteur et récupéra les clefs glissées dans le pare-soleil. Puis il revint vers l'arrière du véhicule bâché dont il souleva un coin de toile qu'il fixa sur le côté avant de prendre quelque chose sous l'un des bancs. A crans, nous réagîmes tous en une fraction de seconde et le militaire se retrouva avec mon couteau sous la gorge et deux canons de fusils braqués sur lui.

— Ola, on se calme, ce ne sont que des vêtements, bredouilla-t-il en exhibant maladroitement le baluchon informe pendant de sa main droite.

— La prochaine fois, préviens avant de faire un truc aussi stupide ! lui asséna Jude au comble de l'agacement.

Le cœur battant la chamade, je relâchai le jeune homme qui me fixait d'un regard où se mêlait peur et admiration.

— Vous êtes rapide, me dit-il en s'éloignant malgré tout de quelques pas.

— Et encore, elle n'est qu'à un quart de ses capacités, balança Gabriel d'un ton d'avertissement tandis qu'il baissait son arme sans pour autant la lâcher.

La tension était palpable dans la petite clairière et la suspicion planait des deux côtés. Nous nous mesurâmes du regard durant quelques secondes, avant que Johnson ne finisse par baisser les yeux et commence à sortir les vêtements du sac.

— Tenez, dit-il en balançant une tenue militaire similaire à la sienne en direction de Worth. Si nous voulons donner le change, vous allez devoir mettre ça et monter à l'avant avec moi.

— Pourquoi moi ? demanda l'intéressé tout en défroissant la veste dans un claquement sec.

— Vous avez la même corpulence que mon collègue et la même couleur de cheveux. Dans la pénombre et avec une casquette, ils n'y verront que du feu.

— Attendez ! Vous comptez nous faire traverser un barrage ?!

— Vous voyez une autre solution ? Toutes les routes sont bloquées autour de la mine et ils ne sont pas près de lever le camp. Ils comptent bien vous mettre la main dessus.

L'hostilité monta d'un cran, pourtant personne ne dit rien. Le sentiment que nous courrions tout droit à la catastrophe ne cessait d'enfler et d'activer toutes mes défenses. Pourtant je regardai Gabriel s'éloigner pour se changer d'un œil résigné. Que pouvions nous faire d'autres ?

— Tiens, reprit Johnson en tendant le sac à Leah qui recula nerveusement d'un pas dans ma direction. C'est mon survêtement de rechange. Il risque d'être un peu grand mais au moins, tu seras au chaud. Il est propre, ajouta-t-il au bout de quelques secondes, le sac toujours tendu entre lui et la jeune fille.

Discrètement, j'incitai Leah à accepter en la poussant doucement dans le dos. Le geste était gentil et désintéressé et nous avions tous besoin que la tension retombe un minimum avant les risques inconsidérés qui se profilaient à l'horizon. La jeune fille finit par prendre le sac d'une main hésitante et Johnson l'invita à monter à l'arrière du véhicule, dont il rabattit la toile, pour se changer. Gabriel revint pile à cet instant, l'uniforme lui seyant parfaitement.

Insurrection- Elémental Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant