Chapitre 8 : Incompréhension

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Dr Proust : Monsieur Marquand ? Monsieur Marquand !
  Ses yeux s'ouvrent lentement. D'abord le gauche, puis le droit. Il voit flou, sa respiration est saccadée, il ne parvient pas à prononcer un mot. Il fait signe au docteur qu'il ne peut pas user de sa voix — ses douleurs étant trop fortes — et ses yeux se posent sur une veste qui ressemble étrangement à celle d'Alice. Incapable de parler, il montre la veste de son index tremblant.
Dr Proust : Qu'est-ce que vous avez vu... Ah, oui, votre... Madame Nevers est passée. Enfin, elle est restée auprès de vous toute la nuit, vous voudrez bien la voir ? Je pense qu'elle sera heureuse, je n'ai pas été capable de la consoler hier soir tant ses larmes ont coulé.
  Marquand regarde ailleurs. Il ne sait pas comment il va réagir en la voyant, cela pourrait peut-être l'endommager. Et l'aimera-t-elle dans cet état ? Si fragilisé par la suite de ses blessures ? Il fait non de la tête puis souffrant le martyr, immobilise sa tête pour faire "non" avec son index.
Dr Proust : Vous ne voulez pas la voir ? Cela m'étonne. La photo que vous aviez sur vous, c'est bien elle ? Bougez la main droite pour "oui" et gauche pour "non".
  Évidemment, sa main droite se lève.
Dr Proust : Étonnant. Je peux vous dire que la seule femme que j'ai vu dans cet état-là, c'était parce qu'elle était forcée d'avorter et tenait à son enfant plus qu'à tout. Mais cette femme qui est venue hier, jamais je n'en ai croisé une de la même espèce !
  Le sourire qu'affiche Marquand sur ses lèvres est des plus sincères : c'est tout de suite ce qui l'avait attiré chez elle, après son regard hypnotisant, doux et bienveillant.

  Des bruits de pas se font entendre dans le couloir, Marquand les connaît par cœur, il fait signe au doc avec ses yeux et celui-ci comprend, il sort et ferme la porte. Alice arrive, un verre de chocolat chaud à la main.
Dr Proust : Ah, Madame Nevers. Vous allez mieux ?
  Ne se préoccupant nullement de son état mais plutôt de celui de Marquand, elle répond par une question.
Alice : Il est réveillé ?
Dr Proust : Non, mais vous, vous avez le teint bien pâle... Venez avec moi.
Alice : Ça ira, merci docteur.
Dr Proust : Ce n'était pas une question.
  Il l'emmène de force et bientôt, elle suit sans dire mot. Des heures de fatigue à rattraper, des insomnies à répétition, négligence de l'alimentation...
Dr Proust : Ce que vous nous faites là, c'est pas rien !
  Mais ses pensées sont ailleurs. Elle a fait un cauchemar en dormant dans cet hôpital et ne pense qu'à cela : s'il venait à mourir ?
Dr Proust : Madame. Vous êtes là ?
Alice : ...Oui.
Dr Proust : Rentrez chez vous et reposez-vous. Alimentez-vous, beaucoup négligent cette règle de survie hors c'est l'une des plus importantes.
  Alice ne manque pas de tomber, il la rattrape vivement. Ses yeux sont mi-clos. Le téléphone de la juge vibre, le docteur la dépose délicatement sur un lit disponible avant de répondre à l'appel.

[Conversation téléphonique]

Dr Proust : Vous êtes un proche ?
Romance : Je peux parler à Alice s'il vous plaît ?
Dr Proust : Non.
Romance : Qui êtes-vous ?
Dr Proust : On continue de jouer aux devinettes ou vous me rentrez l'adresse de l'hôpital Tenon dans votre GPS ?! Je suis chirurgien et Madame Nevers est en mauvais état ! Magnez-vous !
[FIN]

  Il raccroche, fier de lui. Son humour lui avait toujours valu le titre de Docteur House.

  À la Brigade, Victor tente par monts et par vaux d'appeler Alice, mais rien.
Léa traverse le couloir, elle veut s'entretenir avec Chahine. Elle pénètre dans son bureau et ne lui laisse pas le choix d'accepter ou non sa visite.
Léa : Pourquoi vous ne m'avez pas prévenue pour la mission ?
Dr Chahine : Mademoiselle Delcourt, ce n'est vraiment pas le moment. J'ai une opération dans douze minutes, un accouchement dans trois à cause de l'absence d'un collègue...
  Quand elle ferme à clé, il comprend que c'est urgent.
Léa : Vous y êtes pour quelque chose dans l'affaire à propos du lieutenant Diacouné ?
Dr Chahine : Quoi ? Je n'ai pas le temps pour toutes ces choses... Mon travail m'attend.
Léa : Répondez !
Dr Chahine : Mais je ne le connais que de nom, cet homme !
Léa : C'est bon. Sortez.
  Elle lui ouvre et reste dans son bureau ; il n'y fait pas attention. Elle fouille les tiroirs et tente de trouver des dossiers. Celui qu'elle cherche est en sa possession, elle l'emmène avec elle avant d'apercevoir un tas de médecins en train de se précipiter vers une chambre...
  Des cris, des pleurs, des larmes, un mélange d'extrême douleur : cela donne des hauts de cœur à Léa, qui n'a jamais apprécié les hôpitaux. Elle sent un parfum qui lui est familier. Très sensible aux odeurs, elle la suit et entend, sans le vouloir :
Infirmier : Et celui de la huit ? Tu lui as apporté le plateau ?
Brancardier : Non, mais Magalie est chargée de le faire des chambres quatre à huit.
Infirmier : Ça va être mal vu par le chef de service... Surtout que Proust ne plaisante pas avec ça. Et tu sais le pire ?
Brancardier : Ça va, j'ai compris que je n'allais pas faire long feu dans cet hôpital.
Infirmier : Raté. Le pire c'est que c'est un commandant de police.
Brancardier : Chambre huit tu dis...? C'est par là ?
Infirmier : Tout droit et au bout, à gauche.
Brancardier : Merci !
  Léa le suit discrètement, elle veut découvrir l'identité de son confrère qui a été blessé.
Elle attend que l'infirmier s'en aille et fait mine de pleurer en se cachant le visage, puis elle entre furtivement et referme derrière elle. Marquand est si surpris qu'il garde les yeux grands ouverts.
Léa : Fred ? Mais qu'est-ce que tu fais là ?
  Il lui fait comprendre qu'il ne peut pas bouger. Elle est soudain attentionnée envers lui.
Léa : Tu veux que je t'aide à manger ?
  Profitant de sa présence, Marquand lui montre le panneau affiché au-dessous de la télé :
« Main droite pour oui et gauche pour non ».
  Il lève la main droite et s'actionne.

Alice Nevers, juge d'instructionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant