Chapitre 19 : Mots

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  Il prend le courrier et retourne chez lui. Il ôte son manteau, le dépose sur le dossier d'une chaise en bois sur laquelle il s'assied ensuite. Ses membres le font souffrir, sa solitude n'arrange pas les choses. Pour ne pas sombrer dans la dépression et se souvenir qu'il a une famille, Jacques Nevers s'empare de l'album photo.
Après avoir feuilleté quelques pages et avoir eu les larmes aux yeux en revoyant Alice aux côtés de sa femme, il reporte son intérêt sur le courrier qu'il n'a pas encore ouvert.
Surpris, il y trouve la deuxième lettre de Mathieu Brémont. Il la lit, curieux de découvrir la première vraie longue lettre d'un père à son fils.

« Paul,
Sur cette lettre, j'ai besoin de déposer mes regrets de père. Tu deviendras un garçon grand beau et intelligent, tu seras heureux et tu vivras normalement. Si je suis en prison, c'est parce que je n'ai pas suivi ces règles. J'ai moi-même perdu mon père très tôt, j'allais le retrouver quand je suis reparti en Afrique. J'ai laissé ta maman pour retrouver mon papa à moi, mais il était mort deux jours plus tôt, au Congo. Quand j'aurai purgé ma peine, je serai présent pour toi, parce que même si je suis passé par le mauvais chemin, je sais combien un père est important. N'en veux pas à ta maman, elle a tout fait pour m'aider mais et a préféré te préserver. Je reviendrai un jour, promis. Tu es la preuve de l'amour que j'ai éprouvé pour ta maman, c'est pour ça que tu es notre merveille. Je t'aime mon fils,
Mathieu Brémont »

  Alice sort de la salle de bains, elle se précipite à son tour pour aller constater les faits. Elle retrouve son fils pleurant dans les bras de son parrain.
Marquand : Il est tombé.
Alice : Alors mon amour, tu t'es fait mal ?
  Tentant de reprendre sa respiration, le petit sort sa tête du cou de son parrain.
Paul : Oui, j'ai eu très peur...
  Elle lui caresse le bras et regarde enfin Fred.
Marquand : C'est de ma faute. Je ne l'ai pas surveillé.
Alice : Quoi ?
Marquand : J'étais au téléphone, je n'ai pas fait attention.
  Il met sa main rassurante sur la tête de Paul et l'attire contre lui. Ils se relèvent et Alice s'occupe de son fils : elle lui met un pansement au genou et lui fait un bisou magique.
Alice laisse son fils allongé sur le canapé et rejoint Marquand dans la chambre.
Marquand : J'aurai beau faire des efforts... je n'y arriverai jamais Alice. Ni avec Paul, ni avec Lucie...ni avec ma Juju.
  La tête entre les mains, il semble inconsolable. Elle conclut que cet appel a déclenché chez son commandant une dose de tristesse et de regrets.
Alice : C'est Juliette qui t'a appelé tout à l'heure ?
Marquand : C'était Flora. Elle m'a... Juliette a fait une dépression.
  Alice est choquée et s'approche de son commandant pour lui apporter son réconfort. Pour Juliette aussi, elle a été présente, et a joué un rôle de maman. En se souvenant du passé, elle pose sa tête sur l'épaule de Fred.
Alice : Qu'est-ce qui s'est passé ?
  Elle parle désormais d'une voix douce pour apaiser les tensions.
Fred : Elle aurait sombré dans la dépression après que je lui aie..."tourné le dos" pendant que j'étais présent pour Lucie. Flora pense que j'ai refait ma vie avec toi et que plus rien ne compte pour moi. Chaque fois qu'elle me parle comme ça je me souviens de pourquoi je l'ai quittée.
  Son commandant s'aventure sur un terrain sur lequel la juge ne peut pas s'aventurer : elle ne sait pas comment recourir à ses problèmes mais se rend bien compte qu'autour d'elle, tous les papas semblent perturbés. Le hasard de la vie...
Alice : Fred. Tu as fais ce que tu as pu. Tu as une fille que tu as toujours aimé, pour qui tu as été présent malgré ton travail, et tu as une fille que tu as découverte il y a un an. Tu n'arrives pas à gérer les deux, c'est tout à fait normal ! Flora t'en veut mais je la comprends, c'est sa fille... Elle n'a pas vécu ce que tu as vécu et ne sait pas à quel point tu es perturbé.
  Pour lui témoigner de sa gratitude, Marquand l'enlace et la serre fort contre lui. Ce sont ces mots qui l'aideront à s'en sortir.
Pour couronner le tout, Paul se déplace jusqu'à eux et les enlace avec amour.
Paul : Pardon parrain, j'aurais dû t'attendre pour sortir.
  Tous se sourient, Alice est très touchée par ce lien mystérieux qui unit Fred et Paul. Fred, lui, accorde une importance capitale au fils et à sa juge, et Paul est comblé avec une superbe maman et un parrain très présent, remplaçant finalement très bien le papa qu'il n'a pas. Alice suggère à Paul de faire une petite sieste. Il accepte avec l'approbation de Fred, et s'endort sous les yeux attendris de sa maman et de son parrain.

Alice Nevers, juge d'instructionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant