Sa douleur la rend plus forte, elle mobilise toute sa force pour composer son numéro. Une fois ce fait, elle colle insupportablement le téléphone à son oreille. Des sons retentissent à intervalles de temps égaux, et une voix lui répond, elle est si surprise de ce phénomène qu'elle feint de lâcher le combiné. Une seconde lui permet de se raisonner.
Fred : Ouais ?
Juliette : Allô, papa...?Quand il entend sa voix, il réagit au quart de tour et se cloître dans sa chambre, faisant signe à Flora de ne pas dire un mot jusqu'à ce qu'il fasse sa réapparition dans la pièce commune de la maison.
[Conversation téléphonique]
Juliette : Allô ?
Fred : Juju... Ça va ?Un blanc s'interpose entre eux, laissant chacun perplexe et très gêné de la situation. Néanmoins, cela leur permet de remettre leurs idées au clair.
Juliette : Tu es dehors ?
Fred : Non, je suis à la maison... J'ai ouvert la fenêtre.
Juliette : Mon appel te dérange autant que ça ?
Fred : Pourquoi tu dis ça ?
Juliette : Parce qu'il n'y a que quand tu es stressé que tu fumes.
Choqué par la prestation de sa fille, il écrase son mégot qui rend l'Âme très vite.
Fred : Tu prenais des nouvelles ?
Juliette : Je n'ai pas grand chose à faire...
Fred : Pourquoi tu...
Juliette : Je t'écoute, hein.
Fred : J'allais te suggérer de passer sauf que ce n'est pas une bonne idée.
Juliette : Encore ta flic ?
Fred : Hein ?
Juliette : Emma...Eléa... Léa ! C'est ça ?
Fred : Qui t'a parlé d'elle ? C'est de l'histoire ancienne...
Juliette : Peu importe. Qu'est-ce qui te retient de m'inviter chez toi, alors ?
Fred : L'odeur de la cigarette, l'ambiance déprimante de l'appart...
Elle connaît son père par cœur mais est loin d'imaginer que c'est sa mère qui est en sa compagnie. Voulant se donner bonne conscience, il cherche quelques arguments.
Fred : Ta mère n'est pas là ?
Juliette : Non.
Fred : Et...
Juliette : J'étais chez une copine à Paris, mais la voir avec son fils et sa petite famille parfaite... Ça m'a fait une espèce de choc. J'ai prétexté une nausée et je suis rentrée à l'hôtel. Sauf qu'ici, les gens qui te voient déprimée, ils ne te proposent pas un siège auprès d'eux, ils ne t'accordent ni un regard, ni la parole.Conscient qu'elle ne l'a pas appelé pour évoquer ses problèmes de voisinage et autres, il garde le silence, et met lui-même le sujet sur le tapis.
Fred : Écoute Juliette, Alice m'a dit qu'elle t'avait expliqué...pour Lucie. Je voulais te le dire moi-même et Alice a pensé bien faire. J'avais juste besoin d'un peu de temps...
Il est ridicule mais emporté par la gêne, ne s'en rend pas compte immédiatement.
Besoin d'un peu de temps... 20 ans après...Fred : Tu me connais, je n'ai pas été un père présent et je ne parlerai pas de mon comportement en tant qu'homme. Je voulais que tu saches que je suis désolé. C'est bête ce que je dis, je n'aurais même pas dû t'en parler au téléphone, tu vois à quel point je suis nul. Mais j'ai rencontré ma fille, et j'ai su que c'était quelqu'un de bien. Sur le moment je n'ai pas pensé à votre rencontre. Elle a accouché il n'y a pas longtemps d'un petit Nathan. C'est ta demi-sœur...
[FIN]Désolé de quoi ? D'avoir mis au monde un enfant plus de vingt ans plus tôt ? D'avoir manqué à l'appel une fois de plus en tant que père ? Il ne sait pas comment sa fille interprète tout cela, et cela le ronge profondément. D'ailleurs, la curiosité de Flora, qui se tient près de la porte qui les sépare, se mêle petit à petit à cette histoire.
Fred : Juliette ?
Elle a raccroché, et elle ne rappellera pas avant plusieurs jours. C'est d'ailleurs ce que le regard de Flora traduit.
Flora : C'est qui cette Lucie ?
Accablé par ses aveux récents, il s'assoit sur le lit et rabaisse son regard vers le sol. Seul lui est capable d'encaisser tant de hargne.
Ses jurons intérieurs le rongent et il n'en fait par qu'à lui — et au sol, par son regard.
Flora prend place auprès de lui, il se déplace jusqu'à elle et, attendrie par ce geste, elle accepte de déposer sa tête sur son épaule.
Se rappelant de moments similaires avec Alice, il file se rincer le visage et revient, penaud, priant Flora de ne pas lui poser de questions.
Flora : Ce n'est pas si simple, Fred. Ça ne me concerne pas directement, mais les secrets enterrés ne sont pas les meilleurs à annoncer... Je ne veux pas t'enfoncer, je ne sais même pas ce que je fais là, mais je pense qu'il faut qu'on parle.
Leurs iris se croisent, créant un lien des plus fusionnels entre eux.
Fred : S'il te plaît, Flora.
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Alice Nevers, juge d'instruction
Hayran KurguBienvenue dans la suite de la diffusion de 2015. Aucun spoil, juste une histoire du passé avec quelques détails ajoutés. Bonne lecture ! (Les commentaires ne sont pas interdits par madame le juge 😉) [ Suite 2015 / Terminée ]