- Chapitre 58 -

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Je raccroche et reste assise un long moment sur le sable fin de la plage. L'air est frais, et le soleil commence lentement à décliner, jetant des reflets dorés sur l'eau. Autour de moi, la vie continue. Des enfants rient en se poursuivant le long du rivage, éclaboussant d'eau ceux qui s'approchent trop près. Un peu plus loin, des couples marchent main dans la main, perdus dans leur propre monde. Je suis là, immobile, les pieds enfoncés dans le sable, cherchant à apaiser la tempête qui gronde en moi.

Pendant ce temps, à plusieurs kilomètres de là, Arès fait face à son père. Les deux hommes sont debout dans le salon du domaine familial, les fenêtres donnant sur le vaste jardin. Arès est furieux. 

- Pourquoi m'avez-vous menti ? crache-t-il, les poings serrés, son visage se contractant de rage contenue.

Son père l'observe avec un regard calme, une légère satisfaction dans le sourire qu'il arbore. 

- Je voulais voir comment tu réagirais, Arès. Voir si tu étais capable de discernement face à cette situation... et je ne suis pas déçu de ce que j'ai vu et entendu.

Arès serre les mâchoires, sentant une vague de colère monter en lui. 

- Elle m'a appelé. Elle aurait pu fuir, mais elle ne l'a pas fait. Je sais que vous vouliez nous tester, mais ça ne justifie pas vos mensonges.

Le père d'Arès, impassible, incline la tête. 

- Je voulais savoir jusqu'où tu irais, Arès. Si elle te trahissait... si elle te mentait... serais-tu capable de la tuer de tes propres mains ? C'était la seule manière de tester ta loyauté et ton engagement.

Il pose une main ferme sur l'épaule d'Arès.

- Je suis fier de toi.

Les yeux d'Arès lancent des éclairs, mais il reste silencieux. Son père a toujours été ainsi : calculateur, impitoyable, prêt à manipuler pour arriver à ses fins. Il réalise que ce test était, en réalité, une question de vie ou de mort pour lui... et pour moi. Si j'avais fui, si j'avais menti, je serais probablement condamnée.

Il quitte la pièce, laissant son père seul dans le silence du salon. Son objectif est clair : surveiller chacun de mes mouvements, prouver que ma loyauté est réelle, ou se préparer à faire face à la trahison... si elle survient.

Sur la plage, je décide enfin de me lever, secouant le sable qui s'accroche à mes vêtements. J'attrape mon téléphone pour vérifier l'heure. Il est déjà presque 18h00. Mon cœur se serre en voyant une nouvelle notification s'afficher sur l'écran : un message d'Arès. Je l'ouvre et lis son texte avec une appréhension grandissante.

"Je veux te voir au Rocher des murmures, à 19h30. Ne sois pas en retard. Tu sais ce que ça signifie si tu n'y es pas."

Je frissonne en lisant ces mots. Le ton est clair, une menace implicite dans chaque lettre. Je ne peux pas me permettre d'échouer, pas après ce qui s'est passé. Je tape rapidement "Rocher des Murmures" sur la carte de mon téléphone, espérant comprendre où il veut que nous nous rencontrions. Une image apparaît : un grand rocher qui surplombe les falaises, dominant l'océan agité en contrebas.

Le lieu me donne des frissons. Pourquoi cet endroit ? Le vent y souffle fort, et il semble éloigné de la ville. Une atmosphère lourde, presque oppressante, qui contraste avec la plage ensoleillée où je me trouve encore. Je décide de prendre mon temps. Après tout, il est encore tôt, et je veux profiter un peu plus de cet instant de calme.

Arès, lui, ne perd pas une seconde. Il a quitté le domaine familial, une détermination froide dans le regard. Depuis sa voiture, il me surveille grâce à la puce discrètement implantée dans mon cou, un vestige d'une protection imposée par son père, et qu'il n'a pas désactivée. Chaque mouvement que je fais, chaque détour que je prends, il le sait. Mais pour l'instant, il garde ses distances. Il m'observe, en silence, prêt à intervenir si je décide de le fuir encore une fois.

Il est 19h00 quand je quitte finalement la plage, marchant d'un pas lent dans les ruelles de la ville, mon esprit tournant en boucle sur les mots d'Arès. Mes mains tremblent légèrement en pensant à ce qui pourrait se passer s'il ne me trouve pas là où il m'a demandé d'être. J'emprunte le chemin qui semble mener au Rocher des Murmures, vérifiant la carte sur mon téléphone pour être sûre de ne pas me tromper de direction.

De son côté, Arès a déjà atteint sa destination, ou du moins ce qu'il pense être la nôtre. Le "Rocher des Murmures", en réalité, n'est pas la falaise que j'avais vue sur internet, mais un petit café, discret et caché, niché dans une ruelle étroite, presque hors de vue. C'est un lieu qui lui est familier, un endroit où il a l'habitude de venir pour échapper au monde.

Il commande un café noir, s'installe à une table près de la fenêtre et surveille l'entrée. Son regard est sombre, impatient. Il pense que je vais le rejoindre ici, comme il l'a demandé. L'heure tourne, et il sent monter en lui une frustration teintée d'une inquiétude croissante.

Mais je ne me dirige pas vers ce café. Je suis guidée par ce que j'ai vu sur mon téléphone : le grand rocher surplombant la mer. En montant la route sinueuse qui y mène, je sens mon cœur battre plus fort. Je me demande si Arès y sera déjà, ou s'il attendra, me surveillant encore de loin comme il l'a fait toute la journée.

Les minutes passent. La lumière du jour commence à décliner, et la ville derrière moi s'illumine doucement, alors que je continue de marcher vers ce que je crois être notre point de rendez-vous. L'air devient plus frais, chargé de l'odeur salée de la mer, et j'accélère le pas, anxieuse de ne pas être en retard.

De mon coté, alors que je continue d'avancer les derniers mètres pour rejoindre Arès comme je le pense, un homme m'interpelle. 

- Eh bien, bonjour, belle demoiselle, lance-t-il d'un ton lourd, un sourire indélicat aux lèvres. Je le fixe, le cœur s'accélérant, déjà prête à le repousser. 

L'homme s'approche un peu plus près, son regard glissant sur moi de manière insistante. Je serre les poings, puis je respire profondément. 

- Laissez-moi tranquille, dis-je d'une voix ferme, espérant qu'il comprenne le message.

Alors que l'homme essaie de réduire la distance entre nous, il me touche les fesses. Une onde de révolte m'envahit. Je ne peux pas le laisser passer. Je le gifle avec force, les larmes de rage aux yeux. 

- Laissez-moi tranquille ! crié-je, ma voix résonnant dans l'air, écho de mon indignation.

L'homme, pris de court, recule, mais ne renonce pas. 

- Allez, ce n'est pas la fin du monde, ne fais pas ta dure, on va passer un bon moment tous les deux, dit-il, affichant un sourire méprisant, comme si mes mots ne lui faisaient aucun effet.

Arès, lui, commence à s'impatienter. Il consulte son téléphone, regardant l'heure : 19h20. Je devrais déjà être là. Un soupçon de doute s'insinue en lui. Aurais-je changé d'avis ? Serais-je en train de fuir ? Il sent la colère gronder en lui, un mélange de frustration et de trahison.

Voyant que l'homme n'est pas prêt à me laisser tranquille, j'attrape mon téléphone et décide de demander de l'aide à Arès.

Arès ne me voyant toujours pas arriver, se lève brusquement, sortant du café, la mâchoire crispée, et décide de vérifier ma position sur son téléphone. Quand il voit le point lumineux sur la carte, son cœur rate un battement. Je ne suis pas au café. Je suis à l'endroit que j'ai vu sur internet : le rocher au-dessus des falaises.

Mon message apparaît sur son téléphone : "Un homme me suit, il ne veut pas me laisser tranquille, pouvez-vous me rejoindre sur le chemin avant les rochers s'il vous plait..."

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