- Chapitre 59 -

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Avec une malédiction étouffée, il se précipite vers sa voiture, allumant le moteur à toute vitesse. Il doit me rejoindre rapidement, espérant qu'il ne m'arrive rien. Il m'en veut de ne pas avoir compris le lieu de rendez-vous, mais il sait aussi qu'il aurait dû être plus précis. L'inquiétude ronge son estomac alors qu'il se précipite vers les falaises, les phares de sa voiture éclairant la route devant lui.

Arès accélère sur la route étroite, les phares de sa voiture perçant la nuit de leur lumière blanche. Mon cœur bat aussi vite que le sien, mais je ne suis pas avec lui, je suis seule, et je ne vois pas encore la voiture qui se précipite à ma rescousse. J'ai encore le souffle de cet homme sur ma peau, ses doigts serrés autour de mon bras, et l'angoisse qui monte en moi comme une vague qui menace de m'engloutir. J'essaie de ne pas paniquer, de garder mon calme, mais c'est impossible. 

Lui, pendant ce temps, serre le volant avec une telle force que ses phalanges deviennent blanches. Comment ai-je pu la laisser seule ? doit-il se répéter encore et encore, les yeux rivés sur la route qui s'étend devant lui. Je peux imaginer son regard furieux et son souffle court, chaque seconde s'étirant en une éternité. Et moi, je suis là, vulnérable sur ce chemin désert, au milieu des falaises, à espérer qu'il arrive avant qu'il ne soit trop tard.

Puis, d'un coup, tout bascule. Au détour d'un virage, ses phares m'illuminent, moi et cet homme qui refuse de me lâcher. La lumière aveuglante le surprend, mais il reste collé à moi, encore plus déterminé. Je tente de me débattre, de le repousser, mais il est trop fort, ses mains se referment sur mon bras avec une brutalité insupportable. Et c'est là qu'Arès voit rouge. Je le sens à travers la nuit, à travers la rage pure qui explose soudain dans l'air.

Il arrive à toute vitesse, sa voiture s'arrête dans un crissement violent, et je sursaute, prise de panique. Mes yeux, écarquillés d'effroi, se tournent vers lui, vers ce halo de lumière blanche qui nous entoure. Mais l'homme ne recule pas. Il me tient encore, son sourire toujours accroché à ses lèvres, comme s'il ne se rendait pas compte de ce qui est sur le point de se passer.

La portière claque si fort que le bruit résonne comme un coup de tonnerre, et Arès surgit de la voiture. Il est là, juste devant moi, immense, une ombre noire se découpant contre la lumière. Il avance vers nous, son visage déformé par une colère que je n'ai jamais vue en lui, chaque pas lourd de menaces silencieuses.

Lâche-la. Tout de suite, gronde-t-il, sa voix glaciale me donnant un frisson.

Je le vois, et je vois aussi la lueur de défi dans les yeux de l'homme qui me tient. Comme s'il pensait qu'Arès n'était qu'un obstacle de plus à écarter. Comme s'il ne comprenait pas le danger qu'il courait. Il lâche un rire sec et méprisant, serrant encore plus fort mon bras.

Et sinon quoi ? ricane-t-il, son souffle lourd d'alcool me donnant la nausée.

Je sais qu'Arès ne répondra pas. Je le sens dans l'air qui semble se charger d'électricité. En une fraction de seconde, il fonce sur l'homme, le saisit par l'épaule et le projette au sol avec une force qui me coupe le souffle. L'homme roule sur le gravier, et moi, je reste figée, incapable de bouger, mes jambes soudainement paralysées par la terreur.

Il y a un silence, un court instant de flottement, puis l'homme se redresse avec un grognement furieux. Il se jette sur Arès, ses poings levés, mais il n'a aucune chance. Arès est déjà prêt. Tout ce qui compte, pour lui, c'est de m'avoir vue en danger, d'avoir senti cette menace planer sur moi. Et il ne le tolère pas.

Son poing part, et je l'entends plus que je ne le vois. Le coup s'écrase contre la mâchoire de l'homme, le faisant basculer en arrière, le sang jaillissant de sa lèvre fendue. Il essaie de répliquer, de se défendre, mais Arès esquive, rapide et précis. Ses coups pleuvent avec une force implacable, chaque impact résonnant comme une condamnation. Je n'ai jamais vu une telle rage en lui, une telle fureur incontrôlable.

Tu as osé la toucher, murmure-t-il, presque pour lui-même, chaque mot chargé de haine et de rage.

Je veux crier, lui dire d'arrêter, mais je n'y arrive pas. Ma voix reste coincée dans ma gorge, étouffée par la peur et l'horreur. Arès ne s'arrête pas. Il est comme possédé, ses mouvements devenus ceux d'un prédateur. Un homme qui frappe et frappe encore, jusqu'à ce que le corps de l'autre s'affaisse au sol, inconscient.

Arès reste un moment au-dessus de lui, immobile, haletant. Ses poings sont encore serrés, ses mains couvertes de sang. Ses yeux cherchent les miens, et je vois dans son regard quelque chose d'à la fois rassurant et terrifiant. Une promesse silencieuse de protection, mais aussi une violence que rien ne semble pouvoir arrêter.

Monte dans la voiture, dit-il d'une voix glaciale, son ton me glaçant jusqu'aux os.

Je ne bouge pas. Je regarde le corps inerte de l'homme au sol, son visage tuméfié, et je tremble. Les mots se bousculent dans ma tête, mais rien ne sort. Je veux comprendre, je veux lui demander pourquoi, comment il a pu aller aussi loin, mais il ne me laisse pas le temps.

Monte dans cette putain de voiture Persia ! hurle-t-il soudain, sa voix claquant comme un coup de fouet.

Je sursaute, mes jambes flageolent, et je m'exécute sans réfléchir, étouffant un sanglot dans mes mains tremblantes. Je contourne la voiture, ouvre la portière et m'assieds, mes épaules secouées de larmes silencieuses. Je l'observe, le voyant se pencher pour attraper l'homme inconscient. Il le traîne vers le coffre comme si ce n'était qu'un simple paquet, une chose insignifiante, et moi, je détourne les yeux, incapable de supporter cette vision.

Le coffre s'ouvre, et j'entends le bruit sourd du corps qui y est jeté. Le claquement sec qui suit me fait sursauter. Quand il revient vers moi, je vois son visage, tendu et marqué par une détermination froide, implacable. Il s'assoit derrière le volant, allume le moteur, et nous repartons, laissant derrière nous ce chemin désert et tout ce qu'il représente.

Je reste silencieuse, les mains crispées sur mes genoux, mais l'envie de comprendre me ronge. Je le regarde, sa mâchoire contractée, ses yeux fixés droit devant lui, et je finis par craquer, la question sortant de ma bouche dans un souffle :

— Pourquoi... pourquoi avez-vous fait ça ?

Arès reste silencieux une fraction de seconde, puis je le vois exploser. Ses poings frappent le volant avec une force qui me fait sursauter, un geste de colère brute qui semble secouer toute la voiture.

Pourquoi ? Putain, tu me demandes pourquoi j'ai fait ça ? crie-t-il, sa voix chargée d'une frustration et d'une douleur qui me clouent sur place.

Je le regarde, les yeux écarquillés, incapable de répondre. Il se tourne vers moi, son regard brûlant d'une intensité qui me coupe le souffle.

Parce qu'il t'a touchée ! Parce que tu étais là, seule, à sa merci, et que je ne pouvais pas le supporter ! Son souffle est court, presque rauque, et je vois ses mains trembler légèrement sur le volant. Sa voix redevenue glaciale, mais je sens une lueur de désespoir dans ses yeux.

Je ne réponds pas. Je sens une boule se former dans ma gorge, le poids de ses mots s'abattant sur moi. La voiture roule dans un silence pesant, le moteur ronronnant alors que la nuit nous engloutit de plus en plus. Arès garde les yeux fixés sur la route, ses traits figés dans une expression de détermination froide.

Je reste recroquevillée sur mon siège, mes pensées tourbillonnant, et je réalise que je viens de voir une facette de lui que je n'oublierai jamais. Une part sombre et sauvage, prête à tout pour me défendre. Et je ne sais plus quoi ressentir. 

Les kilomètres défilent, et le silence entre nous devient un gouffre. Arès conduit sans ralentir, comme s'il essayait de fuir quelque chose.

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