- Chapitre 63 -

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L'appartement est plongé dans un silence pesant, chaque meuble, chaque coin semble m'observer alors que j'avance seule pour la première fois. Je déambule lentement, en m'assurant que personne ne me regarde, mes pas résonnant légèrement sur le parquet. Un frisson me parcourt alors que je réalise que cette liberté de mouvement, aussi illusoire soit-elle, est une rareté dans ce lieu où chaque geste est surveillé.

Je fouille méticuleusement chaque recoin, à la recherche de quelque chose qui pourrait m'aider, n'importe quoi pour me sentir moins vulnérable. Mais le temps passe, et mes recherches restent vaines : des tiroirs bien rangés, des armoires verrouillées, des objets soigneusement placés, mais rien qui ne puisse réellement me servir. C'est comme si chaque chose ici était là pour renforcer le contrôle qu'Arès exerce sur moi.

Je continue malgré tout, jusqu'à ce que j'atteigne son dressing. Mon cœur bat plus vite tandis que je m'aventure dans cet espace, l'atmosphère y est presque suffocante. Là, au fond, je découvre un coffre-fort, massif et solide, encastré dans le mur. Je m'agenouille devant, inspirant profondément avant de taper des codes, les uns après les autres, sans succès. Je suis sur le point de renoncer quand une idée me traverse l'esprit. Mes mains tremblent alors que je tente une dernière combinaison : la date à laquelle je suis arrivée ici, le jour où tout a basculé.

Un déclic retentit. Le coffre s'ouvre. Mon souffle se bloque tandis que mes yeux se posent sur son contenu : des documents que je ne prends pas le temps de lire, de nombreuses liasses d'argent, un téléphone que je reconnais immédiatement comme celui qu'Arès m'avait confisqué, et enfin, mes pièces d'identité... mon passeport. L'espoir se faufile en moi, fugace, mais il est immédiatement étouffé par le bruit assourdissant de la porte de l'appartement qui claque violemment.

Je referme le coffre en hâte, mon cœur battant à tout rompre, et me plaque contre le mur du dressing, incapable de faire le moindre mouvement. Une peur glaciale me paralyse alors que j'entends la voix d'Arès, rauque et furieuse, résonner dans l'appartement. Il crie mon nom, ses pas lourds trahissant sa colère. Mon esprit est en alerte, cherchant frénétiquement une issue, mais il est trop tard. Je n'ai plus le choix. Je rassemble ce qu'il me reste de courage et sors lentement du dressing.

"Je suis là," dis-je d'une voix à peine audible, la gorge nouée.

Arès se tourne brusquement vers moi, ses yeux brûlant de rage. Sa posture est menaçante, et avant même que je ne puisse réagir, il attrape la ceinture autour de sa taille et commence à la déboucler. Je recule instinctivement, le sol disparaissant presque sous mes pieds. Des souvenirs terrifiants envahissent mon esprit : les coups, la douleur, les larmes, et cette ceinture, où prône ses initiales, symbole de son pouvoir destructeur.

Je tombe à genoux, les mains levées dans un geste de défense désespéré, mon corps tremblant de terreur. 

- S'il vous plaît... ne me frappez pas. Je vous en supplie... ma voix se brise, et des larmes de panique roulent sur mes joues.

Je m'attends au pire, le souffle coupé, chaque muscle de mon corps tendu à l'extrême. Mais contre toute attente, Arès s'arrête. Son regard passe de la ceinture à moi, la réalisation de ma terreur se lisant dans ses yeux. Son visage se fige, une émotion indéfinissable passant rapidement sur ses traits, avant qu'il ne détourne la tête avec une frustration contenue. Puis, sans un mot, il me dépasse, tenant toujours la ceinture fermement enroulée autour de sa main. Je reste pétrifiée, incapable de comprendre ce qui vient de se passer.

Il disparaît dans le dressing, et j'entends le bruit sourd du cuir qui heurte le tiroir lorsqu'il la range avec une lenteur presque cérémoniale. Je suis toujours à terre, figée, incapable de bouger, les yeux fixés sur la porte qu'il vient de franchir, mon cœur battant comme un tambour désespéré.

Arès ressort du dressing, ses mouvements lourds et silencieux, son regard devenu insondable. Pendant un instant, nous restons là, figés dans un face-à-face silencieux. Puis il tourne les talons et sort de la pièce, me laissant seule, brisée, le silence de l'appartement plus pesant que jamais. Mon corps refuse de bouger, anéanti par la terreur et par ce fragile sursis que je ne parviens pas à comprendre.

Arès traverse l'appartement d'un pas lourd, laissant derrière lui le silence oppressant de notre confrontation avortée. Il s'arrête devant la porte de la salle de bain et, sans un regard pour moi, il entre en la refermant à moitié, son geste exprimant plus que des mots ce qu'il attend de moi. Je reste figée un instant, encore secouée, incapable de bouger, mais sa voix retentit, ferme et impérieuse, brisant ce moment de flottement.

- Persia, dit-il d'un ton glacial. Viens ici. Tout de suite.

Je me relève lentement, mes jambes encore tremblantes, et avance vers la salle de bain. La peur s'accroche à moi comme une ombre, mais je ne peux pas me permettre de désobéir. Arrivée à la porte, j'hésite un instant avant d'entrer, sentant le froid du carrelage sous mes pieds nus. Il est là, debout face au miroir, les mains appuyées sur le rebord du lavabo. Son regard se fixe sur moi à travers le reflet, lourd de colère et de quelque chose d'autre que je ne peux pas décrypter.

Je reste immobile, incapable de soutenir ses yeux plus longtemps, et fixe le sol, sentant l'humidité de la pièce me saisir. Un silence tendu s'installe, puis il brise enfin ce moment insoutenable d'une voix rauque et dure, chaque mot chargé d'une violence contenue.

- Celui qui a essayé de te toucher... commence-t-il, sa voix se brisant légèrement avant de retrouver sa dureté habituelle. Il est mort.

Je relève la tête, mon regard croisant le sien dans le miroir, une lueur d'incrédulité passant dans mes yeux. Il me fixe, les traits crispés, son visage fermé comme un mur infranchissable. Et puis, d'un ton brutal et sans filtre, il continue, sa voix dégoulinant de mépris :

- J'ai pas pu m'empêcher de le détruire. De l'éclater, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus rien. Ce connard ne touchera plus jamais personne. Je lui ai appris, d'une façon bien définitive, ce que ça coûte de poser la main sur ce qui m'appartient.

Les mots tombent comme des pierres, lourds et terrifiants, tandis que le miroir reflète son expression déformée par une rage qui semble encore bouillir en lui, même maintenant. Ses poings se serrent sur le rebord du lavabo. Un frisson glacé me traverse. Il parle avec une telle indifférence, comme s'il décrivait quelque chose d'insignifiant, mais je vois la violence brute dans ses yeux, ce besoin de dominer, d'écraser tout ce qui représente une menace.

Je reste silencieuse, ne sachant quoi dire, ma peur se mélangeant à une vague de dégoût et de culpabilité. Un nœud se forme dans ma gorge, m'empêchant de respirer correctement. Je comprends, encore une fois, que je ne suis qu'un prétexte à sa rage, une excuse pour déchaîner ses pires instincts. Et pourtant, je suis prisonnière de cette folie, incapable de fuir ou de trouver une échappatoire.

Arès me fixe, attendant une réaction, un mot, une supplique peut-être, mais je ne lui offre rien. Je reste là, glacée par l'horreur, et il laisse échapper un rire amer, dénué de toute joie, avant de détourner le regard vers le lavabo. Je suis figée, n'osant pas bouger, n'osant pas parler, attendant qu'il me libère de cette confrontation étouffante.

Je voudrais hurler, pleurer, mais je reste silencieuse, les yeux perdus dans son reflet. Il se redresse, plus grand, plus menaçant que jamais, et me lance un dernier regard, une étincelle sombre au fond des yeux.

- Ne l'oublie jamais, Persia. Personne ne s'approche de toi sans en payer le prix. Personne. Maintenant, sors d'ici.

Sa voix est froide, implacable. Je baisse la tête et obéis, reculant lentement hors de la salle de bain, mes mains moites et mon cœur battant à tout rompre. Je m'éloigne, sans un mot, tandis que la porte se referme derrière moi avec un bruit sourd. Je sens mes jambes vaciller, mais je continue d'avancer, m'éloignant de ce miroir qui reflète à la fois mon visage et le sien, déformés par la peur et la violence qui nous lient, inextricablement.

PersiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant