- Chapitre 65 -

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Sous un silence pesant, l'atmosphère de la pièce se cristallise, laissant l'air lourd et oppressant. Aucun son ne vient troubler ce calme glaçant, et pourtant, la tension semble palpable, comme une menace suspendue dans l'air. Arès reste parfaitement immobile, ses yeux fixés sur moi avec une intensité qui me transperce. Son visage, impassible et fermé, ne laisse transparaître aucune émotion, mais ses yeux... ses yeux sont des lames glacées, me figeant sur place, incapable de détourner le regard, comme un animal pris au piège.

Les secondes s'étirent dans un silence insoutenable, et je tente de discerner une réaction, un signe de compréhension, d'acceptation. Mais rien. Son visage reste de marbre, inflexible. Je sens mon cœur battre de plus en plus fort, l'inquiétude s'enroulant autour de mes pensées, chaque pulsation s'intensifiant au point de devenir douloureuse. Le poids de ce silence finit par m'écraser, et pourtant, je ne parviens pas à bouger, ni même à respirer correctement.

Puis, brusquement, quelque chose change dans son expression. Un éclat passe dans ses yeux, un mouvement infime au coin de sa bouche. Je comprends, trop tard, que mes mots n'ont pas touché la corde sensible que j'espérais, bien au contraire. Ses traits, qui semblaient presque figés dans l'indifférence, se durcissent. Une colère froide, calculée, s'éveille, se manifestant d'abord par un frémissement de sa mâchoire. Sa bouche se crispe légèrement, et l'intensité de son regard devient si pénétrante que je sens un frisson glacial me parcourir l'échine. Il inspire profondément, et ses yeux me fixent avec une telle profondeur que j'ai l'impression qu'il cherche à sonder chaque recoin de mon esprit pour y dénicher la moindre trace de défi.

Il se penche alors lentement vers moi, réduisant l'espace entre nous d'une manière si oppressante que je ressens le besoin instinctif de reculer, mais mes jambes restent clouées au sol, paralysées. Quand il ouvre enfin la bouche, c'est d'une voix si basse, si grondante, que chaque mot résonne dans mon esprit comme un coup de tonnerre. "Tout ce que j'entends," murmure-t-il, en accentuant chaque syllabe avec une précision terrifiante, "c'est que tu es sortie de cette voiture. Tu as pris cette décision." Son regard s'assombrit encore, chargé de reproches et de jugement. "Et c'est de là que tout a commencé."

Avant même que je ne puisse saisir toute la portée de ses paroles, Arès se redresse brusquement, et d'un mouvement inattendu et brutal, il s'approche encore davantage, ses gestes si rapides que je n'ai pas le temps de réagir. Sa main s'abat sur mon visage dans une gifle cinglante, sa violence me heurtant avec une intensité à laquelle je ne m'attendais pas. Le choc est tel que ma vision se brouille instantanément, et la douleur vive qui se propage sur ma joue semble me brûler jusqu'à l'âme. Déséquilibrée, je bascule en arrière et m'écroule lourdement au sol, incapable de me retenir.

Le goût métallique du sang envahit ma bouche, et l'âpreté de cette sensation me ramène à une réalité brutale. Ma joue, enflammée par l'impact, palpite douloureusement, chaque pulsation me rappelant avec une précision cruelle le geste impitoyable d'Arès. Des larmes incontrôlables commencent à dévaler mes joues, leur chaleur contraste avec la froideur de son regard toujours rivé sur moi, insensible et distant. Pourtant, je m'efforce de rester silencieuse, de contenir mes sanglots, sachant pertinemment que toute manifestation de douleur ou de faiblesse ne ferait qu'aggraver la situation. Mon souffle est court, saccadé, et mes mains tremblent légèrement tandis que je tente de reprendre contenance.

Arès, impassible, se redresse et prend le temps de lisser les plis de sa veste, comme si cet instant de violence venait de le libérer d'une frustration contenue. Son regard descend vers moi, et l'ombre menaçante de sa silhouette se projette sur le sol, m'enveloppant d'un voile sombre qui m'écrase encore davantage. Il me regarde, une expression de dédain inscrite sur son visage, comme s'il ne voyait en moi qu'un simple obstacle, une épine dans sa vie qu'il pourrait écarter d'un geste. Lentement, il se penche à nouveau vers moi, ses yeux brillant d'une froideur terrifiante. "Considère ça," murmure-t-il d'une voix calme, presque douce, ce qui ne fait que renforcer l'effroi qui s'empare de moi, "comme une légère punition pour ta stupidité." Ses mots se distillent comme un poison, chacun d'entre eux s'infiltrant dans mes pensées, me paralysant de l'intérieur.

Il se redresse enfin, sans quitter des yeux la faible silhouette que je dois lui sembler être, allongée à terre, brisée. D'une main assurée, il attrape la ceinture qu'il avait laissée sur la table, un symbole de son contrôle, et me la tend sans un mot, le visage toujours impassible. Ses doigts ne tremblent pas, et dans cet acte, je lis une froide détermination, une volonté inébranlable qui ne souffre d'aucune contestation. "Maintenant," dit-il simplement, en me tendant la ceinture avec une autorité tranquille, "va la ranger."

Chacun de ses mots résonne comme un ordre impératif auquel je n'ai d'autre choix que d'obéir. Je tente de me relever, mais chaque mouvement m'arrache une vague de douleur, et mes jambes vacillent sous mon poids. La souffrance physique n'est rien comparée à l'humiliation cuisante que je ressens. Je prends la ceinture d'une main tremblante, mes yeux baissés pour éviter son regard, de peur d'y trouver encore plus de mépris, de ressentiment. Tandis que je me redresse, la douleur dans mes muscles se mêle à celle plus profonde qui habite désormais mon esprit, comme une marque indélébile de cet instant.

Je fais quelques pas, mes jambes encore instables, et je sens le poids de son regard me suivre, perçant chaque recoin de mon être. Ce regard qui me juge, qui me condamne silencieusement, m'écrase sous le poids d'une culpabilité que je n'arrive plus à ignorer. Arrivée devant la porte du dressing, je me retourne légèrement, le regard baissé, mais je perçois toujours sa présence écrasante derrière moi, comme une ombre qui refuse de me laisser respirer.

Le silence retombe, mais il est plus oppressant encore, car il est chargé de tout ce que je n'ose dire, de tout ce qu'il m'interdit de ressentir. Dans le dressing, chaque objet, chaque détail semble une extension de son pouvoir, une manifestation silencieuse de son emprise sur mon existence. Les murs semblent se refermer autour de moi, me donnant l'impression d'être prisonnière non seulement de cet espace, mais aussi d'une vie dont les contours me semblent flous, sans issue.

Je range la ceinture à sa place, le geste mécanique et dénué de sens, mais chaque seconde passée ici semble graver plus profondément en moi le poids de cette servitude tacite. La pièce est sombre, et le reflet que je distingue dans le miroir me paraît étranger, une version de moi-même que je ne reconnais plus, les yeux rougis, le visage marqué par la douleur et la résignation. Je voudrais hurler, mais le silence m'étouffe, et mon cœur, pourtant affolé, reste silencieux, battant dans une cage invisible dont je ne trouve plus la clé.

En sortant du dressing, je garde les yeux baissés, n'osant affronter à nouveau son regard, ce regard qui ne fait que me rappeler mon impuissance. Mais son silence, tout autant que ses gestes, parle de l'inflexibilité de son autorité. Je sens son souffle, imperceptible mais présent, comme un avertissement tacite qui me cloue sur place. Le moindre mouvement, le moindre son pourrait, je le sens, être perçu comme une provocation, une défiance. Et je sais trop bien les conséquences de cette audace.

Arès s'avance légèrement, son ombre couvrant à nouveau mon champ de vision, et je ne peux empêcher un frisson de remonter le long de ma colonne vertébrale. Ses pas, lents et mesurés, résonnent sur le sol, chaque bruit venant s'ajouter au poids écrasant de cette scène. J'ai l'impression de suffoquer, de me noyer dans cet océan de silence oppressant. Mon corps tout entier réclame de l'air, de la lumière, une échappatoire, mais il n'y a rien, juste ce regard, cet être devant moi, inébranlable et impitoyable.

Finalement, il s'éloigne d'un pas, me libérant de son ombre, mais je reste immobile, encore trop abasourdie pour bouger. Mon esprit erre, cherchant à comprendre, à trouver une échappatoire, une raison d'espérer. Mais la vérité est là, brute et impitoyable, et elle me laisse exsangue, vidée, seule face à un avenir qui me paraît soudain bien sombre.

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