La chambre bleue décorée de maquettes d'avions, de fusées et de posters sur l'espace se trouvait plongée dans la pénombre. Les ombres s'étiraient jusqu'au petit lit, aux draps constellés d'étoiles, contre le mur. Tout semblait plus grand, plus large, plus inquiétant, qu'à la lueur du jour. Les ténèbres forçaient le garçon à replonger sa tête sous sa couette. Avait-il vu une main griffue s'étendre au plafond à l'instant ? Parfois, les lumières de la route parvenaient jusqu'à ses murs et faisaient déambuler de curieuses ombres sur son papier peint recouvert d'étoiles joyeuses.
Le crissement des pneus de la voiture de son père sur le gravier l'incita à sortir le nez des draps. Il fonça vers la fenêtre pour mieux s'accroupir derrière, afin que les phares du véhicule ne vinssent pas le surprendre encore debout. Sitôt le moteur arrêté et la portière claquée, son père prit la direction de la porte d'entrée. Le garçon fonça de nouveau sous la couette, le cœur battant, et ferma vivement les yeux pour simuler le sommeil. Au loin, les voix de ses parents l'avertit de leur approche et de leur entrée imminente dans sa chambre.
Le grincement ténu de sa porte fut suivi du doux frottement des pieds de son père sur le tapis moelleux. Yann exhala un léger soupir de bien-être, juste avant que les lèvres paternelles vinssent embrasser son front.
– Dors bien, mon chéri.
Sitôt son baiser donné, l'homme quitta la chambre de son fils et alla étreindre sa femme pour une nuit de sommeil bien méritée.
Dans le lit, Yann s'était déjà endormi.
L'emprise glacée du liquide l'engloutit avant de lui enserrer la gorge. Il ouvrit la bouche pour tousser, mais tout son corps sombrait déjà. Il se noyait. Il ne savait pas nager, car depuis toujours sa peur de l'eau l'avait empêché d'apprendre. Sa vision blanchissait vite, à mesure qu'il suffoquait.
– Ohlala, mais qu'avons-nous là ? s'exclama une voix railleuse.
La remarque fut suivie d'une poigne ferme sur son col de pyjama, qui le sortit de l'onde froide d'un mouvement sec. Il atterrit sur le pont d'une fine embarcation de bois dans un bruit mou de succion. Son pyjama dégoulinait tandis qu'il recrachait tout le liquide avalé malgré lui. Le garçon essayait encore de s'en remettre, lorsqu'un grand tissu sombre s'échoua sur ses cheveux trempés.
– Quand tu auras fini de vider tes poumons, tu me donneras ton nom !
Un calme angoissant, ponctué par la respiration sifflante du garçon, s'installa. Toujours effrayé par son expérience, il s'enveloppa dans la couverture moelleuse, bizarrement chaude. Bien qu'offerte par cet homme d'un geste cavalier, il apprécia son contact doux qui le réchauffait aussi vite qu'une bouillotte le ferait.
Quelques instants suffirent au mystérieux tissu magique pour le sécher. Intrigué et curieux, il songea enfin à examiner les lieux. Le bateau arborait un fond plat, avec un unique banc et une sorte de grosse bouilloire fermée à la poupe. Côté proue, l'inconnu, immobile, tenait une longue perche entre les mains, qu'il plongeait à intervalles réguliers dans l'eau glacée. Son geste fluide faisait avancer leur embarcation sur une petite rivière souterraine.
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Le Passeur de Mondes [En correction]
Science FictionYann Becquerel est un brillant astrophysicien, amoureux de l'espace, qui découvre le secret de l'Univers : ses origines. Alors que sa notoriété bat son plein, une perturbation venue de l'espace va venir chambouler à la fois sa vie, mais aussi reme...