Le Passeur de Mondes [En correction]

Parsec 2 = Madame Red - partie 2 (v2)

          Une salve d'applaudissements retentit une demi-heure plus tard pour les deux astrophysiciens. Le temps des questions commençait, sous le feu des projecteurs des journalistes venus couvrir l'événement. Dans un coin de l'immense salle, une femme en tailleur noir les scrutait depuis leur arrivée sur l'estrade. Elle avait pris soin d'écouter toute la conférence qui la fit ricaner à de multiples reprises.

          Il fallut une heure aux deux hommes pour venir à bout des dizaines de mains levées qui se succédaient. Leur découverte réglait définitivement la question de l'existence du multivers, qui passait de probable à certain. Elle clôturait aussi l'idée égoïste que le Big Bang représentait l'origine de tout, tout comme la vie sur Terre qui ne serait plus unique et solitaire. Autant d'idées qui allaient bouleverser le monde entier et contrarieraient tant de personnes...

– L'Humanité, marmonna l'inconnue d'une moue dédaigneuse.

          Elle jeta un dernier regard vers Yann, submergé par la foule qui désirait lui parler après cette présentation révolutionnaire. Son visage entier se durcit.

– Le moment est venu...

          Elle délaissa la conférence, le monde et les raisons de sa présence, avant de sortir du bâtiment pour prendre la direction de la plage. Elle l'y attendrait. Leur rencontre était déjà écrite dans les étoiles. Que représentaient trois heures d'attente, au regard de l'univers ?

          Pendant ce temps, Pierre et Yann se laissaient griser par leur succès du jour. Ils finirent par échouer à nouveau dans les toilettes, abandonnées plus tôt, où ils se fixèrent en silence, en sueur, épuisés, mais heureux. Ils ricanaient comme deux enfants, prêts à hurler de joie.

– On a cassé la baraque, vieux ! lança Yann.
– Tu m'étonneras toujours, toi... Même dans ton état déplorable, t'as réussi à faire une présentation qu'ils n'oublieront pas de sitôt ! s'enthousiasma Pierre avant de retrouver son sérieux. Tu te sens toujours aussi mal ? J'ai cru devoir te remplacer à plusieurs reprises...

          Son collègue hocha la tête d'un air pitoyable. Il passa de la joie au dégoût en moins d'une seconde. Son visage, à présent épuisé et pâle, reflétait son état émotionnel compliqué.

– C'est même pire que tout à l'heure... Je vais aller prendre un peu l'air, histoire de m'en remettre... Je te laisse ramener la mallette à l'hôtel ? On se rejoint pour le dîner ?

– Tu es sûr de vouloir rester seul ? Ce n'est pas une bonne idée, vu ton état... Ce n'est pas sérieux de te laisser, selon moi !

– Depuis quand tu te la joues paternaliste avec moi, vieux ? ronchonna son collègue. Rentre. Je vais juste marcher un peu, me confronter à mes peurs et revenir bien sagement à l'hôtel une fois calmé.

          Ils s'affrontèrent du regard en silence quelques secondes. Mais ils se connaissaient trop bien tous les deux et aucun ne désirait céder. Au final, Pierre décida, dans un soupir désolé, de le laisser faire à sa guise, pour une fois.