Le Passeur de Mondes [En correction]

Parsec 42 = Ce lien qui nous unit...

          Des papillons bleutés cascadaient tout autour d'elle en de vagues gouttelettes d'eau. La douce sensation d'être frôlée par un liquide soyeux et chaleureux la perturba une seconde. Un bruit de grincement troubla son idylle sylvestre et la força à réfléchir. Où se trouvait-elle ? D'un froncement de sourcils, elle essaya tant bien que mal de se repérer, sans réussite. Seul l'immense arbre au loin paraissait remarquable, toute la forêt alentour, sombre et inquiétante, ne l'incitait guère à s'y promener ; et ce, malgré les êtres virevoltants de lumière qui s'y engouffraient sans peur.

« Viens, approche. »

           La voix désincarnée l'épouvanta soudainement et tout son visage pâlit de stupeur. Elle voyait là l'œuvre des arbres tout autour d'elle, qui essayaient sans doute de l'attirer dans leurs filets. Elle serra ses bras l'un contre l'autre et se mit à courir vers le chêne géant au loin, délaissant les impressions de chaleur lorsque les papillons la frôlaient, ou bien d'eau fraîche, cela dépendait. La brume l'enveloppa à son arrivée aux racines de l'arbre immense et elle s'en effraya d'autant plus.

« Entre. »

           Une faible lueur au fond des méandres de la végétation en contre-bas l'attira et elle s'y dirigea avec calme. L'idée d'être une proie sacrificielle lui traversa bien l'esprit, mais l'éclat qui captait son attention l'anesthésiait de cette théorie. Entre les ronces et les bosquets, une ouverture dans la terre lui permit de pénétrer plus avant vers les rayons de lumière. L'atmosphère humide et fraîche aux relents de glaise et de nature mouillée lui donnait une sensation désagréable, sans s'expliquer pourquoi. Elle suivit le couloir creusé dans le sol avec précaution, prête à fuir à toutes jambes en cas de danger. Mais aucune menace ne surgit des coins d'ombre et elle déboucha dans une immense salle souterraine, où des racines descendaient du plafond pour enlacer une gemme aux mille couleurs ; celle qui répandait une lueur aussi intense, donc.

« Plus près... »

           La voix... Elle provenait également de cette pierre étrange !

« L'on me nomme "Pierre d'Éternité" depuis plusieurs millénaires. Je proviens de l'Orin, la source de stabilité du massivers. Sais-tu de quoi je parle, Gardienne du Destin ? »

           Lola s'avança un peu plus vers cette gemme irisée tout en réfléchissant profondément à ses paroles. Un recoin de son esprit faisait écho, tandis qu'un autre n'y comprenait rien. Une voix lointaine l'avait déjà appelée ainsi, mais tout se noyait dans les brumes de l'inconscience.

– Je ne sais pas.
« Touche-moi, dans ce cas. »

          Perplexe, la jeune fille s'approcha jusqu'à pouvoir toucher ce fragment irréel, lorsqu'un sentiment de danger l'avertit à nouveau qu'elle se faisait piéger. Son regard magnifique se redressa vers la gemme et ses sourcils se froncèrent, tandis qu'elle rabaissait sa main.

– Non. Tout cet endroit m'inquiète ! Quelque chose ne va pas ! Je vais...

          La chute de mottes de terre face à elle la fit reculer rapidement, juste à temps pour ne pas se prendre le plafond de la salle sur la tête. Il venait d'être détruit par les coups soudains d'un immense lézard noir avec une forme d'alien et des bras d'insecte. Lola eut l'impression de rêver un mauvais film d'horreur.

« S'il me touche, c'est la fin de la partie, Gardienne. Empêche-le de m'atteindre. »

          L'intrus venait de s'immobiliser juste devant la gemme, la bouche grande ouverte qui laissait trainer une langue longue et pointue, très baveuse. Les yeux à facette rouge contemplaient l'objet de ses désirs avec une avidité à faire frissonner Lola de terreur. Enfin, tout l'endroit baignait à présent dans les ténèbres : seule la pierre d'Éternité continuait à émettre une lumière, mais de moins en moins vive.