Chapitre 20

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Je trouve la voiture de mon père après quelques secondes de recherche.Je remarque que, comme à son habitude, il n'a pas verrouillé les portes. Je monte à l'intérieur, replis mes jambes sur moi même et attends, le menton sur les genoux.

J'attends  longtemps, très longtemps.

Tellement que je commence à sérieusement m'inquiéter de ce qu'il se passe à l'intérieur de ce bâtiment. Quelques minutes se passent pendant lesquelles énormément de pensées traversent mon esprit, et évidemment, ce ne sont pas des pensées plaisantes. Tout d'abord Tristan et moi allons devoir revivre avec nos pères respectifs qui ont apparemment un mauvais passé partagé. Tristan doit sérieusement commencer à me haïr à cause de cela. D'autant plus que j'ai« agressé » son père dans un excès de colère que je trouve totalement compréhensible.

A croire que moi, je suis comme mon père.

Tristan doit maintenant le penser : j'ai agis d'une façon violente et impulsive. Ensuite, Le Centre va paniquer en voyant que nous ne revenons pas. Ils vont peut-être organiser des recherches pour nous retrouver et prendre des décisions sous des coups de tête.Certaines personnes vont peut-être se faire arrêter, mais je n'ose y penser qu'à peine. J'espère qu'Ana, Morgan, Apolline et Nathan vont réussir à maintenir le calme au sein du Centre, et garder leur calme à eux. Nous sommes très amis alors la panique sera sûrement leur première réaction, ce qui est tout à fait normal.

Je suis encore entrain de me torturer l'esprit lorsque je vois Tristan sortir du commissariat, l'air furieux, son père le suivant tout en gardant ses distances. Je me redresse sur mon siège en espérant qu'il m'apercevra, en vain. Quelques secondes plus tard, mon père sort à son tour. Lui est beaucoup plus nerveux, et avance d'un pas résolut mais manquant très visiblement de confiance. La rancœur que j'ai à son égard diminue à ce spectacle qui me donne envie de le réconforter de ce qui vient de se passer. Mais je remets encore une fois mes idées en place au bon moment, me rappelant comme toujours l'homme qu'il était.

Il entre dans la voiture, met le contact et, alors que je pensais qu'il allait démarrer, il se tourne vers moi et me dit :

-Tu es devenue folle ou quoi ? Pourquoi l'as-tu agressé ?

Voici ses premières paroles en mon intention après des jours sans contact. Je n'arrive même plus à être déçue. Certes mon comportement est inexcusable, mais ne pouvait-il pas commencer par des excuses ?

-La vrai question est pourquoi m'as-tu agressé pendant deux ans.

L'atmosphère se refroidie dès l'instant où je prononce ces mots. Ces mots qui sont sortis seuls de ma bouche et que je regrette à la seconde où je m'entends les prononcer. Je tourne la tête vers lui, m'armant de tout mon courage en le fixant, attendant sa réponse. Il me regarde également, les mains posées sur le volant qu'il serre très fort.Il finit par détourner le regard vers la fenêtre, tout en observant le paysage, il me répond sans émotion :

-Tu n'as pas intérêt à fuguer une nouvelle fois. J'ai dû te défendre pour ne pas qu'Ethan porte plainte contre toi pour agression, et tu n'as pas intérêt non plus à traîner avec son fils. Ils nous ont assez posé de problèmes comme ça.

-De quoi parles-tu ?

-Je connais son père depuis une dizaine d'années. Il est mon supérieur depuis deux ans.

-Et comment t'as-t-il posé des problèmes ?

-Nous n'avons pas la même visions des choses.

-C'est-à dire ?Et il n'a finalement pas porté plainte contre moi ?

-Je ne peux pas t'en dire d'avantage. Et non. En grande partie grâce à John qui l'a menacé.

-Il l'a menacé ? Pourquoi ça ? Tu le connais ?

-Oui, c'est aussi un collègue et le reste ne te regarde pas.

Je fronce les sourcils et m'apprête à poser une nouvelle question mais il démarre pour mettre fin à notre discussion. J'arrive à tenir environs une minute sans parler mais, n'y pouvant plus je continue :

-Pourquoi tu ne réponds pas à mes questions ? Qu'est-ce que tuas à cacher ? Je pense que des réponses claires ne sont pas demander grand chose de ma part sachant ce que tu m'as fait vivre. Tu sais que je n'ai rien dit qui pourrait te faire du tort ? Je ne sais même pas pourquoi j'ai fait ça, sachant que tu ne t'excuses même pas de ton comportement !

Ce courage m'était auparavant inconnu. Ma dernière phrase sort de ma bouche tel du venin. Le Centre m'a donné confiance en moi. Je ne sais pas si c'est une bonne chose. Il s'en aperçoit et semble dans un premier temps impressionné.

Non,je n'ai plus l'intention de me laisser faire.

Je ne sais comment le Centre a pu me donner tant d'assurance devant cet homme qui me terrifiait il y a si peu de temps, mais une chose est sûre : je ne me laisserais plus intimidée. J'accentue bien évidemment mon rôle de « rebelle ».

Il pousse un soupire d'exaspération et me répond, le plus normalement du monde :

-Je n'ai pas du tout envie de parler avec toi pour le moment. Arrête de me parler de cette façon, ce n'est pas toi, et je suis exactement comme avant. Je te préviens, si tu ne changes pas de comportement,tu vas retrouver une vie plus dure que celle que tu as laissé en fuguant.

Son ton est neutre, sans émotion, comme s'il n'avait pas de cœur. Je commençais à penser qu'il avait peut être réellement changé puisqu'il ne me menaçait pas ou ne me frappait pas devant mon comportement : une fois de plus, j'ai eu tord.

-Comment peux tu avoir autant changé en deux ans ? Papa, Maman est morte et elle ne reviendra plus ! Que tu le crois ou non, tu n'y es pour rien ! Je suis sûre qu'elle voudrait que tu te pardonnes. Pourquoi tu t'en prend à moi, je ne t'ai absolument rien fait ! L'alcool n'est pas la seule excuse, j'en suis certaine !

Cette fois-ci, je ne joue pas. C'est mon cœur qui parle.

Je suis tellement lassée de cette situation...

Pour toute réponse, il me donne un coup au ventre avec son avant bras.

Sec et rapide.

Il a la technique.

Ma respiration se coupe sous le choc : cette réaction est surtout psychologique car je ne m'y attendais pas du tout. Mon souffle reste saccadé pendant un moment, comme si j'étais essoufflée après avoir couru un marathon. Lorsque nous arrivons devant la maison, j'ai enfin réussis à retrouver mon sang froid.

Je n'ai pas pleuré : voilà la seule bonne nouvelle de cette journée.

Je sors de la voiture et fais quelques pas hésitants vers la porte.C'est étrange : je n'ai pas sentit cette sensation lorsque je suis revenue avec Nathan. Peut être parce que je me sentais en sécurité en sa présence ? A cet instant, j'ai l'impression que si je franchis cette porte, tout ce que j'ai vécu au Centre sera effacé.


Il faut que je retourne là bas. 

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