Le trajet me paraît durer une éternité. Mon excitation a eu largement le temps de retomber pour refaire place à l'angoisse. Et si la police ne venait finalement pas ? Je secoue la tête pour essayer de chasser ces mauvaises pensées, sans succès. Je la pose donc contre la nuque de Tristan et essaie de me concentrer sur les battements de son cœur. Ils sont rapides, ce qui prouve que lui aussi n'est pas dans un état de zen attitude, mais ce boum boum incessant a quelque chose d'apaisant.
Nous nous sommes à présent bien éloignés de la ville et nous roulons dans la campagne, la plupart du temps entre deux champs de maïs. Nous finissons finalement par tourner à droite et dire adieu à la nature quinze minutes plus tard. Les champs ont laissé place à des maisons pour le plus grand nombre abandonnées. Je sens mon cœur battre de plus en plus vite au fur et à mesure que nous nous rapprochons du point ultime.
Enfin, nous arrivons à la hauteur de plusieurs entrepôts consécutifs. John s'arrête précisément devant le numéro quarante neuf. Il descend du camion en nous intimant de rester à l'intérieur. Il se dirige ensuite vers un boîtier et tape un code que je n'arrive pas à déchiffrer. Une demi seconde plus tard, la porte métallique se soulève pour laisser place à une très grande pièce uniquement faite de béton. Il n'y a rien d'autre que les trois murs. Cet entrepôt est plus grand que je ne l'imaginais : on pourrait y placer au moins cinq camions comme celui-ci. John nous rejoint et gare notre camion à l'intérieur avant de baisser la porte avec ses mains, en l'arrêtant tout de même à environ un mètre du sol, histoire de ne pas nous plonger dans le noir complet.
Je descends après Tristan pour me dégourdir les jambes, Jade sur mes talons. Je fais trois petits bons sur place pour retrouver mon énergie.
John sort son arme de son étuis, la tend à Jade d'un air entendu puis en prend une autre, dissimulée contre sa cheville. Cette scène fait encore monter d'un cran la tension. Je n'y peux rien, les armes me mettront toujours aussi mal à l'aise.
Avant que je ne puisse demander où sont les agents de police censés nous aider, John nous donne la réponse :
- Ne vous inquiétez pas. Les renforts arrivent, nous avons cinq minutes d'avance.
Tristan secoue sa tête d'un air grave, puis vient se placer à ma droite, si proche que nos bras se frôlent.
Quelques minutes plus tard, nous entendons un bruit de moteur approcher, et je vois John et Jade assurer leur prise sur leur arme. Ils se postent de chaque côté de l'entrée, prêts à riposter contre un quelconque ennemis. Des bruits de pas approchent lentement. Les semelles frottant le sol à cette allure me donnent des frissons. J'ai envie de prendre mes jambes à mon cou, mais ce serait la pire chose à faire.
Je vois apparaître les deux pieds qui s'écartent juste devant la porte métallique. Une main se place sous le fer et le fait remonter, doucement, puis d'un coup. Je sursaute malgré moi, et tout ce que je peux voir, c'est l'arme que l'homme pointe sur nous. Je ne bouge pas, je suis pétrifiée sur place. Tristan, lui, vient se placer devant moi comme pour me protéger.
- Christopher ? S'exclame John. Mais qu'est-ce que tu fous là ?
J'entends dans sa voix de l'agacement. De toute évidence, sa présence ne faisait pas partie du plan. Celui ci l'ignore et baisse son arme, lentement, tout en ne quittant pas du regard Tristan.
- Je pourrais te poser la même question, il finit par répliquer.
Sa voix est claire, et elle témoigne de sa colère. Je me rappelle alors le jour où je suis entrée dans son bureau pour le supplier de nous aider. Il a refusé, sous prétexte de devoir protéger sa famille. Mais que fait-il là ? A-t-il changé de camp ?
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Le Centre
Fiksi RemajaJe m'appelle Alison et j'ai seize ans. Ma vie a basculé il y a deux ans dans un accident de voiture. Après cela, la violence faisait partie de mon quotidien. Aujourd'hui, grâce à la découverte d'un lieu unique, je peux enfin m'autoriser à vivre. J'a...