Chapitre 43

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Après avoir attendu dix minutes dehors tous les trois dans un silence des plus total, je vois John arriver à pieds de la rue qui fait face au magasin. Il est habillé en civil : il ne veut clairement pas attirer l'attention. A sa manière de marcher, je devine qu'il est agacé de devoir venir pour nous.

Mais il l'a fait.

Et je lui en suis très reconnaissante.

Si cet homme m'a bien apprise une chose, c'est de ne pas se fier à la première rencontre. Tout le monde peut cacher quelque chose. Il sert la main de l'agent et en bon faux papa, prend Ana et moi dans ses bras.

Il se retourne ensuite vers l'homme et lui demande avec beaucoup de respect dans la voix :

- Que s'est-il passé ?

- Vos filles ont tenté de voler cinq paquets de gâteaux. Je n'ai pas appeler la police car c'était une première fois et je ne pense pas que ce soit un délit majeur pour lequel ils doivent intervenir.

John semble plus exaspéré que jamais. Il nous regarde avec incompréhension et se passe la main droite sur la figure pour marquer ce sentiment. Je me rend compte à quel point venir voler quelque chose ici, dans cette ville, avec tout ce qui se passe et une enfant recherchée depuis des mois était inconscient et stupide. Je voudrais revenir en arrière. La déception de John me rend honteuse et je me sens rougir. Je détourne le regard en espérant qu'il ne le remarque pas.

- Je suis vraiment désolé, finit par dire John. Ma femme et moi sommes en plein divorce. Je pense qu'Ana et Alison essaient d'attirer notre attention en se rebellant. Je peux vous assurer que ça ne se reproduira plus.

Il tend la main à l'agent de sécurité pour clore la conversation ou en signe de bonne volonté, je ne sais pas. Je vois ce dernier la lui serrer en lui souriant.

- Tout le monde a droit à une seconde chance, il dit en nous regardant Ana et moi.

Nous le remercions une nouvelle fois de sa gentillesse et partons. Dès que nous sommes hors de portée de vue et de parole, nous remercions John à son tour, mais cette fois, en le voulant vraiment. Mais il a l'air réellement énervé à cause notre comportement. Ou seulement par le mien.

- Ne me remerciez pas, c'est normal. Mais je suis très déçu par vous, ou du moins par toi, Alison. Je ne connais pas assez Ana pour dire cela d'elle. Tu imagines ce qui aurait pu arriver ? Si vous étiez tombé sur un autre homme, il aurait probablement appelé la police. Alison, Ana a failli partir en détention pour mineur à cause de toi ! Une fugue plus un vol ne font pas bon ménage avec une enfant orpheline. En plus, après ce que nous avons fait hier, porter la moindre attention sur vous était la pire des choses à faire.

Il a raison, mais je n'aime le ton qu'il aborde. Ma crise d'adolescence me pousse à ne pas me laisser faire.

- Écoutez John, vous nous avez vraiment sauvé la mise ce matin, mais c'est bon, je sais que nous avons mal agit. Que j'ai mal agit. Je n'ai pas besoin que vous me fassiez la morale pour que je m'en rende compte. C'était une erreur et je pense que nous devrions être heureux que ce ce soit bien terminé au lieu de nous demander ce qui aurait pu arriver de pire.

- C'était de ma faute à moi aussi, intervient Ana. Je l'ai bassinée pendant longtemps pour que nous entrions dans ce magasin. Et c'est à cause de moi que ça a mal tourné. Je suis désolée.

Le silence revient, toujours aussi pesant, et je me rend compte que nous nous sommes arrêtés de marcher. Je m'adosse contre le mur pendant qu'Ana se balance de la droite vers la gauche en jouant avec ses pieds. Je ne pensais pas que John la mettrait aussi mal à l'aise.

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